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ANR : le projet de LPPR octroie un budget accru de 1 Md€ à l’Agence, les autres changements prévus

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Actualité n°185252 - Publié le 10/06/2020 à 12:20
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Le siège de l’ANR à Paris - ©  D.R.

« Accroître d'1 Md€ les financements compétitifs de l’Agence nationale de la recherche pour être au niveau des standards internationaux. » Tel est l’objectif visé pour l’ANR Agence nationale de la recherche selon le rapport annexé au « Projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche pour les années 2021 à 2030 » qui sera présenté par le gouvernement aux membres élus et personnalités qualifiées membres du Cneser Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche le 12/06/2020 et dont News Tank a obtenu copie le 07/06.

Ce rapport précise qu'« en complément des financements “de base” des laboratoires, dont les montants seront augmentés de 10 % d’ici à 2022, le financement par appels à projets est un outil majeur et l’ANR sera l’opérateur principal sur lequel s’appuyer efficacement pour développer ces financements ».

La hausse du taux de succès « est indispensable pour soutenir la recherche et l’innovation de qualité, en particulier les projets les plus risqués et originaux. Le taux de succès “cible” se situe à 30 %, ce qui nécessite une augmentation substantielle des moyens de l’ANR ».

Par ailleurs, pour chaque AAP Appel à projets de l’ANR, le PdL Projet de loi prévoit un abondement financier réparti entre les établissements hébergeurs et ceux employant les personnels ayant déposé le projet. Un taux de préciput cible fixé à 40 % « permettra ainsi d’associer le financement sur projet et le financement de base des laboratoires » et de « couvrir réellement les coûts d’environnement tout en donnant aux laboratoires et aux établissements une capacité supplémentaire pour mettre en œuvre leur politique scientifique, et financer des actions dans le cadre de leurs priorités ».

Le rapport annexe indique aussi que, dans l’optique d’une « harmonisation indispensable » des pratiques entre les différentes agences de financement, un « portail unique » présentant l’ensemble des appels à projets sera mis en place. Objectif : rapprocher « le mieux possible » les formats des dossiers, les modalités de leur traitement, les règles de suivi des projets, voire les calendriers des différents guichets de financement.

En particulier, dans le domaine de la santé, ce travail sera accompagné d’un rapprochement des modalités de gestion scientifique et financière des projets de recherche financés dans le cadre des agences et programmes nationaux, notamment pour « faciliter l’accompagnement de projets alliant recherche translationnelle et recherche clinique ». Le pilotage de ce rapprochement sera réalisé conjointement par le Mesri Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et le MSS Ministère des solidarités et de la santé .

Enfin, l’élaboration de la programmation annuelle des appels à projets de l’ANR fera l’objet d’un travail interministériel « renforcé », animé par le Mesri et articulé avec les travaux auxquels participent les alliances de recherche.


Budget alloué à l’Agence nationale de la recherche

Selon l’article 2 du PdL Projet de loi , les financements de projets de recherche attribués par l’Agence nationale de la recherche bénéficieront d’un niveau d’engagement évoluant comme suit, (en M€ courants, en écart à la loi de finances initiale 2020) :

Evolution prévue des financements de projets de recherche attribués par l’ANR de 2021 à 2030 

Hausse des crédits de l’ANR par rapport à la LFI 2020, pour le financements des projets de recherche, de 2021 à 2030. Trajectoire prévue par le projet de LPPR de juillet 2020.
Source(s) : Projet de LPPR déposé par le Gouvernement le 22/07/2020

Le périmètre concerné

Le périmètre de cette programmation des autorisations d’engagement de l’ANR Agence nationale de la recherche inclut « toutes ses formes d’intervention en soutien à des projets de recherche, qu’il s’agisse des appels à projets, des programmes spécifiques comme les chaires industrielles ou les “Labcom”, ou encore des financements de recherches sur le cancer en relation avec l’Institut national du cancer », précise le rapport annexé au PdL.

Ce périmètre intègre également le financement de l’environnement des chaires de professeur junior. Ne sont exclues de ce périmètre que les interventions de l’ANR dans le cadre des programmes d’investissement d’avenir et du programme de financement des instituts Carnot, « qui s’adresse à une cible limitée de bénéficiaires ».

