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Oscar, un outil de gestion de temps et de contrats open source développé par UniCaen

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Actualité n°137932 - Publié le 22/01/2019 à 11:01
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Christophe Turbout, DSI de l’Université de Caen Normandie - ©  D.R.

« Avec le SI Système d’information Oscar, nous sommes globalement capables de gérer n’importe quel type d’activité, qu’elle soit pécuniaire ou non », affirme Christophe Turbout, DSI Directeur des systèmes d’information de l’Université de Caen Normandie, le 18/01/2019 à News Tank. Dans une interview, il présente cet outil de gestion du temps et de contrats, développé en interne, en open source, et ne nécessitant aucune formation particulière pour être utilisé.

A l’origine : le besoin de mettre en place un outil de gestion du temps pour pouvoir répondre aux appels à projets européens, et le choix de l’Amue Agence de mutualisation des universités et des établissements d’enseignement supérieur ou de recherche et de support à l’enseignement supérieur ou à la recherche de ne pas créer de connecteurs avec l’outil de gestion de contrats antérieur de l’université, « ce qui aurait entraîné une double-saisie de la part des opérateurs », précise Christophe Turbout.

Développé depuis juin 2015, l’outil est en production depuis avril 2016. Et il a fait des émules. Sur le site normand, l’Université du Havre, l’Ensicaen Ecole nationale supérieure d’ingénieurs de Caen , l’Insa Institut national des sciences appliquées Rouen et la Comue Communautés d’universités et d'établissements Normandie Université ont décidé de l’adopter. Et au-delà : Lille, Valenciennes, Angers et Arts et métiers ParisTech entament une phase de déploiement, tandis que Limoges, Tours, et Montpellier 3, vont passer prochainement en production avec une version modifiée.

Oscar a été conçu « de façon à être utile pour l’université dans un premier temps », mais des connecteurs ont été prévus pour « récupérer automatiquement des données depuis d’autres outils », ou pour exporter des données. Ainsi, « échanger des informations avec le CNRS Centre national de la recherche scientifique est tout à fait envisageable », estime-t-il.

Même si pour le DSI, « la réalité est moins évidente : le CNRS est souvent plus prompt à importer nos données dans ses outils que l’inverse. Ce n’est pas un problème technique mais uniquement politique, qui n’est pas récent et n’est pas spécifique à notre université ». « L’université n’a donc pas de vision globale sur les données de ses UMR Unité mixte de recherche  », conclut-il.

Des développements sont prévus au premier trimestre 2019, à commencer par des connecteurs avec Sifac Système d’information financier analytique et comptable , l’outil de gestion financière de l’Amue, afin de permettre « de connaître l’état des dépenses d’un contrat sans avoir de droits particuliers sur Sifac ».

Ils interviennent alors que les travaux d’un système d’information mutualisé au niveau national, le SI Labo, sont en cours. A cet égard, le DSI de l’UniCaen souligne n’avoir que « peu de visibilité », mais concède que « si demain un autre outil plus performant reprend le périmètre fonctionnel d’Oscar tout en faisant mieux, nous n’aurons aucun problème à changer d’outil ».


Christophe Turbout répond à News Tank

Qu’est-ce que le système d’information Oscar et pourquoi l’avoir développé ?

Christophe Turbout : En 2015, la direction de la recherche est venue nous voir pour mettre en place un outil de gestion du temps, dans le cadre des appels à projets H2020 Huitième programme-cadre européen pour la recherche et l’innovation sur la période 2014-2020 . L’Université de Caen possédait déjà un outil de saisie et de gestion des contrats, Centaure, développé par Quasar Conseil, une entreprise française basée à Châtellerault.

Il n’était pas question de nous retrouver avec une double-saisie »

Quand l’Amue Agence de mutualisation des universités et des établissements d’enseignement supérieur ou de recherche et de support à l’enseignement supérieur ou à la recherche a annoncé qu’elle allait ré-utiliser Tempo, le logiciel de suivi de feuille de temps du CNRS Centre national de la recherche scientifique , pour proposer une version baptisée Synchro, nous avons pris contact avec le chef du projet pour nous assurer qu’ils avaient bien prévu des connecteurs, de façon à ce que nous puissions synchroniser Synchro avec les contrats présents dans notre outil. Il n’était en effet pas question de nous retrouver avec une double-saisie à faire pour les personnels en charge de la recherche.

Il valait mieux partir sur la réécriture d’un logiciel »

D’une part ces connecteurs n’avaient pas été prévus, mais on nous a également opposé un refus quant à un potentiel développement futur. Nous n’avons donc pas choisi Synchro, et comme nous ne souhaitions pas continuer avec Centaure, nous nous sommes dit qu’il valait mieux partir sur la réécriture d’un logiciel gérant à la fois les feuilles de temps et les contrats.

Comment avez-vous procédé ?

