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[Bilan du quinquennat] « La marche forcée vers le modèle anglo-saxon » (Éric Lamarque)

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Tribune n°247561 - Publié le 06/04/2022 à 14:16
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©  J.Lortic
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« Toutes les annonces et décisions prises ces dernières années, l’ont été, sans le dire et l’assumer, marquées du sceau du modèle anglo-saxon d’enseignement supérieur. (…) Pour autant, ce choix est-il adapté et réaliste dans notre environnement ? Il faut se tourner vers les principes qui sous-tendent sa montée en puissance afin de montrer que ce qui a fonctionné n’est pas forcément le modèle à suivre en France, en tout cas dans l’ensemble de ses dimensions. »

C’est ce qu’écrit Éric Lamarque, directeur de l’IAE Paris Sorbonne et président d’IAE France, dans une tribune transmise à News Tank, dans le cadre d’une série dressant le bilan du dernier quinquennat en matière d’Esri.

Il revient en détail sur trois dimensions « à la base des décisions politiques de ce dernier quinquennat : regroupements, autonomie, évaluation ».

Il appelle à « construire un modèle d’enseignement supérieur en accord avec nos principes avec des objectifs clairs et des ambitions de performance diversifiées, prenant en compte notre intégration européenne, et sortant des revendications syndicales stériles n’ayant d’autres ambitions que de se servir de l’université pour affronter le pouvoir en place ».

Éric Lamarque précise que ces éléments n’engagent pas le réseau des IAE ni l’IAE Paris Sorbonne. « C’est mon analyse à l’issue de quatre ans de présidence de section CNU Conseil national des universités et cinq ans de direction d’un établissement et de présidence d’un réseau d’écoles internes », ajoute-t-il.


La marche forcée de l’enseignement supérieur français vers le modèle anglo-saxon

Un mimétisme généralisé saisissant »

Toutes les annonces et décisions prises ces dernières années, l’ont été, sans le dire et l’assumer, marquées du sceau du modèle anglo-saxon d’enseignement supérieur. La justification souvent avancée a été celle de son succès évident si l’on s’en tient aux classements systématiques des universités et des établissements, façon tripadvisor, où dominent très largement les universités nord-américaines et anglaises.

Les succès sont indéniables en termes de production scientifique, de reconnaissance par les entreprises multinationales ou de production de brevets. Il est aujourd’hui repris par de nombreux pays de toutes les régions du monde malgré les plaintes et les récriminations que j’ai pu entendre dans la vingtaine de pays dans lesquels j’ai eu l’occasion de me rendre avant la crise sanitaire.

Ce mimétisme généralisé est saisissant et institutionnalise une domination mondiale de ce modèle appuyé par l’utilisation généralisée de l’anglais. Pour autant, ce choix est-il adapté et réaliste dans notre environnement ? Il faut se tourner vers les principes qui sous-tendent sa montée en puissance afin de montrer que ce qui a fonctionné n’est pas forcément le modèle à suivre en France, en tout cas dans l’ensemble de ses dimensions.

On peut les regrouper en trois grandes thématiques qui ont été à la base des décisions politiques de ce dernier quinquennat : regroupements, autonomie, évaluation.

Les regroupements : aucune réflexion sur leur management 

Ils sont souhaités et fortement incités dans le cadre des ordonnances de 2018 via des établissements publics expérimentaux (EPE) et avaient déjà été initiés dans les années 2000 avec les Pres Pôle de recherche et d’enseignement supérieur puis les Comue Communautés d’universités et d’établissements regroupant universités et établissements, et si possible organismes de recherche.

Il est clair que la séparation des universités et de ces organismes pose question. La proximité et la continuité entre la recherche et ses productions et l’enseignement est absolument nécessaire. Le regroupement, a minima leur rapprochement, est donc bien une nécessité. Mais il faut du coup éviter que celui-ci conduise les organismes de recherche à imposer leur façon de procéder, leur organisation, leurs objectifs et une recherche souvent trop difficilement exploitable au niveau enseignement ou au niveau développement économique et social. Des regroupements pour en faire des organismes de recherche à peine redessinés sur le dos de l’université ne s’occupant plus des étudiants, certainement pas !

Sur le plan de l’efficacité organisationnelle, le problème de ces regroupements est qu’ils ne se fondent pas du tout sur un objectif de taille critique, soit en termes de nombre d’étudiants, d’enseignants-chercheurs, de personnels administratifs ou de budget total clairement identifié. Harvard ou le MIT ne sont pas les établissements qui ont le plus d’étudiants.

