VSS : 30 % des étudiants en médecine victimes de harcèlement en stage, à 90 % par un supérieur (Anemf)
• 39 % des étudiants en médecine indiquent avoir reçu des remarques sexistes au cours de leur formation hospitalière dans le cadre de leurs stages ;
• 30 % disent avoir été victimes de harcèlement sexuel;
• plus de 5 % déclarent avoir subi une agression sexuelle, parmi lesquels 182 femmes (6 %) et 35 hommes (3 %), pour deux étudiants et une étudiante il s’agissait d’un viol.
Tels sont quelques-uns des résultats de l’enquête réalisée par l’Anemf
Association nationale des étudiants en médecine de France
entre le 08/03 et le 30/04/2020 à laquelle près de 4 500 étudiants et étudiantes en médecine ont répondu. Elle a été dévoilée le 18/03/2021, sa parution ayant été retardée du fait de la crise sanitaire.
Des résultats que l’association qualifie d’alarmants. « Nous aurions préféré ne jamais avoir à publier cette enquête. Nous aurions préféré ne jamais avoir à lire les centaines de commentaires et témoignages accablants reçus. Nous aurions préféré ne jamais ressentir cette colère et cette honte à l’égard du milieu dans lequel, nous, étudiants en médecine, évoluons au cours de nos études », indique-t-elle, appelant à « briser l’omerta ».
L’enquête montre par ailleurs que les harcèlements sont majoritairement le fait de supérieurs hiérarchiques (PU-PH
Professeur des universités - praticien hospitalier
, PH
Praticien hospitalier
, chef et clinique assistant, interne, chef de service), dans 89,8 % des cas. Quant aux agressions, « les médecins du service seraient incriminés dans 1 cas sur 2 », et « le chef de service et l’interne semblent également majoritairement impliqués. »
L’Anemf formule plusieurs propositions, dont des temps de sensibilisation des encadrants hospitaliers, des maîtres de stages et de tous les professionnels hospitaliers. Par ailleurs, en cas de signalement de VSS
Violences sexuelles et sexistes
, l’Anemf souhaite que l’étudiant ou étudiante victime « soit immédiatement extrait de stage et réaffecté dans un autre service ».
Des faits rarement signalés, le sentiment « que ça ne sert à rien » ou la peur de conséquences négatives
L’enquête de l'Anemf Association nationale des étudiants en médecine de France montre que peu d’étudiants ou étudiantes qui se déclarent victimes de VSS Violences sexuelles et sexistes en parlent autour d’eux ou font un signalement :
- Concernant les remarques sexistes, 15,3 % des étudiants concernés ont rapporté ce comportement à une personne tierce : 16 % des femmes et 8,4 % des hommes.
- Seuls 10 % des étudiants ayant subi un harcèlement sexuel l’ont signalé, et 98 % des signalements provenaient des femmes.
- Dans le cas d’une agression, environ 22 % d’étudiants déclarent effectuer des signalements.
Dans les trois cas, une majorité d’étudiants ne signalant pas ces événements considèrent que cela « ne sert à rien ». Les autres raisons sont le fait de ne pas avoir envie de signaler, ne pas savoir à qui s’adresser, mais aussi « la peur des retombées négatives que cela pourrait avoir, tant sur leur avenir universitaire et la validation de leur stage, que sur les conséquences pour leur future carrière professionnelle ».
Cette dernière raison concerne 3 étudiants sur 10 dans le cas de harcèlement et un tiers pour une agression.
À qui se confient les victimes de VSS ?
Dans le cas du harcèlement, quand une victime se confie, dans huit cas sur dix, c’est auprès d’un proche, ensuite dans un cas sur quatre à un interne, environ 9 % aux élus étudiants, soit à des personnes proches en âge de l’étudiant ou de l’étudiante. Les logiciels de signalement tels que « Gelules » sont aussi utilisés par près de 1 étudiant sur 10.
