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Intégrité : invité à l’EHESS, le biologiste O. Voinnet retrace son affaire et réitère ses « excuses »

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Actualité n°138533 - Publié le 29/01/2019 à 10:23
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Le siège de l’EHESS et de l’EPHE, boulevard Raspail - ©  EPHE

• Informer les institutions et les éditeurs.
• Préserver les données expérimentales originales.
• Ne pas répondre aux allégations une par une mais vérifier scrupuleusement l’ensemble des papiers incriminés en étant exhaustif.
• Préserver les personnes n’ayant pas commis de fautes mais qui sont impliquées dans les rétractations d’articles.
• Garder le silence durant l’investigation.

Tels sont les cinq « devoirs » d’un chercheur s’il est la cible d’allégations remettant en cause ses travaux scientifiques, énumère Olivier Voinnet Directeur de recherche de première classe @ CNRS • Professeur dans le Groupe de biologie des ARN du département de biologie @ École polytechnique fédérale de Zurich (ETH Zurich)
Science Magazine…
, directeur de recherche CNRS Centre national de la recherche scientifique détaché à l’ETH Eidgenössische Technische Hochschule - École polytechnique fédérale de Zurich. Il intervient à l’occasion d’une séance du séminaire « Politiques des sciences » consacrée à l’intégrité scientifique, et organisée à l’EHESS École des hautes études en sciences sociales le 17/01/2019.

Décrivant le cadre de l’intervention d’Olivier Voinnet, Johanna Siméant-Germanos, professeure de science politique et membre du comité d’intégrité scientifique de l’ENS, l’une des organisatrices du séminaire, explique : « Nous invitons des gens avec qui nous ne sommes pas forcément d’accord, qu’ils accompagnement ou organisent des transformations de la recherche qui ne nous semblent pas souhaitables, parce qu’il nous paraît important de les entendre, de comprendre de quelle vision du monde ils sont porteurs et comment ils font passer ces visions dans des politiques publiques ».

Le biologiste Olivier Voinnet retrace notamment comment il a vécu « l’affaire » le concernant, après avoir été suspendu pendant deux ans en juin 2015 puis sanctionné d’un blâme en octobre 2018 par le CNRS. « Je considère avoir eu une expérience extrême. Si cela doit servir, j’ai été témoin, ainsi que mon groupe, de choses sur lesquelles il faut faire en sorte qu’on progresse et qui selon moi ne devraient plus se reproduire dans des institutions comme le CNRS », expose-t-il.

Tout en affirmant « avoir toujours pris [s]es responsabilités » et défendant la qualité de sa science et de ses données expérimentales, Olivier Voinnet admet des « bêtises » concernant les figures de ses articles, dont il estime qu'« à peu près 20 % » sont de lui : « C’était dû à la rapidité et non pas à l’erreur. Je n’avais pas le temps, je montais mes figures n’importe comment et je m’en fichais totalement. Pourquoi ? Parce que ça ne m’intéressait pas d’aller rechercher des éléments que j’avais à droite et à gauche ».

« Je me suis publiquement excusé plusieurs fois en 2015, et je réitère aujourd’hui devant vous mes excuses », dit-il à l’auditoire d’une cinquantaine de personnes.

Enfin, Olivier Voinnet revient sur les échanges qu’il a eu avec son ancien collègue, Patrice Dunoyer, dans le cadre des investigations menées par leurs tutelles. « Cette personne doit être virée du CNRS », estime le chercheur, qui l’accuse, entre autres, d’avoir « falsifié ses cahiers de laboratoire ». Il annonce à ce sujet son intention de saisir Rémy Mosseri Référent intégrité @ Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
, le nouveau référent intégrité scientifique du CNRS depuis le 01/08/2018, présent dans la salle.


Les cinq « devoirs » du chercheur en cas d’investigation

« Lorsqu’on est mis en cause sur des sites anonymes comme Pubpeer, au regard de ce que j’ai vécu, j’estime qu’on doit avoir plusieurs devoirs », signale Olivier Voinnet, qui en énumère cinq.