Nous avons commencé à développer Oscar en juin 2015, avec plusieurs contraintes :

  • L’outil ne devait pas nécessiter de formation particulière pour être utilisé par tous les acteurs de la gestion de contrat.
  • Les informations devaient être mises à disposition de tous les intervenants de la chaîne, du chercheur au gestionnaire, en passant par les gestionnaires financiers, dans un souci de transparence mais aussi parce qu’il n’existait aucun outil de suivi de gestion de contrats facile d’accès et que tout le monde faisait le même travail de suivi sur un tableur, chacun de son côté. Cela représentait une déperdition considérable de moyens.
L’outil ne devait pas nécessiter de formation particulière »

Nous avons recruté un développeur et monté un groupe projet constitué de personnes de la DRI (direction de la recherche), d’un informaticien, d’un gestionnaire financier, de personnes des différentes composantes et de personnels de laboratoires, de façon à construire un outil répondant aux problématiques de chacun.

Nous nous sommes réunis tous les 15 jours en mode agile et au 01/01/2016 nous avions déjà quelque chose de fonctionnel, avec l’importation d’une partie des données stockées dans Centaure.

Toutes les informations concernant les activités contractuelles sont accessibles »

Une des difficultés rencontrée a été liée au fait que nous voulions faire apparaître la notion de projet, qui peut cumuler différentes sources de financement (ANR Agence nationale de la recherche , région, entreprise, Europe, etc.), ces financements pouvant eux-mêmes être pluriannuels, avoir différentes conventions ou avenants, etc. Or cette structuration n’existait pas réellement dans Centaure, il a donc fallu réaliser des regroupements à base d’heuristiques [en informatique, méthode de résolution de problèmes].

Au final, 80 % des regroupements ont pu être automatisés sur les 3 500 contrats présents dans Centaure. Après une phase de validation des données par les collègues de la DRI, Oscar est entré en production le 01/04/2016.

Comment concrètement l’implémentation va-t-elle se passer dans les laboratoires, notamment les UMR avec le CNRS ? Quelles sont les échéances ?

Nous avons construit Oscar de façon à ce qu’elle soit utile pour l’université dans un premier temps. Ainsi, des connecteurs permettent de récupérer automatiquement des données depuis d’autres outils qu’Oscar, à l’image du SI de l’établissement depuis lequel sont notamment récupérés le nom du laboratoire, des personnes, leur rôle, les affectations, etc.

Ce n’est pas un problème technique mais uniquement politique »

Un connecteur est disponible dans l’application pour importer ou exporter des données. Échanger des informations avec le CNRS est tout à fait envisageable, d’autant plus que la connexion avec leurs outils est un aspect important.

Mais si le CNRS est souvent d’accord sur le papier pour échanger des données, la réalité est moins évidente : il est souvent plus prompt à importer nos données dans ses outils que l’inverse. Ce n’est pas un problème technique mais uniquement politique, qui n’est pas récent et n’est pas spécifique à notre université.

L’université n’a donc pas de vision globale sur les données de ses UMR Unité mixte de recherche  : bien qu’il arrive que l’université ait accès aux contrats gérés par la délégation locale du CNRS, ce n’est absolument pas systématique et dépend de chaque directeur d’UMR.

D’autres établissements se sont montrés intéressés par Oscar ?

Après avoir présenté notre outil à une vingtaine d’établissements, plusieurs ont décidé de l’adopter :

  • Au sein de notre Comue Communautés d’universités et d'établissements , l’Université du Havre, l’Ensicaen Ecole nationale supérieure d’ingénieurs de Caen , l’Insa Institut national des sciences appliquées Rouen et la Comue Normandie Université. L’Université de Rouen est en phase de réflexion.
  • Les universités de Limoges et de Tours vont passer en production très prochainement pour la gestion des contrats de recherche. Montpellier 3 a quant à elle décidé d’utiliser l’application pour la gestion des contrats de recherche ainsi que des autres conventions hors recherche au sein d’une même instance de l’outil.
  • Les universités de Lille, Valenciennes, Angers et l’Ensam École nationale supérieure d’architecture de Montpellier [Arts et Métiers ParisTech] ont récemment fait le choix d’utiliser Oscar et entament une phase de déploiement.
  • D’autres attendent de voir l’avancement des projets annoncés par l’Amue pour se décider.
D’autres attendent de voir l’avancement des projets annoncés par l’Amue »

A Limoges et Tours, le déploiement technique de l’outil a été rapide, car il n’y a pas de difficulté technique particulière, nous sommes sur des technologies standards. Ce qui a pris le plus de temps, c’est l’attribution des droits en fonction de l’organisation de chaque établissement et le choix des informations à rendre disponibles dans l’application.

L’application est très souple et n’impose rien, mais elle oblige à définir des processus et des rôles bien identifiés ce qui peut prendre du temps si ce travail n’a pas encore été fait au sein de l’établissement. 

Combien le projet a-t-il coûté ?

Le coût c’est un ingénieur depuis trois ans donc 150 k€ »

Le coût d’Oscar en matière de développement, c’est l'équivalent d’un ingénieur depuis trois ans, soit 150 k€. L’application est fonctionnelle et convient à des modes d’utilisation très différents entre les trois universités qui l’utilisent déjà (Caen, Tours, Limoges) :

  • Tours ne stocke que les contrats signés.
  • Caen stocke l’intégralité des contrats déposés, des contrats en cours, et des activités annexes, des emails échangés avec les financeurs.
  • Limoges a une configuration encore différente en terme de rôles par rapport à nous.