En revanche, c’est moins de 1 % au doyen, à l’administration hospitalière ou encore aux forces de l’ordre, et aucun aux cellules juridiques de l’université, étant pourtant les entités ou personnes ayant les pouvoirs d’amorcer des poursuites judiciaires ou des mesures disciplinaires à l’encontre du harceleur.
Quant aux étudiants qui ont signalé une agression, « ils semblent avoir tendance à se tourner préférentiellement vers des personnes connues : leurs proches en très grande majorité (pour près de 6 cas sur 10), mais également vers des personnes qu’ils peuvent côtoyer au quotidien en stage : les internes (30 %), les médecins du service (20 %), le personnel paramédical (13 %). »
Connaissance de violences sexistes et sexuelles chez les autres étudiants
En plus des étudiants qui se déclarent comme avoir vécu personnellement une situation de VSS, « une grande majorité d’étudiants connaissent des situations de violences sexistes et sexuelles ayant eu lieu sur les lieux de stage, à l’hôpital », note l’Anemf.
- C’est 2 étudiants en médecine sur 3 qui affirment connaître au moins une personne en situation de harcèlement dû à des remarques sexistes. Et parmi ces étudiants, plus d’un tiers a été témoin de ces situations.
- Plus de 1 étudiant en médecine sur 4 qui dit connaître au moins une personne en situation de harcèlement dû à des remarques sur sa vie sexuelle sur son lieu d’apprentissage professionnel. Et 28 % qui a été témoin direct de ces situations.
- Pour ce qui est des agressions sexuelles, 1 étudiant sur 10 connaît au moins une personne ayant été agressée, et en a été témoin dans près de 15 % des cas.
Sensibilisation, accompagnement, sanction : les propositions de l’Anemf
L’Anemf formule plusieurs propositions afin de lutter contre les VSS, notamment par la sensibilisation et la formation des étudiants, enseignants, encadrants, etc., et une meilleure communication des dispositifs de signalement.
Elle appelle aussi à la nomination d’une personne ressource parmi le personnel administratif de la faculté et d’une parmi les élus étudiants, dédiées à l’accompagnement des victimes dans les démarches qu’elles souhaitent mettre en place.
Pour ce qui est du milieu professionnel hospitalier, elle souhaite l’organisation de temps de sensibilisation obligatoires, destinés :
- Aux encadrants hospitaliers en stage pour tout service accueillant des étudiants en médecine : cette sensibilisation portera sur les droits des étudiants et sur les VSS, sera organisée a minima une fois par an, et pourra être réalisée par le directeur général ou un de ses représentants ou le président de CME Commission médicale d’établissement ou un de ses représentants et le responsable des stages à l’UFR Unité de formation et de recherche ou la personne-ressource chargée de l’accompagnement des victimes à l’UFR.
- Aux maîtres de stages universitaires accueillant des étudiants en médecine, là aussi a minima une fois par an, et réalisée par le responsable des stages à l’UFR ou la personne-ressource chargée de l’accompagnement des victimes à l’UFR.
- À l’ensemble du personnel soignant, aux VSS, tous les ans.
En cas de signalement de VSS, l’Anemf se positionne pour que les auteurs présumés soient auditionnés sans délai.
« Selon la gravité, des sanctions seront prises par le doyen de l’UFR responsable de la délivrance de l’agrément de stage. Les responsables des CHU ou CH devront être avertis des faits reprochés aux responsables », indique-t-elle.
Et si les signalements et actions à ces niveaux (UFR et CHU Centre hospitalier universitaire ) ne permettent pas de régler la situation, l’Anemf se positionne pour permettre la saisine de l’ARS Agence régionale de santé et de l’Ordre régional des médecins par les élus locaux, après accord de la ou des victimes.
L’association souhaite aussi l’instauration « de sanctions financières à l’encontre de l’établissement hospitalier s’il est avéré a posteriori que plusieurs signalements avaient été ignorés ou n’avaient pas permis de changer la situation. »
Association Nationale des Étudiants en Médecine de France (ANEMF)
Catégorie : Associations, réseaux
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Fiche n° 5420, créée le 07/08/2017 à 10:56 - MàJ le 29/04/2024 à 17:14
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