LPR : « Une unanimité dans le souhait d’efforts budgétaires immédiats » (P-A. Raphan, rapporteur)
« La partie budgétaire sera le premier sujet discuté » et, sur ce point, « il y a une unanimité dans le souhait d’efforts immédiats sur les trois premières années », déclare Pierre-Alain Raphan
Député @ Assemblée nationale • Associé @ Accia Consulting
, député (LREM
La République en marche !
) de l’Essonne, à News Tank, le 07/09/2020, sur le projet de Loi de programmation de la recherche.
Nommé co-rapporteur du projet de loi le 29/07, Pierre-Alain Raphan est en charge des titres I, sur les « Orientations stratégiques de la recherche et programmation budgétaire », et III, « Consolider les dispositifs de financement et d’organisation de la recherche ». Il s’exprime sur le texte déposé par le Gouvernement à l’Assemblée nationale le 22/07/2020, avant le début de son examen par la commission des affaires culturelles et de l’éducation, dont il fait partie, le 14/09.
Concernant la trajectoire budgétaire, le député précise que lors de la discussion en commission, les rapporteurs souhaitent « apporter une vision globale du budget de la recherche. Il sera notamment gonflé par le PIA
Programme d’investissements d’avenir
et le Plan de relance [présenté le 03/09], qui va être versé sur les premières années. Ces éléments pourront contribuer à rassurer une partie des acteurs ».
En outre, ils préparent des amendements, pour le cas où le PIA et le Plan de relance ne répondraient pas au besoin d’un « effort immédiat ». « L’idée est que la courbe de l’augmentation budgétaire, qui est plutôt une “piste verte“ actuellement, devienne une “piste noire“. (..) Nous souhaitons assurer aux acteurs que l’effort porté sera lisible et ressenti dans les premières années. »
Quant à la durée de cette loi, après avoir effectué une partie des auditions de la commission, il indique que « certains préfèrent sur une période plus courte — la fin de ce quinquennat et un deuxième quinquennat [sept ans] — et d’autres nous disent que plus cela peut engager sur le long terme, mieux c’est ».
Par ailleurs, le rapporteur prépare des amendements sur trois autres thématiques, au sein de ses deux titres : les ODD
objectifs de développement durable
(dans le rapport annexé), la diffusion de la science dans le quotidien, ainsi que la valorisation du doctorat.
Dans cet entretien accordé à News Tank, Pierre-Alain Raphan revient sur les principaux enjeux des titres dont il est rapporteur, la teneur des amendements en cours de préparation ainsi que la volonté politique derrière le projet de LPR
Loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur
.
Un « engagement sur le temps long » (titre I)
Pierre-Alain Raphan se dit « satisfait qu’il y ait une volonté politique de porter une loi de programmation sur la recherche, comme il y en a eu une sur la partie militaire ». Pour lui, l’enjeu est « comme pour la loi de programmation militaire, d’assurer à l’écosystème un engagement sur un temps long ».
Concernant le titre I, « les débats seront concentrés sur la trajectoire de financement », estime-t-il.
« Pas de polémique particulière » sur le rapport annexé (art. 1)
Concernant le rapport annexé, qui est approuvé par l’article 1 du projet de loi, « il y a une vision partagée », affirme le rapporteur.
« Il y aura des ajustements en fonction des sujets que l’on souhaite aborder, mais, sur ce point, il n’y a pas de polémique particulière, si ce n’est l’ajout de thématiques ou de précisions sur certains sujets. »
Calendrier et organisation de l’examen du projet de LPR
Concernant le calendrier et l’organisation à venir pour le projet de loi, Pierre-Alain Raphan indique « ne pas avoir eu d’échange sur l’ordonnancement de l’examen des articles ».
« Nous allons en discuter avec le Mesri. La question se pose notamment concernant le rapport annexé, qui est très complet et amendable : faut-il le prioriser en commençant les débats avec lui, ce qui nous fera aborder des sujets très divers, ou le garder pour la fin ? Ce n’est pas encore tranché. »
Par ailleurs, il estime que la possibilité de parvenir à une adoption définitive du projet de loi d’ici la fin de l’année 2020 « dépendra notamment de la CMP Commission mixte paritaire , que nous espérons conclusive, ce qui permettrait une cohérence avec le PLF Projet de loi de finances 2021. Sinon, l’examen du texte se poursuivra en 2021. »
« Beaucoup plus de discussions » sur la trajectoire de financement (art. 2)
Contrairement au premier article, « la partie budgétaire amène beaucoup plus de discussions, principalement sur la trajectoire, c’est-à-dire la montée en charge », indique Pierre-Alain Raphan.