Devoir d’information des institutions et éditeurs

Pour le biologiste, il faut « informer l’institution et les éditeurs, quelle que soit la nature des allégations, si toutefois celles-ci font sens ». « Le chef de laboratoire n’a cependant pas vocation à informer la presse ou à répondre aux attaques anonymes sur Pubpeer », prévient-il.

« Pubpeer demeure pour moi une entité non définie. C’est un lanceur d’alerte dont je ne remets pas en cause la validité : sans lui je n’aurais pas pu corriger ma science correctement, donc je ne peux pas crier sur Pubpeer comme beaucoup de gens le font. Dénonciations anonymes ou non, les fautes étaient bien là », détaille le chercheur à propos de Pubpeer.

Mais « encore faut-il être en capacité d’informer », juge-t-il.

« Dans la 2e phase de l’investigation du CNRS, j’ai demandé l’accès aux cahiers de laboratoire de mon collaborateur [Patrice Dunoyer] en août 2016, mais je les ai vus pour la première fois en décembre 2018. Pour des raisons totalement absurdes : observer ces cahiers remettrait en cause la bonne route de l’investigation en cours. Alors qu’en 2015, l’investigation de l’ETH Eidgenössische Technische Hochschule - École polytechnique fédérale avait été menée en même temps que les opérations de correction et j’avais eu à ce moment-là totalement accès à son cahier de laboratoire.

Cela a duré deux ans, ce qui signifie que pendant toute cette période la communauté scientifique n’était pas avertie que certains articles posaient problème ou que d’autres vont être rétractés. »

« Certains éditeurs n’ont pas voulu voir les erreurs, en particulier pour plusieurs papiers publiés dans un grand journal de génétique. Je suis allé voir l’éditeur pour lui montrer des erreurs visibles, en apportant les données brutes de mon étudiant à l’origine de ces erreurs. On m’a répondu qu’on avait “fait tourner les algorithmes de détection du journal” et que ces erreurs n’existaient pas ! », affirme Olivier Voinnet.

Devoir de préservation des données originales

Olivier Voinnet pointe également la nécessité de conserver les données originales, brutes, des expériences de son laboratoire.

« Quand les éditeurs veulent corriger une publication, la première chose qu’on va leur opposer c’est que les résultats ont été reproduits par d’autres. Mais ce n’est pas ce que veulent les éditeurs - je l’ai appris à mes dépends - qui cherchent à caractériser notre faute. Or c’est très dur humainement d’accepter qu’on a fait des bêtises. Alors comment prouver qu’on en a fait ou non ? La seule façon de faire, c’est d’amener nos données expérimentales originales. »

Dans son cas, il indique qu'« heureusement, ces données ont été préservées dans leur intégralité, ce qui est loin d’être le cas dans d’autres situations, avec des personnes pour lesquelles on va dire que le système a été pour le moins bienveillant quant à la perte de leurs données expérimentales ».

Tout en rappelant qu’au CNRS Centre national de la recherche scientifique , « ces données doivent être préservées pendant 25 ans, selon le texte de réglementation de référence », le chercheur s’interroge.

« Mise à part la polémique, il existe un problème : que fait-on lorsque la durée de rétention des données originales diffère selon les établissements, y compris étrangers, ayant contribué à leur production ? »

Devoir d’exhaustivité : vérifier l’ensemble des publications incriminées

« La situation qu’on a connue s’est apparentée à une avalanche. Il était très difficile, au début, de gérer tout en même temps et nous avons eu des nuits entières de panique totale à se faire vilipender sur les réseaux sociaux et Pubpeer », retrace Olivier Voinnet.

Dès lors, quel mode opératoire utiliser : répondre aux allégations une par une ? Ou bien reprendre « toutes les données de toutes les figures » des papiers incriminés ? Il indique avoir choisi la deuxième option, pour deux raisons :

  • « grâce à deux de ses étudiants » qui l’ont « ramené à la raison » en l’invitant à revoir l’intégralité des publications incriminées « pour voir s’il restait des fautes ». « Ces deux-là m’ont donné ma ligne directrice pour tout le reste de cette affaire, c’est à eux qu’il faut jeter des lauriers ».
  • du fait qu’ « il existe un jeu sur Pubpeer s’apparentant à une sorte de chasse », à travers lequel certaines personnes « vont volontairement ne pas poser toutes leurs allégations du premier coup et ainsi pousser un chercheur à produire une correction qui n’est pas complète ». « Et le jour même de la sortie de la correction chez l’éditeur, on le déstabilise à nouveau en balançant tout ce qu’on avait gardé en réserve (…). Cela nous est arrivé deux fois ».

