LPPR : 25 Md€ d’ici 2030 dont 104 M€ pour 2021; détail des trois programmes de la Mires impactés
Une hausse des moyens alloués à la recherche de 23,776 Md€ sur la période 2021-2030, dont +104 M€ pour l’année 2021. Tels sont les deux principaux chiffres à retenir du titre 1er du « Projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche pour les années 2021 à 2030 » qui sera présenté par le gouvernement aux membres élus et personnalités qualifiées membres du Cneser
Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche
le 12/06/2020 et dont News Tank a obtenu copie le 07/06.
Dans le détail, l’évolution cumulée des crédits de paiements, entre la loi de finances initiale 2020 et celle de 2030, des trois programmes de la Mires concernés par l’article 2 du projet de loi doit être de :
• +16,555 Md€ pour le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires »,
• -1,038 Md€ pour le 193 « Recherche spatiale », une baisse liée à « un effort particulier et conjoncturel en 2019 et encore plus en 2020, pour rembourser la dette que [la France] avait contractée au cours des années précédentes vis-à-vis de l’ESA
European space agency
» ;
• +8,259 Md€ pour le 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » (hors contribution du titre 2 au compte d’affectation spéciale « pensions »).
L’objectif est de prévoir un « réinvestissement massif dans la recherche publique, dont l’effet de levier doit permettre d’aller vers l’objectif d’un effort national de recherche atteignant 3 % du PIB
Produit intérieur brut
» et « vient consolider les outils actuels de financement et de pilotage de la recherche avec un effort budgétaire supplémentaire de 25 Md€ pendant les dix prochaines années, ce qui est sans précédent depuis plusieurs décennies ».
La somme des crédits supplémentaires par année pour chaque programme tels qu’annoncés par le texte, et calculée par News Tank, montre toutefois une différence de 1,33 Md€ par rapport aux 25 Md€ annoncés. Interrogée sur ce point le 08/06, Frédérique Vidal
Conseillère spéciale du président @ European Foundation for Management Development (EFMD)
indique : « les marches qui sont prévues aboutissent bien à 25 Md€, mais de la même façon qu’il va y avoir extinction de la dette de l’ESA cette année, il y a aura extinction d’autres dettes au fur et à mesure de la programmation budgétaire telle qu’elle a été faite ».
« Le président de la République a fixé un cap, qui porterait enfin l’effort de recherche de la nation à 3 % de notre PIB
Produit intérieur brut
», indique le rapport annexé au projet de loi, ajoutant que : « les difficultés économiques que nous traversons à la suite de la crise sanitaire rendent d’autant plus important un réinvestissement massif dans la recherche pour éviter qu’elles ne se traduisent par une forte baisse des budgets de R&D
Recherche et développement
qui obérerait durablement notre avenir ».
L’analyse des budgets alloués à l’ANR
Agence nationale de la recherche
et des mesures liées à son fonctionnement feront l’objet d’un prochain article de News Tank dédié à ce sujet.
La ventilation globale sur 2021-2030
Selon l’article 2 du projet de loi, les crédits supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale 2020 pour les programmes « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » (P172), « Recherche spatiale » (P193) et « Formations supérieures et recherche universitaire » (P150 hors contribution du titre 2 au compte d’affectation spéciale « pensions ») évolueront entre 2021 et 2030, à périmètre constant, comme suit (les colonnes 2023 à 2026 sont masquées par défaut) :
« Revalorisation de tous les métiers »
« L’ensemble des moyens ainsi programmés doit permettre une revalorisation significative de tous les métiers scientifiques, qu’il s’agisse des enseignants-chercheurs, des chercheurs, des ingénieurs, des administratifs, des bibliothécaires ou des techniciens », indique l’exposé des motifs du projet de loi.
« Cette revalorisation a vocation à porter de façon prioritaire sur les débuts de carrières des enseignants-chercheurs et des chercheurs, où apparaît le différentiel le plus net, tant avec les salaires de chercheurs observés dans d’autres grands pays scientifiques qu’avec les autres métiers publics ou privés auxquels peuvent aspirer les jeunes docteurs ».
Évolution des effectifs
Selon le rapport annexé au PdL Projet de loi , l’incidence de la LPPR Loi de programmation pluriannuelle de la recherche sur les effectifs sous plafond de l’État et des opérateurs des trois programmes budgétaires 150,172 et 193 est le suivant :
92 M€ de revalorisation indemnitaire dès 2021 confirmés
Pour faciliter les mobilités entre universités et organismes, l’objectif sera de faire converger les montants moyens de primes entre les différents types de personnels « afin de remédier à [d]es disparités historiques, mais peu justifiées aujourd’hui », indique le rapport annexe. « À cette fin, dès l’année 2021, 92 M€ supplémentaires y seront consacrés ainsi que des montants analogues les années suivantes dans le cadre de la programmation pluriannuelle de la recherche. »
Dotation de démarrage de 10 k€
Toujours selon le rapport annexé au projet de loi « tous les nouveaux recrutés comme chargés de recherche et maîtres de conférences se verront allouer une dotation de démarrage pour lancer leurs travaux ».