Un « accroissement de 150 % »

Toujours selon ce rapport, cette programmation traduit un effort budgétaire « très important » pour porter l’ANR « au niveau des standards internationaux ». À périmètre constant, les moyens d’intervention de l’Agence « augmenteront d’1 Md€ en autorisation de paiements à l’horizon 2027 (et d’1 Md€ environ à l’horizon 2030 en crédits de paiement), ce qui représente un accroissement de 150 % par rapport à 2020 ».

Des actualisations prévues

« La présente programmation fera l’objet d’actualisations, dont l’une, mise en œuvre avant la fin de l’année 2023, aura notamment pour objet de consolider la trajectoire financière jusqu’en 2030. Ces actualisations permettront de vérifier la bonne adéquation entre les objectifs fixés dans la présente loi, les réalisations et les moyens consacrés », indique l’article 1 du PdL.

Financements non ciblés et abondements

L’article 11 du PdL stipule que « pour tout projet de recherche financé par l’Agence nationale de la recherche dans le cadre d’une procédure d’appel à projets, l’agence attribue un abondement financier.

Cet abondement est réparti entre les établissements participant au service public de la recherche qui sont parties prenantes au projet de recherche. La répartition inclut :

  • une part minimale attribuée aux établissements dans les locaux desquels est réalisé le projet;
  • et une part minimale attribuée aux établissements employeurs des personnels ayant déposé le projet.

Si les établissements qui sont parties prenantes au projet de recherche proposent d’un commun accord une répartition entre eux de l’abondement, l’agence applique cette répartition. Un décret pris sur proposition du ministre chargé de la recherche fixe les modalités d’application du présent article. »

L’article 11 du PdL permettra aux financements attribués via les appels à projets de l’Agence nationale de la recherche de « mieux contribuer au développement scientifique national », indique l’exposé des motifs du projet de loi. Il précise aussi que l’Agence doit allouer une certaine part de financements non ciblés, « ce qui est indispensable pour soutenir la créativité, l’émergence de nouvelles idées, et la prise de risque scientifique ».

Il indique que cet abondement financier qui revient aux parties prenantes du projet « pour soutenir les unités de recherche et renforcer la mise en œuvre des orientations de politique scientifique portées par les laboratoires et les établissements ».

Ce qui prévalait jusqu’ici en la matière

Cet article 11 du projet de loi remplace l’article L329-5 du code de la recherche qui prévoie que :

  • Une partie du montant des aides allouées par l’Agence nationale de la recherche dans le cadre des procédures d’appel d’offres revient à l’établissement public ou à la fondation reconnue d’utilité publique dans lequel le porteur du projet exerce ses fonctions.
  • Dans le cas d’un projet mené en commun par des chercheurs issus de plusieurs des établissements ou fondations susmentionnés ou par un chercheur issu de l’un de ces établissements ou fondations en partenariat avec une société commerciale, un groupement d’intérêt économique ou une entreprise publique, la part des aides allouées par l’agence revenant à chaque établissement ou à chaque fondation est calculée par référence à leur engagement financier dans le partenariat.

Taux de préciput cible fixé à 40 %

Selon le rapport annexé au PdL, un niveau de préciput [1] « sensiblement plus important est nécessaire pour induire un processus vertueux. Il permettra de couvrir réellement les coûts d’environnement tout en donnant aux laboratoires et aux établissements une capacité supplémentaire pour mettre en œuvre leur politique scientifique, et financer des actions dans le cadre de leurs priorités :

  • soutien à l’écosystème local;
  • politique d’attractivité et d’émergence ;
  • financement d’équipements scientifiques ;
  • ou encore de personnels de soutien, etc. »

« Un taux de préciput cible fixé à 40 % répond à ces enjeux et permettra ainsi d’associer le financement sur projet et le financement de base des laboratoires ».

Les autres changements opérés

Positionnement de l’ANR

Selon le rapport annexe au PdL, l’agence continuera à consacrer une part substantielle de ses moyens au soutien de projets de recherche non ciblés, « en veillant à adapter ses formes d’intervention aux besoins de tous les domaines de recherche, et à les articuler avec les programmes européens pour favoriser la participation des équipes françaises à ces derniers ».

« Elle poursuivra son soutien spécifique à des projets proposés par des jeunes chercheurs, ainsi qu’à des actions de recherche technologique et partenariale. Elle sera un outil central pour contribuer à l’ouverture de la science vers la société, et pour contribuer à accroître l’apport de la recherche à l’ensemble des politiques publiques portées par l’État et les collectivités territoriales ».