Le règne de la centralisation

Des grands ensembles largement ingouvernables »

Autre sujet, les présidences ou les directions administratives de ces nouveaux établissements n’ont pas été formées pour diriger des structures de taille aussi importante et aucune réflexion n’a été menée sur le management et le pilotage de telles structures.

Seule la centralisation est considérée comme un dispositif adéquat. La chaine des responsabilités n’a pas été repensée, de sorte que ces grands ensembles sont largement ingouvernables, quoi qu’on en dise, et fonctionnent très en dessous de leur potentiel.

Cela n’empêche pas d’additionner les contributions des uns et des autres et l’on finit par se retrouver plutôt bien classé. On rentre donc dans le top 50, mais on est bien loin d’être champion d’Europe ou champion du monde, voire dans le top 10. Il faudra d’autres formes de gouvernance pour retrouver une université française dans le top 10.

Résultat, pour un doyen de faculté ou un directeur d’école interne, ou un collègue, par rapport à la situation historique d’une centralisation par l’État, la centralisation au niveau d’une présidence rendent l’exercice de nos activités davantage compliquée.

Ajout de strates intermédiaires aux prérogatives peu claires, pouvoir d’une présidence ou d’un DGS Directeur/trice général(e) des services ne voulant pas qu’une tête ne dépasse. Si l’on se rappelle l’ancien monde, beaucoup s’y retrouvaient davantage, et si on n’est pas « dans les petits papiers du central », la situation est bien pire ! La volonté de Toulouse School of Economics (TSE) de devenir grand établissement et l’attrait pour le statut d’école interne en sont la parfaite illustration.

On nous annonce aussi l’arrivée d’énarques ou peut-être d’anciens dirigeants d’entreprises à la tête de nos établissements considérant qu’il n’y avait plus qu’eux pour ramener un peu d’ordre dans toutes ces structures qui ont tendance à partir un peu dans tous les sens. Modèle anglo-saxon quand tu nous tiens ! On note même la volonté de leur faire obtenir un doctorat à moindres frais ! Plutôt bien français pour le coup, les diplômés des grandes écoles étant considérés comme omniscients par construction.

Sans doute des programmes de formations obligatoires à la gouvernance, au management, au pilotage de ces nouvelles structures pour les collègues et les équipes universitaires ayant fait le choix d’assumer ces charges de direction seraient les bienvenus plutôt que d’aller vers un modèle de séparation désastreux entre le contenu de nos activités (enseignement et recherche) et une gestion administrative des moyens. La gestion de l’hôpital en est la parfaite illustration.

La part belle aux structures privées

Enfin ces regroupements font de plus en plus la part belle aux structures privées, en particulier dans le domaine des écoles d’ingénieurs et surtout de management.

À partir de 2017, nous avons vu plusieurs écoles intégrer des ex-Comue Communautés d’universités et d’établissements , des EPE Etablissement public expérimental ou des associations territoriales. Les universitaires non concernés sur le plan des disciplines enseignées dans ces établissements les ont même accueillis les bras ouverts. Mythe des « grandes » écoles, pensant encore qu’elles n’étaient accessibles que via les prépas à la française, possibilité de faire assumer à ces structures une demande sociale croissante vers des disciplines moins nobles comme le management…

Les arguments n’ont pas manqué et les collègues concernés n’ont pu que constater avec un certain désarroi ce tapis rouge parfois déroulé pour intégrer ces EPE, alors qu’eux-mêmes étaient contraints de nager avec différents boulets aux pieds (pas de postes supplémentaires, accueillir plus d’étudiants, faibles moyens pour la recherche…).

La construction d’un dispositif public/privé »

Cette intégration est le dernier label manquant à ces écoles après leurs accréditations internationales, car il n’existe pas d’autres pays où on les trouve à l’extérieur de l’université. Dire que son école n’est pas universitaire est une incongruité voire une faiblesse à l’international ! La marche vers ce modèle s’accompagne donc d’une privatisation d’une partie de l’enseignement supérieur, c’est inéluctable !

Aucune réflexion sur la construction d’un dispositif public/privé

Une telle intégration est sans doute réalisable, mais certainement pas en méprisant les structures internes existantes. Aucune réflexion n’a été engagée sur la construction d’un dispositif public/privé qui pourrait être une originalité de notre modèle. A minima, si une structure privée bénéficie du label « université », le versement de royalties devrait être considéré !

