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UVSQ : Loïc Josseran « inquiet de certains points » du nouveau modèle cible de l’EPE Paris-Saclay

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Interview n°413934 - Publié le
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©   D.R.
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« Je reste convaincu de l’intérêt d’une université comme Paris-Saclay, car c’est un projet fédérateur, qui permet d’établir véritablement une université de classe mondiale au niveau français et européen. […] Mais je ne cache pas que je suis assez inquiet de certains points », déclare Loïc Josseran, président de l’UVSQ Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines , à News Tank, le 02/10/2025.

Il revient sur l’évolution du modèle-cible pour l’EPE Etablissement public expérimental Université Paris-Saclay, validé en CA Conseil d’administration le 08/07/2025 avec 17 voix pour, 15 contre et 5 abstentions. Parmi les changements majeurs : l’abandon d’une intégration des universités d’Évry et Versailles Saint-Quentin au profit d’une association par convention avec le grand établissement. Les projets de statuts sont prévus pour début 2026.

« Dans ce projet, des concessions importantes sont demandées aux universités membres associées, par exemple sur le périmètre électoral du conseil d’administration, ou sur le fait que les présidents ne feront plus partie de la décision pour élire le président de l’UPS Université Paris-Saclay . Tout ceci est troublant », indique ainsi le président de l’UVSQ.

« Nous avons le sentiment d’être les variables d’ajustement de décisions et d’organisation de politique interne, et comme moi, ma communauté universitaire ne l’a toujours pas accepté. D’autant que nous sommes sur la photo de famille depuis le départ. Il ne s’agirait pas que nous soyons invisibilisés. »

« Il nous faut construire un dispositif qui mette en avant une offre de formation riche, de premier ordre, adossée à la recherche, et qui mutualise des moyens de recherche de grande envergure », dit-il.


« Des concessions importantes sont demandées aux universités membres associées »

Comment voyez-vous l’évolution du projet Paris-Saclay, et son impact pour l’UVSQ ?

Je reste convaincu de l’intérêt d’une université comme Paris-Saclay, car c’est un projet fédérateur, qui permet d’établir véritablement une université de classe mondiale au niveau français et européen. L’État nous a confié à cet égard des moyens importants au regard des enjeux et de la situation budgétaire générale, nous avons donc une responsabilité sociale de construire quelque chose qui fonctionne bien et qui réponde à cette ambition première.

Nous sommes encore en train d’écrire l’histoire à venir de Paris Saclay, et certaines choses ne sont pas encore arrêtées. Tout en étant conscient des tensions internes qui peuvent exister dans une université - et qui ont conduit à un vote très serré au CA de juillet de l’Université Paris-Saclay sur le projet de modèle de sortie d’expérimentation -, je ne cache pas que je suis assez inquiet de certains points.

Il ne s’agirait pas que nous soyons invisibilisés »

Dans ce projet, des concessions importantes sont demandées aux universités membres associées, par exemple sur le périmètre électoral du Conseil d’Administration (CA), ou sur le fait que les présidents ne feront plus partie de la décision pour élire le président de l’UPS. Tout ceci est troublant. Nous avons le sentiment d’être les variables d’ajustement de décisions et d’organisation de politique interne, et comme moi, ma communauté universitaire ne l’a toujours pas accepté. D’autant que nous sommes sur la photo de famille depuis le départ. Il ne s’agirait pas que nous soyons invisibilisés.

Un autre modèle aurait-il été possible ?

La complexité vient du fait qu’aujourd’hui, le CA qui gère l’ensemble est resté celui qui administre une des trois universités. Une autre construction aurait pu être envisagée, avec une association et des instances réunissant les trois universités, mais ce choix n’a pas été retenu à l’époque, car une fusion était prévue, et donc à terme, ce CA devait accueillir l’ensemble. Je n’ai pas réussi à faire machine arrière lorsque je suis arrivé à la présidence de l’UVSQ. Les ordonnances de 2018 ont créé cette difficulté, et il nous faut désormais trouver une voie de sortie pour répondre à toutes les attentes.