Ce succès change-t-il quelque chose à votre organisation ?

Nous avons dû recruter une personne supplémentaire »

Avec l’arrivée d’autres établissements, nous avons dû recruter une personne supplémentaire pour gérer l’aspect organisationnel du projet. Une réunion d’avancée du projet a lieu chaque mois avec tous les établissements qui ont choisi d’utiliser Oscar pour continuer à développer l’application. Cette personne s’occupe aussi de la documentation et de la qualification des bugs remontés par les établissements, elle organise aussi les réunions particulières demandées par les différents établissements pour discuter d’un aspect spécifique de l’application (questions fonctionnelles métiers et organisationnelles, ou définition d’une nouvelle fonctionnalité métier).

Ce coût, qui n’était pas prévu au départ du projet, est assumé par tous les établissements, et équivaut actuellement à 5 000 € HT Hors taxes pour chacun, mais ce prix pourrait baisser si d’autres établissements se rajoutent au projet.

Ce prix pourrait baisser si d’autres établissements se rajoutent au projet »

Cela aurait pu être différent, car notre volonté initiale était de ne pas héberger nous-même l’application, mais de la rendre accessible via le consortium Esup [Communauté de 74 établissements français d’enseignement supérieur pour l’innovation numérique]. Toutefois la direction d’Esup n’a pas voulu héberger l’outil pour ne pas empiéter sur le terrain de l’Amue, qui avait prévu de lancer Sigec, un projet mort-né qui avait exactement le même périmètre qu’Oscar.

Oscar a été développé en open source ?

Oui, le code source de l’application est disponible sous licence Cecill2 et hébergé sur notre instance de gitlab. Tous les établissements peuvent y avoir accès via la fédération d’identité Renater Réseau national de télécommunications pour la technologie l’enseignement et la recherche .

Tous les établissements peuvent y avoir accès »

Certains établissements nous ont aussi demandé de pouvoir participer au développement. Par exemple, l’Ensicaen est en train de rajouter un module d’import de données spécifique. L’intégration dans différents SI d’établissements, comme à Limoges ou à Tours, nous a permis d’ajouter des fonctionnalités et maintenant Oscar se connecte à Cocktail ou aux logiciels Amue (Harpège, Siham).

D’autres évolutions sont-elles prévues ?

Une fonctionnalité attendue par beaucoup de personnes »

La prochaine grosse fonctionnalité attendue pour l’application, celle sur laquelle nous allons travailler au premier trimestre 2019, c’est la connexion avec Sifac Système d’information financier analytique et comptable pour rendre accessible l’état des dépenses de fonctionnement, d’investissement ou de masse salariale directement dans l’application. C’est une fonctionnalité attendue par beaucoup de personnes, notamment les chercheurs, car elle permettra de connaître l’état des dépenses d’un contrat sans avoir de droits particuliers sur Sifac.

La question de l’état des dépenses sur un contrat est une question récurrente au sein des laboratoires, elle représente même un temps important d’un gestionnaire pour les gros laboratoires. Rendre disponible directement cette information aux chercheurs va avoir un impact rapidement mesurable sur la vie des laboratoires.

Qu’en est-il du développement du SI Labo ?

Avec Oscar, nous sommes globalement capables de gérer n’importe quel type d’activité, qu’elle soit pécuniaire ou non. Mais si demain un autre outil plus performant reprend le périmètre fonctionnel d’Oscar tout en faisant mieux, nous n’aurons aucun problème à changer d’outil.

L’information et son partage sont les choses les plus importantes »

Toutefois, si certaines fonctionnalités que nous jugeons importantes sont absentes ou que l’interface utilisateur n’est pas adaptée aux besoins des métiers, nous garderons alors Oscar et nous souhaiterons avoir accès aux données de ces outils via des web services pour permettre une interopérabilité. L’information et son partage sont les choses les plus importantes dans ces processus de gestion.

Peu de visibilité sur le SI recherche »

C’est ce qui apparemment est prévu avec le « cadre de cohérence SI recherche ». Toutefois, j’avoue avoir peu de visibilité sur le SI recherche en cours de développement car je n’ai jamais eu de document qui décrive concrètement le périmètre exact de ses applications.

Christophe Turbout interviendra à Think Education et Recherche, sur la table-ronde « Systèmes d’information : entre “système soviétique” et collaboration, que faut-il mutualiser ? », le 12/02/2019 à Paris Dauphine.

Y participeront également :
• Hugues Ponchaut, adjoint au directeur de l’Amue et directeur du département stratégie et programmation SI ;
• Emmanuelle Vivier, DSI de l’université Picardie Jules Verne et membre du conseil d’administration du CSIESR.
• Isabelle Olivier, vice-présidente numérique et innovation pédagogique de la Communauté Université Grenoble Alpes.
• Jean-François Guezou, directeur des relations usagers et du développement de Renater.

Christophe Turbout


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