Selon lui, cette méthode a permis que « les 20 corrections faites n’ont jamais été remises en question ».

Préserver ceux qui n’ont pas fait de fautes

« C’est peut-être le devoir le plus dur dans cette histoire, car les rétractions et les corrections sont avant tout un traumatisme humain pour tout le monde : les auteurs fautifs, ceux qui n’ont rien fait, les éditeurs… Évidemment, c’est dans ces moments-là que personne n’est là. C’est donc à nous, en tant que “chef”, de faire en sorte que les gens s’entendent », estime Olivier Voinnet.

« J’ai pris la décision d’être absolument intransigeant sur le fait qu’il faut préserver ceux qui n’ont pas fait de fautes mais qui sont mêlés à ces rétractions, car cela met en jeu des carrières. La seule façon de faire est de dire qui a fait quoi, et c’est ce que j’ai fait dans tous nos textes de rétractation, par respect pour ceux qui n’ont rien fait, mais aussi pour la communauté scientifique.

En produisant nos corrections ou rétractions, on produit tous les documents originaux et on décrit spécifiquement les fautes commises, y compris les fabrications, en essayant de ne pas employer des termes édulcorés comme “erreur” si c’est une “fabrication”. »

Olivier Voinnet souligne l’importance de corriger les travaux de ses étudiants afin de préserver leur carrière.

« On a dû faire une correction de la thèse de mon étudiant, qu’on a publiée sur le propre domaine de publication de l’ETH. Mais que ce serait-il passé si j’avais été dans une petite université qui ne possède pas cette capacité de publier ses propres documents ? Déposer dans BioRxiv [une archive de préprints en biologie] était loin d’être évident il y a trois ans.

Par ailleurs, cet étudiant vient d’être recruté dans un très grand institut de recherche de sciences végétales, le Gregor mendel institute. La première chose qu’a fait le comité de recrutement, ça a été de demander où étaient les corrections de son article mentionné sur Pubpeer. On m’a écrit, et j’ai pu leur fournir les corrections publiées par l’ETH. Sans cela, j’aurais condamné cet étudiant sans le savoir. »

Olivier Le Gall Président du Conseil français de l’intégrité scientifique @ Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres) • Chercheur @ Institut national de la recherche… , également présent parmi les intervenants, indique avoir eu une histoire similaire du temps où il était directeur général délégué aux affaires scientifiques de l’Inra.

Devoir de silence

« Pour la sérénité de l’investigation, la règle absolue est de se taire. Il y avait pourtant de nombreux moments où j’avais envie de parler quand je voyais ce qu’on disait sur nous », souligne le biologiste.

« J’ai été investigué trois fois : par l’UEA Université d’East Anglia (Université d’East Anglia), là où j’ai passé ma thèse, par le CNRS et l’ETH, d’une façon particulière, en 2015, puis de nouveau par le CNRS, en 2017-2018 en dépit des accords qu’ils avaient avec l’ETH. (…)

En 2015, j’aurais bien aimé parler avec certains journalistes, dont plusieurs m’ont contacté en me demandant pourquoi je ne pouvais pas m’exprimer. La raison était que statutairement, si je le faisais, j’étais viré de l’ETH. »

Assumer ses torts sans remettre en cause sa science

Olivier Voinnet « assume ses torts »…

« Je ne me suis jamais caché et j’ai toujours pris mes responsabilités dans ce sens. Je me suis publiquement excusé plusieurs fois en 2015, et je réitère aujourd’hui devant vous mes excuses », déclare-t-il.