« Ce sera le premier sujet qui sera discuté. Il y a une unanimité dans le souhait d’efforts immédiats sur les trois premières années, quitte à lisser ensuite sur le reste de la programmation. C’est une demande que nous entendons et qui fera l’objet de discussions, entre les députés et avec le ministère également. »
Toutefois, « le tableau de l’article 2 n’intègre pas l’ensemble des budgets de la recherche française : il est question d’une partie des budgets rattachés au Mesri Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation , mais cela n’intègre ni les Plans d’investissements d’avenir, ni le Plan de relance annoncé le 03/09 », souligne Pierre-Alain Raphan.
Clarifier l’articulation de la LPR avec les PIA et le Plan de relance (art. 2)
Des interrogations compréhensibles dans le monde de la recherche »Les rapporteurs ont donc « demandé des précisions à l’exécutif sur cette articulation » entre le projet de LPR Loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur , les PIA Programme d’investissements d’avenir et le Plan de relance, afin de pouvoir « apporter une vision globale du budget de la recherche » lors de la discussion du texte en Commission des affaires culturelles et de l’éducation. Sans cela, « si on ne lit que l’article 2, on peut comprendre que cela soulève des interrogations dans le monde de la recherche », estime-t-il.
« L’idéal, au moins dans la communication et la visibilité, serait d’arriver à démontrer qu’avec le PIA 4 et le Plan de relance, la courbe de départ est beaucoup plus pentue, avec une mise à disposition quasi immédiate de financements. »
Concernant le PIA et le Plan de relance, les financements concernant la recherche passeront « principalement par l’ANR Agence nationale de la recherche », précise-t-il. Sur ce point, « l’enjeu est de savoir comment nous pouvons simplifier l’accès, avec l’idée de mettre en place un guichet unique, sur lequel l’ANR travaille ».
Un arbitrage du Gouvernement en faveur des appels à projets (art. 2)
Un autre point de l’article 2 du projet de loi « qui pourra amener des discussions est la ventilation appels à projets/financement récurrent », poursuit Pierre-Alain Raphan.
Assez séduit par la partie projets »« Le choix politique du gouvernement consiste à gonfler la partie projet. Cela permet aussi d’augmenter le pourcentage de réussite, qui décourageait énormément de laboratoires et de chercheurs, ainsi que le préciput, ce qui veut dire que des financements supplémentaires permettront au laboratoire de l’équipe lauréate d’un AAP Appel à projets d’utiliser ce budget à sa guise.
D’autres voix préfèreraient qu’il y ait moins de projets et que l’on puisse augmenter la part de récurrent. Pour l’instant, ce n’est pas l’arbitrage qui a été fait. Je suis moi-même assez séduit par la partie projets, à partir du moment où le pourcentage de réussite est augmenté et que le préciput n’est pas fléché. »
D’une révision de l’évaluation à la répartition du préciput (titre 2)
Évaluation : « Beaucoup de ce qu’on nous demande n’est pas d’ordre législatif » (art. 10)
L’article 10 du projet de loi porte sur l’évaluation et notamment sur le Hcéres Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur . « La principale demande consiste à préciser ses missions », selon le rapporteur : « Que faut-il évaluer ? Allons-nous au cœur de l’unité de recherche ? Comment nous plaçons-nous dans l’évaluation ? »
Des amendements à venir concernant le statut juridique du Hcéres »Un autre enjeu du débat concerne l’évolution du statut juridique du Hcéres. « Le Hcéres souhaite avoir une personnalité morale qui lui permettrait d’avoir une autre approche de la gestion RH Ressources humaines , d’aller chercher plus de financements dans le privé et enfin de participer à des appels d’offres internationaux. Il y aura des amendements dans ce sens, cela fait partie de nos discussions », précise Pierre-Alain Raphan.
Néanmoins, « sur le sujet de l’évaluation, beaucoup de ce qu’on nous demande n’est pas d’ordre législatif », affirme le rapporteur. « En effet, ce qui nous est remonté est qu’il y a aujourd’hui énormément d’évaluations qui prennent beaucoup de temps. Ce qu’on nous rapporte à ce sujet est que l’on donne les mêmes informations plusieurs fois par an à différents organismes. »
Pas le rôle de la LPR d’imposer un système d’évaluation »« Il faut donc repenser l’évaluation de la recherche, mais ce n’est pas de notre ressort. Cela pourrait plutôt être une mission de la nouvelle gouvernance du Hcéres. Cela pourrait mener à des périodes d’évaluation plus marquées, ou encore au fait d’avoir une base de données commune qui éviterait de répéter les mêmes évaluations. Le but étant bien entendu de simplifier l’approche et également l’aspect administratif, ce qui libérera du temps. »
Par ailleurs, il y a une « question idéologique » sur l’évaluation de la recherche : « Faut-il plus d’indicateurs quantitatifs ? Qualitatifs ? Sur quels critères évaluer ?