Mieux prendre en compte la diversité des besoins

Cette augmentation des moyens de l’ANR doit également se traduire par « une meilleure prise en compte de la diversité des besoins des disciplines et des projets de recherche. Il est impératif que ses modes d’intervention permettent de financer effectivement les bons projets, qu’ils s’inscrivent dans des démarches connues ou qu’ils soient disruptifs, dans tous les domaines scientifiques et de façon adaptée aux besoins de chacun ».

Ceci « peut impliquer notamment une variabilité dans les montants alloués aux projets afin de mieux prendre en compte les projets peu coûteux comme ceux qui nécessitent des financements élevés. Par ailleurs, la durée des projets de l’ANR doit effectivement permettre de se concentrer sur le projet de recherche pendant plusieurs années, afin d’éviter de multiplier les dépôts de projets ». 

350 k€ sur trois ans : « insuffisant » pour les projets « les plus ambitieux »

Aujourd’hui, le niveau moyen de financement d’un projet multiéquipes sélectionné par l’ANR est proche de 350 k€ sur trois ans.

« Ce niveau est insuffisant pour bien soutenir les projets les plus ambitieux et impose aux chercheurs de multiplier les dossiers de demandes, au détriment du temps consacré à la recherche. Un accroissement de la durée des financements, et donc de leurs montants moyens, tout en conservant des formes d’appels à projets adaptées à chaque domaine de recherche, permettra de se rapprocher des standards internationaux et de mieux couvrir les besoins des laboratoires sur la durée. »

Un constat « alarmant »

L’exposé des motifs du projet de loi pointe un signe « alarmant : entre 2010 et 2015, les crédits de l’ANR ont diminué de 38 % et le taux de succès aux appels à projets a diminué de 21,3 % à 11,5 %, au point que toutes les équipes de recherche ont parfois des difficultés à financer leurs travaux malgré l’accroissement des budgets d’intervention de l’ANR engagé par le gouvernement depuis 2017.

En outre, les moyens alloués à la recherche ne sont pas attribués de façon optimale et les outils de financement ne sont pas adaptés aux attentes de toutes les disciplines, plus particulièrement dans le champ des sciences humaines et sociales. »

0,022 % du PIB pour les projets ANR

Selon le rapport annexé au PdL, les comparaisons internationales montrent que les moyens actuels de l’ANR sont « très insuffisants ».

« En 2018, l’ANR a consacré 518 M€ aux appels à projets de recherche, soit un peu plus de 0,022 % du PIB Produit intérieur brut . Le standard pour les agences équivalentes est proche de trois à quatre fois ce chiffre : 0,08 % du PIB pour la DFG Deutsche Forschungsgemeinschaft en Allemagne et le FNS en Suisse, 0,07 % du PIB pour la NWO The Dutch Research Council aux Pays-Bas. Même en montants absolus, le niveau d’engagement de l’ANR en France est actuellement inférieur à celui de la Suisse ou des Pays-Bas. »

Dans une lettre  adressée à la ministre de l’Esri le 05/06/2020, 28 sociétés savantes écrivent qu’une augmentation du budget de l’ANR n’aura « aucun effet sur les trois problèmes essentiels dont souffrent les laboratoires aujourd’hui (…) : le manque de personnel permanent, de crédits récurrents et de visibilité à moyen et long terme de leur stratégie de recherche ».

Selon elles, l’objectif d’augmenter le taux de succès des appels d’offres ANR est « louable mais il ne doit pas être atteint par la seule augmentation mécanique du budget de l’ANR qui par nature ne poursuit pas une politique scientifique sur le long terme, à dix ans ou plus ». 

Et d’ajouter qu’une répartition plus stratégique des ressources supplémentaires permettrait d’augmenter ce taux de succès en baissant le nombre de projets soumis, « puisque nombre d’entre eux s’inscriraient alors dans les politiques scientifiques financées par les grands organismes nationaux et les universités ».

Agence nationale de la recherche (ANR)

Etablissement chargé de la mise en œuvre du financement de la recherche sur projets en France.

Catégorie : Établissements publics


Adresse du siège

86 rue Regnault
75013 Paris France


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Fiche n° 1937, créée le 05/05/2014 à 12:26 - MàJ le 07/11/2024 à 15:05


[1] Part du financement qui revient non pas au porteur du projet mais aux établissements qui y participent. Il représente un complément de financement important pour ces établissements, permettant notamment de couvrir les coûts indirects induits par le projet.

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