« On n’est pas chef de groupe que pour avoir les médailles et boire du champagne quand on a des bons papiers, mais aussi pour assurer le service après-vente. »

Ainsi :

  • « Je reconnais totalement avoir failli dans ma seconde tâche de chef de groupe : j’ai manqué de vigilance, notamment dans la relecture des manuscrits de mon laboratoire, mais aussi de rigueur, lorsque j’ai eu à monter des figures.
  • Je gérais mal mon groupe : il était évident que je ne pouvais pas avoir 30 personnes en Suisse et 15 à Strasbourg, tout en faisant plein de voyages dans des commissions X ou Y, et pouvoir prétendre avoir la rigueur nécessaire pour m’occuper de l’intégrité scientifique des figures qu’on produisait - pas les résultats, j’insiste, mais la présentation des résultats. »

… sans remettre en cause la science qu’il a produite

Olivier Voinnet revient en revanche sur le blâme que lui a attribué le CNRS en 2018. « Cela n’indique en aucune façon que je prends la responsabilité de l’entièreté des fautes produites dans mon labo. Ces fautes ont été produites par tout un tas de personnes, moi y compris, mais ce n’est certainement pas ma responsabilité en tant que chef qui m’implique dans la réalisation de ces fautes. »

« Nos conclusions scientifiques n’ont jamais été remises en cause. Les investigations elles-mêmes ont toutes prouvé que les résultats de notre recherche étaient corrects et que celle-ci était menée et documentée de façon plus qu’adéquate », affirme-t-il également.

Conséquences de l'« affaire » pour son laboratoire

« J’ai immédiatement pris en compte tout cela en réduisant drastiquement la taille de mon laboratoire : je n’en ai plus qu’un, réduit des deux tiers ».

« Se porte-t-on plus mal et fait-on moins de belle science ? Non, rien n’a vraiment changé, j’ai compris que la quantité ne faisait pas la qualité d’un laboratoire. Je suis également beaucoup plus présent, n’étant plus invité aux meetings… »

Rappelant par ailleurs qu’il n’a « plus le droit à l’erreur » à l’ETH, il indique avoir « mis en place des mesures drastiques dans le laboratoire nous permettant d’éviter toute erreur : un énorme métafichier avec toutes nos données brutes est envoyé à l’éditeur et tout un système de contrôle en amont grâce à un cahier de laboratoire électronique nous permet de comparer nos figures avec ces données brutes. »

« On ne peut pas dire qu’on ne fera aucune erreur, mais si on en a fait une, l’éditeur peut la repérer en amont de la publication. Cela nous est déjà arrivé deux fois depuis, et nous avons tout de suite corrigé », note-t-il.

« Auriez-vous eu la même carrière sans ce qu’on vous a reproché ? », demande Emmanuel Didier, chargé de recherche EHESS, au biologiste.

« La réponse est oui. On aurait probablement été moins vite étant donné qu’on doit travailler beaucoup pour arriver aux standards que je me suis fixé mais qui sont bien au-delà d’un laboratoire standard. On a bien mérité ce que l’on fait mais on le fait. En revanche, ce n’est pas moi qui ai décidé que j’étais une star, ce sont des gens qui m’ont starifié et ce sont les mêmes qui m’ont déstarifié ensuite.

Aurais-je eu une carrière aussi fulgurante ? Probablement non. Est-ce que cela aurait fondamentalement changé nos découvertes scientifiques ? Non », lui répond Olivier Voinnet.

Ses accusations contre Patrice Dunoyer, son ex-collègue

Olivier Voinnet revient sur les échanges qu’il a eus avec son ancien collègue, Patrice Dunoyer, au moment où les données originales des expériences ont été nécessaires pour réaliser les corrections des articles incriminés.

« Lorsqu’une personne de notre laboratoire nous amène des données qu’elle dit “originales”, on en est rendus à croire qu’elles le sont effectivement, puisque qu’il s’agit de scans de ses propres cahiers de laboratoire.

Or il s’est avéré [lors de la 2e investigation du CNRS en 2017-2018] que cette personne s’est amusée systématiquement à nous donner des cahiers de laboratoire falsifiés, et même pour une occurrence une fabrication totale d’une page de cahier. Nous venons de le vérifier auprès du service juridique du CNRS. (…) Même [eux] n’en croyaient pas leurs yeux ».