Quoi qu’il en soit, ce n’est pas de notre responsabilité. Nous pouvons pousser un message politique en ce sens, mais ce n’est pas le rôle de la LPR que d’imposer un système d’évaluation. »
Un « arbitrage à faire » sur la pertinence de « tout évaluer tout le temps »
« Une interrogation qui est régulièrement revenue lors des auditions est de savoir s’il y a une pertinence à tout évaluer tout le temps », ajoute Pierre-Alain Raphan. « Il a alors été proposé d’évaluer les programmes de recherche des universités ou des laboratoires, au lieu d’évaluer chaque laboratoire, chaque personne, etc. C’est un arbitrage à faire, qui fait partie des discussions. »
Toutefois, selon lui, « cela ne passerait sans doute pas directement par la loi, plutôt par un décret du ministère. Quoi qu’il en soit, nous relaierons la demande car c’est une approche organisationnelle que l’on peut pousser politiquement. »
« Ce qui m’intéresse, et qui est difficilement palpable juridiquement, c’est comment redonner du temps de recherche aux chercheurs, comment les libérer d’un temps inutile (recherche de financements, de partenariats, répétition d’actions faites pour l’évaluation).
Dans nos approches, on cherche tout le temps, ou très souvent, à gagner des moyens, mais on se pose rarement la question d’éviter d’en perdre. Cela ne passe pas forcément par la loi en tant que telle, mais plutôt par une sorte d’auto-évaluation du système, ce que les acteurs sont prêts à faire. Ils sont prêts à se mettre d’accord sur un référentiel commun et sur la manière de l’organiser. Nous aimerions participer politiquement à ces aspects en les relayant et en leur donnant une valeur en ”temps de recherche”. »
« Très peu de débats sur les unités de recherche » (art. 11)
Concernant l’article 11, qui porte sur la définition des unités de recherche, « il y a très peu de débats », indique le rapporteur.
« Une demande a toutefois été portée par certains acteurs : avoir une vigilance sur une éventuelle trop forte autonomie des associations et des fondations concernant les unités de recherche. Certains préféraient que l’université conserve une certaine mainmise sur ces sujets. »
« Nous attendons des propositions des acteurs concernant la répartition du préciput » (art. 12)
L’article 12 du projet de loi porte quant à lui sur l’abondement financier qui revient aux parties prenantes des projets lauréats d’un AAP de l’ANR, qui doit servir à soutenir les unités de recherche et renforcer la mise en œuvre des orientations de politique scientifique portées par les laboratoires et les établissements. Il s’agit du préciput.
Nous attendons des propositions des acteurs »Un des enjeux est la répartition de ce préciput entre les parties prenantes d’un projet. Sur ce point, « nous attendons des propositions des acteurs », déclare Pierre-Alain Raphan, qui précise que « des discussions sont en cours ».
Selon lui, la question est : « le préciput doit-il être fléché sur le laboratoire ou réparti, dans le cadre de recherche partenariale, sur l’ensemble des laboratoires ?
Il existe deux visions :
- une première que l’on pourrait qualifier de méritocratique : lorsqu’un laboratoire est lauréat, cela lui revient;
- la seconde se veut plus globale et vise à soutenir la recherche française dans son ensemble, à l’aider à monter d’un cran. »
Autres amendements en réflexion
« Insister » sur les ODD dans le rapport annexé
« Dans le rapport annexé, nous allons insister sur les objectifs de développement durable et l’agenda 2030, puisque la programmation du projet de loi court également jusqu’en 2030 », prévoit Pierre-Alain Raphan.
« L’objectif est de renforcer la vision de la recherche pour garantir que cette trajectoire permette d’atteindre les ODD objectifs de développement durable . Nous ferons des amendements assez clairs sur le sujet. »
Diffusion de la science dans le quotidien
« Nous allons aussi déposer des amendements sur la manière de mieux parler de la science dans le quotidien, donc la diffusion de la science dans la société », indique le rapporteur.