« Nous maintenons les modes de recrutement traditionnels des maîtres de conférences, chargés de recherche, concours d’agrégation et l’on y ajoute la possibilité pour tous les jeunes recrutés de bénéficier d’une prime à l’entrée de 10 k€ pour démarrer leurs recherches, sans avoir à chercher de financements », précise Frédérique Vidal, ministre de l’Esri, le 08/06/2020.
Trajectoire des crédits de paiement des programmes 172 (+16,555 Md€ sur dix ans)
Le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » est donc le principal bénéficiaire de l’effort budgétaire inscrit dans l’article 2 de la loi de programmation :
Selon le rapport annexé au PdL, cette augmentation des crédits du programme 172 bénéficiera non seulement aux organismes nationaux, dont les subventions pour charges de service public sont intégrées dans ce programme, mais aussi aux universités et aux écoles « puisque la hausse des crédits de ce programme inclut notamment le fort accroissement du budget d’intervention de l’ANR Agence nationale de la recherche et l’augmentation des financements en faveur de l’innovation, qui concernent l’ensemble des établissements de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ».
Trajectoire des CP du programme 150 (+8,259 Md€ sur dix ans)
Si la programmation budgétaire inscrite à l’article 2 de la LPPR inclut la totalité des crédits inscrits aux programmes 172 et 193, « elle ne concerne, pour le programme 150 “Formations supérieures et recherche universitaire”, que les incidences budgétaires des mesures de la présente loi sur ce programme ».
Il s’agit des crédits qui financeront, dans les établissements d’enseignement supérieur sous tutelle du Mesri Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation :
- les revalorisations indemnitaires destinées aux personnels des établissements d’enseignement supérieur financés par le programme 150;
- les divers dispositifs relatifs à la valorisation ou au recrutement d’enseignants-chercheurs : revalorisation de la rémunération des maîtres de conférences nouvellement recrutés, revalorisation du montant et accroissement du nombre des contrats doctoraux, environnement des « chaires de professeur junior », etc. ;
- l’attribution de moyens aux établissements d’enseignement supérieur dans le cadre du dialogue contractuel et du dialogue stratégique et de gestion.
« Ceci signifie notamment que les mesures budgétaires inscrites à l’article 2 de la LPPR n’incluent pas les moyens des universités dont les évolutions sont affectées par la démographie étudiante : ces moyens ne sont pas programmés dans le cadre de la LPPR, et leur évolution sera examinée chaque année dans le cadre du projet de loi de finances ».
Trajectoire des CP du programme 193 (-1,038 Md€ sur dix ans)
Si sur le programme 193 « Recherche spatiale », la programmation budgétaire inscrite à l’article 2, en écart à la loi de finances 2020, « peut apparaître en retrait, la réalité est bien celle d’un accroissement structurel de l’investissement dans ce domaine », indique le rapport annexé au PdL.
« La France a réalisé un effort particulier et conjoncturel en 2019 et encore plus en 2020, pour rembourser la dette qu’elle avait contractée au cours des années précédentes vis-à-vis de l’Agence spatiale européenne, si bien que le montant budgétaire 2020 des crédits de ce programme est un point historiquement haut qui n’est pas réellement significatif.
Le graphique suivant montre que, si l’on met à part les années 2019 et 2020, les crédits de ce programme sont en croissance régulière sur la période 2017-2030 ce qui témoigne de l’effort structurel de l’État pour la recherche spatiale dans la durée ».
Des moyens complémentaires pour les laboratoires
En complément des moyens budgétaires dont les évolutions sont fixées à l’article 2 de la LPPR, « les laboratoires bénéficieront également d’autres accroissements de leurs ressources », indique encore le rapport annexé au PdL :
- « En particulier, les programmes d’investissement d’avenir continueront d’apporter un soutien aux écosystèmes de l’Esri. Le gouvernement prévoit que les prochains PIA Programme d’investissements d’avenir permettent de maintenir le niveau de financements additionnels attribués aux établissements de l’Esri. Ce nouveau PIA permettra notamment de financer des programmes prioritaires de recherche et de soutenir des actions ciblées de formation, de recherche et d’innovation liées aux axes prioritaires qui seront retenus pour répondre aux enjeux de transition de notre économie et de notre société.
- Les laboratoires publics bénéficieront aussi d’une augmentation sensible des financements européens, notamment dans le cadre du programme Horizon Europe et du fait des efforts de mobilisation accrus de l’ensemble des établissements de l’Esri pour accroître leur participation.