Il nous faut construire un dispositif qui mette en avant une offre de formation riche, de premier ordre, adossée à la recherche, et qui mutualise des moyens de recherche de grande envergure. De fait, nous apportons beaucoup : l’UVSQ, c’est plus de 2000 publications scientifiques et 80 thèses par an, des contrats au niveau européen, 3 ERC European Research Council , la coordination ou la participation à 3 IHU Institut hospitalo-universitaire , sans oublier nos 23 000 étudiants.

Un seul exemple : au moment du sommet de l’IA Intelligence artificielle organisé par l’Élysée en février 2025, un seul laboratoire du périmètre UPS était invité, et il s’agissait d’un laboratoire de droit de l’UVSQ, le DANTE, l’un des rares à travailler sur l’impact de l’IA sur nos sociétés. Nous sommes sur des niches remarquables et reconnues.

Voyez-vous des risques avec ce modèle sur votre visibilité en matière de formation et recherche ?

J’aimerais croire qu’il n’y a pas de risques, mais force est de constater, par exemple, que cette année, contre toute attente, l’UVSQ est réapparue en propre dans le classement de Shanghai - à une place très honorable d’ailleurs, au 800e rang mondial et 25e rang français.

Des signaux à prendre en compte »

Je ne suis pas sûr de savoir exactement pourquoi, mais ils ont dû être informés de l’évolution du projet. Nous avions discuté en juillet d’aller voir ARWU Academic Ranking of World Universities pour leur expliquer que le projet évoluait, qu’il ne s’agissait plus d’une fusion mais d’une alliance, mais que cela ne changeait pas grand-chose. A ce jour, ce rendez-vous n’a pas eu lieu. En tout cas, ce sont des signaux à prendre en compte.

Et concernant la disparition de l’école universitaire de premier cycle ?

Le fait que nous reprenions le portage de nos licences et que l’école universitaire de premier cycle se recentre sur la réussite étudiante (sans disparaître) constitue un élément structurant qui permet d’avoir des ressources en matière d’aménagements et de financements. Mais je ne voudrais pas qu’à terme l’UVSQ soit une université qui porte seulement des licences, tandis que tout le volet master et doctorat relèverait du périmètre UPS, dont l’UVSQ ne serait qu’associée.

C’est pourquoi nous avons besoin de garanties fortes qui se traduisent par des instances convenablement dimensionnées. Un comité des trois présidents est prévu, il faudra lui définir un périmètre d’actions et de responsabilités. Il faut également une instance où les universités peuvent discuter de leurs problématiques, qui ne sont pas celles des personnalités extérieures (PQE Personnalités qualifiées extérieures ) ni celles des écoles et des composantes.

Sinon, nous arriverons à une forme de paradoxe, avec nos étudiants qui ont une carte d’étudiant de l’UPS et qui pourront voter pour leurs représentants aux instances de l’UPS, alors que les personnels, eux, ne le pourront pas.

Avez-vous obtenu des garanties, notamment sur la signature scientifique ?

J’espère qu’il y a une forme de confiance pour pouvoir continuer à avancer. Un travail doit s’engager autour de la signature mais je ne sais pas comment cette quadrature sera résolue. J’ai des équipes de recherche labellisées UPS UVSQ, d’autres seulement UVSQ. Toutes contribuent au classement. Dans cet ensemble qui se construit il faut que chacun ait une place, et les UMA (université membre associé) amènent des éléments importants.

Si vos demandes ne trouvaient pas de réponse, pourriez-vous envisager le retrait de l’UVSQ du projet ?

Une vraie forme d’indépendance »

Nous n’en sommes pas encore là, j’espère que nous n’en viendrons pas là, et je ne ferai rien en ce sens. Mais je reste attentif à défendre les intérêts de mon établissement, c’est mon rôle de président. Ensuite, toute discussion et décision de ce type passeraient nécessairement par le CA de l’UVSQ.