« Ce sujet comporte plusieurs aspects :
- Une demande de meilleure intégration des recherches participatives. Une possibilité est de flécher une partie du budget de l’ANR sur ce point. Une autre est de proposer une organisation territoriale permettant une meilleure intégration ; ou, lorsqu’une organisation territoriale existe, réfléchir à la manière de la renforcer.
- Une volonté de mieux travailler avec l’éducation nationale. Le dispositif un chercheur par classe est très intéressant, il me semble. Nous souhaitons le renforcer.
- Une volonté d’engager l’audiovisuel public sur ces sujets, par exemple en augmentant les quotas de diffusion, les moyens de diffusion, et en insistant sur la diversité de la recherche. Nous voulons en effet favoriser le pluridisciplinaire et démontrer qu’il faut investir tôt dans la recherche pour obtenir des résultats visibles au quotidien. Il s’agit aussi de diffuser la méthode scientifique, qui a été très décriée pendant la crise de la Covid-19. Cela peut se traduire dans le projet de loi soit par l’ajout d’éléments dans le rapport annexé, soit par une demande budgétaire. »
Mieux valoriser le doctorat
« L’Andes Association nationale des docteurs nous a fait remonter un autre sujet : la nécessité de mieux valoriser la recherche et le doctorat dans la société et notamment dans les entreprises ou dans la haute fonction publique », poursuit Pierre-Alain Raphan.
« Certains aspects relèvent de conventions collectives, donc nous ne pouvons pas y toucher directement », précise-t-il. Toutefois, « un autre enjeu est de débrider le titre de docteur, qui parfois est décrié. Nous attendons aussi des propositions sur ces sujets. »
« La loi de programmation engage une nation »
Pour le rapporteur, « ce projet de loi est un engagement à augmenter les moyens de la recherche pendant au moins les dix prochaines années ». Et un de ses objectifs est d'« assurer à l’écosystème de la recherche un engagement sur le temps long, de ramener une cohérence entre le temps politique et celui de la recherche ».
« Un engagement législatif et moral »
« À ceux qui s’inquiètent du fait qu’il soit possible de revenir sur la trajectoire budgétaire d’une loi de programmation par la suite, nous répondons en citant l’exemple de la loi de programmation militaire », déclare Pierre-Alain Raphan. « Elle est plus courte et comprend aussi des clauses de revoyure, mais il s’agit d’un engagement législatif et moral. »
« Nous votons un texte et nous le respectons. Et la loi de programmation militaire a été respectée. Il y a parfois même plus de financements que prévu ; cela signifie que le socle de base que constitue cette programmation est maintenu, et nous pouvons ajouter des moyens en fonction des besoins du moment. »
« Chaque année, le PLF doit traduire l’engagement de la loi de programmation ; ce n’est pas l’inverse. Effectivement, nous devons ancrer l’engagement dans le marbre chaque année, ce qui peut laisser une place au doute chez certains, mais beaucoup sont satisfaits qu’il y ait un engagement pluriannuel. »
Il indique souhaiter « rassurer les acteurs en disant que la loi de programmation engage une nation, pas un parti politique, sur sa vision du futur, de l’innovation et de la recherche. Et si un parti politique, dans cinq ou dix ans, décide qu’il ne s’intéresse plus à la recherche, qu’il ne s’intéresse plus à l’avenir, nous les laisserons gérer ; mais ce n’est pas la France. »
Le protocole d’accord « rémunérations et carrières » pourrait permettre « une plus grande confiance »
Pierre-Alain Raphan indique que « des échanges ont eu lieu avec le cabinet de Frédérique Vidal sur la négociation du protocole d’accord “rémunérations et carrières” qui est en cours. Le cabinet nous fera un retour lorsqu’il pourra, pour ne pas trahir les discussions avec les organisations syndicales. »
Ce protocole d’accord « aura nécessairement un impact sur la loi », estime-t-il, « par exemple sur la ventilation des financements ou l’alimentation d’autres lignes de crédits. Plus tôt ce protocole d’accord sera signé, mieux ce sera. »
En outre, « si l’exécutif parvient à un accord avec la majorité des organisations syndicales, cela amènera une plus grande confiance sur la vision portée dans le projet de loi. Ils auront ancré dans le marbre une partie importante, ce qui nous enlèvera peut-être une crainte sur un éventuel non-engagement par la suite. »
Pierre-Alain Raphan
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Doctorate business administration
Fiche n° 40358, créée le 07/09/2020 à 16:02 - MàJ le 07/09/2020 à 16:19