Bien entendu rien de tout cela n’a été discuté, encore moins négocié. On est là au cœur d’un débat qui n’a jamais été explicitement posé et encore moins assumé. Le statut d’Eespig Établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général en est la meilleure illustration. Se draper dans l’intérêt général pour obtenir quelques subventions !

Partant du principe que l’État ne peut pas tout, nombreux sont ceux qui sont prêts à déléguer au privé ces activités et n’ont pas de difficulté à considérer l’éducation comme une simple marchandise, où finalement il suffit de payer pour faire croire que l’on a acquis des compétences.

Les autres disciplines comme le droit, la médecine ou les sciences de la vie se sentent complètement à l’abri de ce genre d’évolutions. Elles se trompent. Nous voyons arriver des universités privées, qui ne disent pas leur nom, pilotées par des fonds d’investissement avant tout soucieux de leurs marges.

Les pays du nord de l’Europe ou le Québec se sont tous organisés pour maintenir un enseignement supérieur public d’excellence, quitte à être plus sélectif et à introduire des droits d’inscription un peu plus élevés. Ce choix n’a jamais été discuté en France. Demander à l’université d’accueillir tout le monde est orthogonal avec la volonté de figurer en haut des classements internationaux. Tout le monde en est conscient.

L’autonomie : des injonctions et signaux contradictoires

Un mot magique, ou plutôt catastrophique, prononcé voilà 15 ans alors que la terminologie officielle fait référence à des responsabilités et compétences élargies conférées aux universités. Catastrophique d’y faire référence, car il n’est pas question d’autonomie quand votre budget dépend à 95 % de ce que vous accorde l’État ! Ou alors il faut renforcer les stratégies permettant de récupérer des ressources propres (formation continue, alternance, mécénat, recherche, création de filiales…).

L’IAE Paris Sorbonne que je dirige c’est 60 % de ressources propres, et nous n’avons malgré tout que très peu de marges de manœuvre face à notre contrôle budgétaire ou face au ministère qui doivent nous autoriser à engager un certain nombre de dépenses… vous avez dit autonomie !

Quelques réformes ont mis le feu »

Les injonctions et les signaux ont été plus que contradictoires sur ce sujet ce qui a plongé les dirigeants de l’enseignement supérieur dans la plus grande perplexité. Quelques réformes ont mis le feu de façon inattendue dans la perspective d’une plus grande autonomie.

En particulier la fin de la procédure de qualification aux fonctions de professeur par le CNU Conseil national des universités et la tentative de ne plus lancer de recrutement par des concours nationaux d’agrégation ont marqué les dernières années, en période Covid, donc sans en discuter réellement.

Un modèle porté vers la performance individuelle des établissements

Cette « autonomie » dans le recrutement des professeurs (mais pas dans le financement de leur poste) est présentée comme une mesure phare en cohérence avec les principes du modèle anglo-saxon ! Là encore ce modèle est naturellement porté vers la performance individuelle des établissements, loin de toute idée de performance collective au niveau d’une nation. Si nous étions dans cette idée de performance individuelle pour tous, pourquoi pas, car cela garantissait le recrutement des meilleurs collègues possibles dans tout le pays. Dans notre modèle sociétal il n’en sera rien.

La mise en retrait des instances nationales est une erreur »

Quelques grandes universités soucieuses de leur classement international le feront. La grande majorité des autres s’en serviront pour renforcer des communautés syndicales, amicales, idéologiques pour en faire le lit d’un savoir non validé, de qualité inférieure, soumettant les étudiants qui n’auront pas pu rejoindre les meilleures universités en France ou à l’étranger, ou n’ayant pas les moyens de se payer une structure privée, à des connaissances très peu utiles pour leur insertion professionnelle ou pire, à des idéologies assez dangereuses.

Là encore la gouvernance des établissements ne me semble pas au niveau pour éviter ce genre de situation.

La mise en retrait des instances nationales

Laisser la main aux universités totalement sur ces questions c’est assumer qu’on laisse peut-être 80 % des établissements publics hors de contrôle dans la production de connaissances enseignables laissant ainsi place aux établissements privés qui, comme au niveau du lycée, donneront aux élèves et à leurs parents le sentiment qu’en payant ils seront dans des environnements un peu plus sécurisés et plus rassurants. Bien entendu, personne ne l’assume explicitement.