Le mieux pour l’UVSQ reste de construire cet ensemble, et je mesure notre chance de participer à une telle construction. D’autant que nous conservons dans ce projet notre personnalité morale et juridique, une vraie forme d’indépendance, notre capacité à diplômer et créer des diplômes, ce qui est important pour nos collectivités partenaires, très attachés à une université de territoire. Mais ce projet doit être à la hauteur de son engagement.

Comment imaginez-vous la future association ? Avec quelles délégations de compétences ?

Ce que je souhaite à la fin de cette construction, c’est un cercle vertueux : que l’UVSQ participe à cette alliance, à travers sa formation et sa recherche, et qu’elle bénéficie de l’image et de l’attractivité auxquelles elle contribue. En termes de compétences, nous avons déjà beaucoup de choses en commun : toutes nos formations de master, les formations doctorales, les doubles licences, des tutelles sur bon nombre d’équipes de recherche, nos HDR Habilitation à diriger des recherches

Nous apportons un savoir-faire »

Il faut aussi que nous puissions continuer, dans cet ensemble, à développer les conditions d’études, ainsi que la dimension internationale essentielle pour le rayonnement de l’université. La situation de l’État laisse peu de doutes sur le fait que l’argent coule des murs pour les universités, donc nous devons développer nos ressources propres pour avoir des marges de manœuvre plus importantes. Nous apportons un savoir-faire, et maintenant il faut le faire savoir.

Vous n’avez pas fait évoluer votre marque, contrairement à Évry, pourquoi ?

Nous resterons UVSQ, c’est un patrimoine nominatif important, car le nom de Versailles incarne un certain prestige au niveau national et international. Et Saint-Quentin-en-Yvelines, de par sa participation et sa visibilité lors des JO Journal officiel de 2024 a créé une dynamique positive, sans compter la richesse industrielle de notre territoire, avec la présence d’Airbus, Atos, Safran, Crédit Agricole, etc.

Nous entamons un travail de rapprochement avec l’agglomération mantaise qui accueille elle aussi des entreprises majeures, nous ouvrant des perspectives en matière de recherche partenariale. Et nous pouvons aller encore plus loin. Nous venons ainsi de confier la présidence de la fondation à Jean-Paul Carta, un industriel des Yvelines. C’est un entrepreneur reconnu et engagé sur les sujets de formation. Il connaît les besoins des entreprises et aidera l’UVSQ à rayonner plus encore sur son territoire.

Dans une interview à News Tank sur le même sujet, le 11/09, Vincent Bouhier, président de l’Université d’Evry Paris Saclay indiquait : « Le terme d’association ne doit pas être réducteur ou laisser penser que nous sommes dans une simple coopération. Nous ne sommes pas une Comue Communautés d’universités et d’établissements . Il s’agit bien d’un engagement à travailler ensemble, dans la durée », estimant que « le projet initial de l’EPE demeure ».

Il évoquait plusieurs points de vigilance : la participation aux instances, l’association des deux universités « dans la direction des équipes des graduate schools et des écoles doctorales ». Mais aussi la signature scientifique de leurs laboratoires : « Elle doit rester Paris-Saclay, c’est une attente forte de notre communauté. »

Loïc Josseran


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Parcours

Alliance Contre le Tabac
Président

Établissement & diplôme

Université Paris 6 - Pierre et Marie Curie (UPMC)
Doctorat en épidémiologie

Fiche n° 52924, créée le 03/12/2024 à 08:26 - MàJ le 03/10/2025 à 11:44

Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ)


Catégorie : Universités


Adresse du siège

55 avenue de Paris
78035 Versailles Cedex France


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Fiche n° 1775, créée le 05/05/2014 à 12:19 - MàJ le 13/10/2025 à 11:00


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