- Enfin, il est attendu que, outre l’accroissement important des financements attribués par l’ANR, les établissements publics de l’Esri continueront à augmenter leurs autres ressources propres mobilisées pour financer des travaux de recherche, provenant notamment des entreprises, des collectivités territoriales, ou de tout autre financeur français ou étranger ».
Concernant ce dernier point, le projet de LPPR prévoit un effort budgétaire cumulé de 7,03 Md€ sur 2021-2030, dont 149 M€ en 2021 et 293 M€ en 2022. L’analyse détaillée de l’évolution du budget alloué à l’ANR via le projet de LPPR fera l’objet d’un article de News Tank dédié.
Atteindre 3 % du PIB pour la recherche
À l’article 1 du PdL est approuvé « le rapport annexé à la présente loi, qui fixe les orientations relatives à la politique de recherche et les moyens qui lui sont consacrés au cours de la période 2021-2030 en prenant en compte l’objectif de porter les dépenses intérieures de recherche et développement des administrations et des entreprises à 3 % du produit intérieur brut au cours de la décennie suivante ».
Selon le rapport annexé au projet de loi, « les grands espoirs que nous plaçons en la recherche et notre volonté de porter une loi ambitieuse s’inscrivent dans un contexte où l’effort de recherche global — public et privé — mesuré par le ratio entre les dépenses intérieures de R&D et le PIB Produit intérieur brut :
- avoisine 2,2 % en France ;
- et régresse légèrement depuis plusieurs années : 2,28 % en 2014, 2,23 % en 2015, 2,22 % en 2016, 2,19 % estimés en 2017.
Cette trajectoire éloigne la France de « l’objectif de Lisbonne », fixé à 3 %. En valeur relative, la Dird Dépense intérieure en recherche et développement des entreprises française est supérieure à la moyenne de l’UE28, mais inférieure à la moyenne de l’OCDE Organisation de coopération et de développement économiques (2,37 %).
« L’écart entre la France et les pays les plus ambitieux en matière de R&D s’accroît : en Allemagne, l’objectif de 3 % est désormais atteint et le gouvernement a fixé une nouvelle cible à 3,5 %. Au Japon, le niveau actuel est à 3,2 % et la cible à 4,0 % ; en Corée du Sud, la Dird représente 4,5 % du PIB et la cible est à 5,0 % ».
Un « déficit chronique d’investissement »
Selon l’exposé des motifs du PdL, ce « déficit chronique d’investissement fragilise l’ensemble de notre système de recherche et a des répercussions immédiates sur les chercheurs et les enseignants-chercheurs en France : la rémunération en début de carrière des scientifiques, recrutés à partir de 1,4 Smic à l’âge moyen de 33 ou 34 ans, est inférieure de 37 % à la moyenne des pays de l’OCDE.
Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que les carrières scientifiques attirent de moins en moins les étudiants de sorte qu’en un peu moins de 20 ans, le nombre d’admissions en cycle doctoral est passé de près de 20 000 à 17 000 aujourd’hui ».
Impact sur la Dirde
Selon le rapport annexé au PdL, la LPPR « entraînera cependant une hausse de la Dirde Dépense intérieure en recherche et développement , car elle fait du développement de l’innovation et de l’accroissement des relations des laboratoires publics avec les entreprises une priorité majeure, et porte de nombreuses actions en ce sens.
Qu’il s’agisse de :
- celles qui concernent les doctorants — notamment ceux qui préparent leurs thèses dans le cadre d’une entreprise — et leur insertion dans les entreprises ;
- des mesures en faveur de la création et de la croissance des start-up, notamment les start-up de haute technologie ;
- de l’amélioration du transfert vers les entreprises des connaissances et des technologies ;
- du renforcement de la recherche partenariale et de la mobilité entre la recherche publique et la R&D privée ;
- de la mobilisation des acteurs français, publics et privés, dans les programmes de recherche et d’innovation européens ;
- ou, sur le moyen et long terme, indirectement, de l’accroissement de l’attractivité et du rayonnement de la recherche publique française : toutes ces actions, articulées avec celles qui seront menées dans le cadre du Pacte productif, des programmes d’investissement d’avenir et par Bpifrance, contribueront à l’accroissement de la Dirde ».
CIR : un outil « central »
Selon le rapport annexé au PdL, « cet effort est particulièrement bienvenu dans le contexte actuel de sortie progressive de crise sanitaire. En effet, la mauvaise conjoncture économique à venir dans les prochains mois pourrait se traduire par une baisse significative du financement privé de la R&D ce qui fragiliserait pour les prochaines années notre potentiel de croissance économique.
Au-delà des mesures déjà citées, le CIR Crédit Impôt Recherche (crédit impôt recherche) constituera pendant cette période un outil central de soutien à la Dirde. La dépense fiscale sera amenée à croître afin d’accompagner le réinvestissement des entreprises dans la recherche aussi bien que l’emploi des jeunes chercheurs dans le secteur marchand afin de contribuer à la reprise de l’activité économique ».