La mise en retrait des instances nationales ou de dispositifs nationaux est une erreur dans notre contexte sociétal et traduit cet aveuglement envers le modèle anglo-saxon. Sans doute faut-il les repositionner car on ne peut rester sur un dispositif conçu il y a plusieurs dizaines d’années.

Ces mesures touchant aux recrutements de certaines catégories de personnels ont eu comme effet de mettre au second plan les efforts faits en matière d’augmentation de certaines primes et la volonté de revalorisation de certaines indemnités. La méthode, en outre, dans le contexte Covid, en a choqué plus d’un.

Davantage d’autonomie et même seulement davantage de responsabilités suppose davantage de confiance. Or, il n’y en a pas.

Ni entre le niveau État, les politiques, et les établissements. Ni entre les présidences des établissements et leurs composantes. Les dialogues de gestion et les contrats d’objectifs, s’ils sont nécessaires, n’ont pas permis un renforcement de la confiance.

Pas d’autonomie sans moyens financiers

Enfin une vraie autonomie, comme cette volonté de jouer au même jeu que le modèle anglo-saxon, suppose une hausse majeure des moyens financiers des universités. Les débats n’ont jamais cessé autour de ces questions et on n’aura pas la tentation de comparer les budgets d’Harvard et celui de Sorbonne Université, ce dernier étant juste équivalent à celui de la seule Harvard Business School !

Sauf à espérer l’arrivée de donateurs en mode club professionnel de sport comme le PSG, il faut envisager d’autres leviers que ceux de droits d’inscription supposant un endettement à long terme des étudiants et de leurs familles. Deux ont été mis en place ces derniers mois : le lancement des universités européennes et la possibilité de filialiser des activités. Ils ne sont clairement pas encore exploités pour en faire de vrais leviers de développement.

Les bases me semblent posées en espérant que quelques pseudo défenseurs du service public ne viennent pas annihiler la motivation des acteurs soucieux de trouver des alternatives à une dépendance à quasi 100 % du budget de l’État.

Évaluation : des objectifs à définir clairement

C’est une condition nécessaire à cette volonté de renforcement de l’autonomie. Le repositionnement du Hcéres Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur constitue une évolution logique dans ce contexte. L’intégration de la CTI Commission des titres d’ingénieur pour les diplômes d’ingénieurs et de la CEFDG Commission d’évaluation des formations et diplômes de gestion pour les diplômes de gestion et de management est cohérente dans une perspective d’indépendance du dispositif.

Dans le modèle anglo-saxon, le budget des agences d’évaluation est sans commune mesure avec le sien !

Par ailleurs, l’indépendance la plus stricte est observée vis-à-vis de l’État. Le modèle anglo-saxon est de ce point de vue d’une grande cohérence. Une évaluation indépendante constitue la base d’un dispositif financé par le contribuable. Les débats portent davantage sur les critères et les référentiels de cette évaluation puis de l’utilisation qui en sera faite.

S’agissant des critères et des référentiels, ils ne peuvent être reconnus et partagés que si l’objectif des établissements d’enseignement supérieur sont clairement définis :

  • leader mondiaux de la recherche ou simplement leader national,
  • insertion professionnelle des diplômés,
  • niveau de salaire des jeunes diplômés,
  • accueillir coûte que coûte les bacheliers,
  • faire acquérir des compétences,
  • faire acquérir des connaissances même si elles ne conduisent pas à l’insertion professionnelle…

À l’évidence, il faut choisir, car il est quasi impossible de réaliser avec un bon niveau d’efficacité des objectifs aussi différents et qui ne fonctionnent pas complètement en synergie. Les instances nationales d’évaluation auxquelles j’ai participé ont construit collectivement ces référentiels. Dans le domaine du management, des organismes privés ont développé des dispositifs d’accréditation dédiés offrant une forte visibilité. Le domaine de la formation professionnelle exige des dispositifs d’évaluation de la qualité et de la pertinence des formations.

La légitimité de l’évaluateur par l’évalué est essentielle »

Le souci de nombreux établissements ou composantes est donc de savoir si elles vont s’y retrouver dans ces référentiels ou si elles ne vont pas faire les frais de critères issus de quelques champs scientifiques dominant clairement inadaptés à leur propre contexte.