Le rôle du CNRS dans les investigations vu par O. Voinnet

Olivier Voinnet revient sur certains éléments des deux investigations dont il a fait l’objet :

  • la première, menée par le CNRS et coordonnée par Francis-André Wollman Directeur @ Institut de Biologie Physico-Chimique - IBPC FONDATION ROTHSCHILD • Directeur de recherche - classe exceptionnelle @ Centre national de la recherche scientifique (CNRS) • Membre … en janvier 2015, a conduit à un rapport de quatre pages. Sur la base de ce rapport, la conseil disciplinaire du CNRS a suspendu Olivier Voinnet pour deux ans en juin 2015. Côté ETHZ, une enquête a également été menée en parallèle, adressant un avertissement au chercheur en juin 2015.
  • la deuxième, menée conjointement par le CNRS et l’ETHZ entre septembre 2016 et février 2017, et « coordonnée par Catherine Jessus Directrice de l’Institut des Sciences Biologiques @ Centre national de la recherche scientifique (CNRS) • Chercheuse en biologie @ Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
    Catherine Jessus…
     » selon Olivier Voinnet, a porté sur cinq articles représentatifs de la production de Patrice Dunoyer et dont Olivier Voinnet était coauteur pour quatre d’entre eux. Les conclusions du rapport sont rendues publiques en septembre 2018, sanctionnant Olivier Voinnet d’un blâme côté CNRS, et prolongeant l’avertissement de 2015 côté ETHZ.

2015 : la commission d’enquête Wollman

Concernant cette « pré-enquête », Olivier Voinnet indique :

  • « Je ne remets pas en cause les personnes qui ont composé cette pré-commission, qui ont été très bien au sens où ils ont dit au CNRS avoir constaté des faits et lui ont demandé de travailler sur cette base. Ils ont pris leur responsabilité en disant que les investigations ne pouvaient pas s’arrêter là.
  • Ainsi, les membres de la commission indiquaient “ne pas pouvoir, à ce stade, répondre de façon éclairée sur l’incidence des défauts sur les principales conclusions scientifiques”. Ils se considéraient donc comme non experts tandis que le CNRS prétendait qu’il s’agissait du contraire !
  • Quelle est la nature des fautes, qui en est à l’origine, et quelles sont les conséquences pour la science ? Telles sont trois questions auxquelles une commission d’enquête doit répondre. Or les membres de cette commission ont demandé dans leur rapport que ce travail soit fait, donc on ne peut pas réellement les appeler une commission d’investigation.
  • Quand je suis sorti de cet entretien, je n’avais donc pas les réponses. Même les cahiers de laboratoire n’avaient pas été ouverts ! J’ai donc écrit à la personne en charge de la biologie végétale de l’époque pour lui dire qu’on ne pouvait s’en tenir là. On m’a répondu que la décision de continuer ou non appartenait à la présidence, et ça s’est arrêté là.
  • Beaucoup ont été éberlués de voir qu’on puisse me sanctionner pour deux ans et Patrice Dunoyer pour un an et 11 mois avec sursis, sur la base d’un rapport de quatre pages. »

2017-2018 : seconde commission d’enquête

Olivier Voinnet souligne avoir sollicité cette deuxième investigation « avec la pression de l’ETH, qui avait contemplé tous ces mensonges de 2015 sans rien dire ». Il signale les points suivants :

  • « Catherine Jessus a décidé pour aider la commission qu’elle allait demander aux ingénieurs du CNRS de fabriquer un logiciel d’analyse d’images ». Selon Olivier Voinnet, ce procédé a abouti a des résultats négatifs sur les quatre papiers étudiés : « le nombre de figures trouvées comme étant problématiques est à se rouler par terre ».
  • Pour le biologiste, l’algorithme « n’a tourné que sur les figures principales. Pourquoi ? Car j’avais apporté la preuve au CNRS, via l’ETH, que le plus gros des manipulations graves de mon collaborateur se trouvaient dans les données supplémentaires. La meilleure façon de ne pas trouver des fautes, c’est d’utiliser un logiciel suboptimal et surtout de le faire tourner sur des figures dont on sait qu’elles ne contiennent pas les fautes ».
  • Olivier Voinnet accuse également le CNRS d’avoir « donné à la commission administrative paritaire une traduction libre d’un rapport rédigé en anglais par une commission qui n’a exercé qu’en anglais », dans laquelle « supplementary figure » a été traduit par « contenu périphérique » : « Le problème c’est que cette traduction transforme des données tout aussi importantes les unes que les autres en des choses subalternes qui n’ont aucune valeur », estime le chercheur.