Une évaluation faite sans les moyens suffisants c’est aussi obliger le Hcéres à fonctionner a minima en regroupant l’évaluation de plusieurs disciplines avec des comités réduits où les évaluateurs ne représenteront pas toutes les sensibilités, sans parler de rivalités ou de mépris entre certaines d’entre elles. La légitimité de l’évaluateur par l’évalué est essentielle pour une réelle acceptation du dispositif. Le procès en non-indépendance de l’évaluation est régulièrement mis en avant.

Une question illustre bien ces inquiétudes : le débat entre une recherche purement théorique avec un impact faible ou nul sur le milieu qu’elle est censée étudier, et une recherche à forte influence sur les étudiants et les organisations.

Souvent, les dispositifs d’évaluation ne prennent en compte que la première et si possible publiée dans des revues anglo-saxonnes. Les listes de revues semblent être construites comme si tout le monde avait la capacité à devenir le champion d’Europe ou du monde, oubliant en cela ce qui est important pour les territoires où sont implantées les universités. Sur un critère aussi central, il n’y a déjà pas de consensus minimum sur l’intérêt équivalent de reconnaitre ces deux orientations possibles de la stratégie de recherche.

L’impact de l’évaluation sur les moyens et les carrières

S’agissant de ce qui sera fait de l’évaluation, les acteurs concernés doivent clairement savoir quelles seront les conséquences en termes de moyens alloués ou sur les carrières des personnels. Ce lien est peu ou pas fait par les établissements. Certains sont clairement sous dotés par rapport à d’autres, et le nombre d’étudiants n’est pas la bonne clé de lecture. Les établissements capables d’accéder à des ressources propres craignent de se voir privés de ressources publiques pour ce motif.

Les résultats d’une évaluation indépendante doivent pouvoir être reliés à des décisions en termes de dotation en moyens humains ou financiers associés à la réalisation d’objectifs clairs et partagés. Ce sont les principes fondamentaux de toute évaluation.

Sinon, le règne de l’arbitraire, de l’influence et de ce que l’on appelle pudiquement les réseaux se renforcera et avec lui le rejet de toute forme d’évaluation. Autant d’écueils propres à notre société et qui rendent difficile l’acceptation de ces dispositifs au-delà même des outils qu’il utilise.

Pour construire un modèle d’enseignement supérieur en accord avec nos principes

Le modèle anglo-saxon d’enseignement supérieur est cohérent au regard des valeurs, des croyances, des principes portés par les pays d’où il a émergé. La culture de la performance, la prise de risque, le don et la solidarité y ont un sens bien différent de ce que nous connaissons chez nous. Ils ne sont absolument pas critiquables en eux-mêmes. Mais si nous voulons aller vers ce modèle, il faut tout importer et évoluer sur nos principes fondamentaux de société.

Des programmes électoraux inscrits dans la continuité de 2007 »

Plaquer des recettes à l’anglo-saxonne ou des principes venant d’entreprises privées, tels quels, sur une base sociale non préparée et inadaptée ne fait qu’empirer la situation et accroit la tension des acteurs et entre les acteurs.

C’est pourtant la logique dominante des programmes électoraux qui s’inscrivent pour la plupart d’entre eux dans la continuité de 2007, pétris d’injonctions contradictoires comme rechercher l’excellence en accueillant tous les étudiants d’une génération ou en faisant avec dix fois moins de moyens dans certains domaines par rapport aux compétiteurs privés ou internationaux.

Comme alternative à ce modèle à l’anglo-saxonne et les tensions qu’il continuera à produire, il s’agit de construire un modèle d’enseignement supérieur en accord avec nos principes avec des objectifs clairs et des ambitions de performance diversifiées, prenant en compte notre intégration européenne, et sortant des revendications syndicales stériles n’ayant d’autres ambitions que de se servir de l’université pour affronter le pouvoir en place. Là se situent le vrai débat et le choix stratégique.

Déjà que l’enseignement supérieur n’est jamais un sujet phare de campagne, l’actualité n’a pas permis à aucun des candidats et à leurs spécialistes de l’enseignement supérieur, de poser cette question clé qui doit être clarifiée pour juger de la cohérence des quelques propositions opérationnelles que nous avons pu entrevoir.

Éric Lamarque


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Parcours

IAE France
Président
Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche
Président section gestion du CNU
Université Montesquieu Bordeaux 4
Professeur
Secor Europe
Consultant associé

Fiche n° 16110, créée le 18/02/2016 à 15:18 - MàJ le 04/07/2024 à 14:55


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©  J.Lortic
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