« C’est malheureux qu’on ait eu besoin d’en arriver à demander une seconde investigation (…) et je persiste à dire que si le CNRS avait fait son travail correctement - ce que ne pouvait pas faire entièrement l’ETH puisqu’elle n’en a pas le pouvoir légal - on n’aurait pas attendu encore deux ans pour découvrir ces choses terribles que vous verrez », énonce Olivier Voinnet.

Le chercheur fait référence à d’autres corrections ou rétractations susceptibles de survenir après son intervention du 17/01/2019, en conséquence de cette deuxième investigation menée par le CNRS.

« L’investigation est terminée mais on aurait pu aller beaucoup plus vite et surtout alerter nos confrères beaucoup plus tôt des dommages que l’on a causés à leur recherche. Je regrette énormément mais je ne peux pas non plus mettre un couteau sous la gorge du CNRS pour agir plus vite qu’ils n’ont agi », dit-il.

Chronologie des investigations

Chronologie de l'affaire Voinnet, selon Olivier Voinnet

Sa vision de l’affaire Jessus

Olivier Voinnet


Science Magazine Prize for young scientist of year (2002)
Médaille de bronze du CNRS (2005)
Prix Victor Noury de l’Académie des sciences (2005)
Grand Prix de la Fondation Schlumberger pour l’Education et la Recherche (2006)
Balfour Medal de la Société de Génétique du Royaume Uni (2006)
Médaille d’Or de l’Académie d’agriculture de France (2006)
Médaille d’Argent du CNRS (2007)
Grand Prix de la Fondation Liliane Bettencourt pour les Sciences du Vivant (2007)
Lauréat « Starting Grant » de l’ERC (2008)
Co-lauréat du Grand Prix Louis D-Institut de France (2009)
Médaille d’Or de l’EMBO, (2009)
Prix Rössler (2013)
Lauréat « Advanced Grant » de l’ERC (2013)
Mendel medal (2014).

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Parcours

CNRS
Directeur de recherche de première classe
École polytechnique fédérale de Zurich (ETH Zurich)
Professeur dans le Groupe de biologie des ARN du département de biologie
CNRS
Directeur de recherche de deuxième classe
Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
Chargé de recherche de première classe
Université de Strasbourg (Unistra)
Habilitation à diriger des recherches
Royal Society, UK
Dorothy Hodgkin fellow

Établissement & diplôme

University of East Anglia, Norwich, UK
PhD, The Sainsbury lab, John Innes Centre
AgroParisTech (Institut national des sciences et industries du vivant et de l’environnement)
Ingénieur agronome - DEA de phytopathologie moléculaire, mention excellent
Université Pierre et Marie Curie
MsC en biologie moléculaire et cellulaire
Université Paris 6 - Pierre et Marie Curie (UPMC)
BsC en biologie moléculaire et cellulaire

Fiche n° 33658, créée le 19/12/2018 à 16:26 - MàJ le 30/01/2023 à 10:40

Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

Le CNRS est le principal organisme de recherche français.


Catégorie : Organismes publics de recherche
Entité(s) affiliée(s) :
- CNRS Innovation (CNRS Innovation)
- Institut de l'information scientifique et technique - INIST (Inist)


Adresse du siège

3 rue Michel-Ange
75794 Paris Cedex 16 France


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Fiche n° 1955, créée le - MàJ le 13/11/2024 à 12:42

École polytechnique fédérale de Zurich (ETH Zurich)

L’ETH Zurich, ou EPFZ, est une des deux écoles polytechniques fédérales suisses.

Catégorie : Universités


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Fiche n° 7815, créée le 24/10/2018 à 06:34 - MàJ le 21/05/2019 à 11:26

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