Index Twitter de l’ESRI : « Les “bons élèves” sont peu nombreux » (Manuel Canévet)
« La première tendance c’est la croissance continue globale de l’audience des comptes d’universités, d’écoles… Cette croissance cache en réalité une faiblesse. Car elle repose sur deux piliers : la croissance de l’audience globale de ces propres réseaux et l’accumulation des followers par sédimentation. Cette rente de situation n’est donc en rien l’illustration d’une politique volontariste dans la majeure partie des cas. Et quand on mesure l’engagement (followers actifs) ou la vitalité de la croissance, on se rend compte que les “bons élèves” sont peu nombreux », déclare Manuel Canévet, consultant en communication et expert des réseaux sociaux, dans un entretien à News Tank le 13/06/2017.
« Utiliser Twitter, ne consiste pas à simplement disposer d’un compte et publier dessus. Il s’agit de structurer un ou des objectifs de présence sur ce réseau, qualifier son audience, mesurer les retombées de ses publications. Autant de tâches que peu d’établissements réalisent aujourd’hui », estime Manuel Canévet.
Il revient sur les résultats de l’Index Twitter de l’ESRI
Enseignement supérieur, recherche et innovation
élaboré par News Tank et publié le 09/06/2017. Selon cet Index mis à jour en temps réel et qui fera l’objet d’une analyse mensuelle, les comptes les plus suivis étaient (au 09/06/2017) :
• organismes de recherche : Cern (2 262 460 abonnés), CNRS (91 708), Inserm (84 772) ;
• écoles de commerce : HEC (49 761 abonnés), Essec (30 073), ESCP Europe (24 116) ;
• écoles d’ingénieurs : École polytechnique (25 717), CentraleSupélec (14 117), Mines ParisTech (12 052) ;
• universités : Université de Nantes (42 492), Université Panthéon-Sorbonne - Paris 1 (31 462), Université Paris-Sorbonne (25 773) ;
• Comue
Communautés d’universités et d’établissements
: Université Paris-Saclay (13 889), Université de Lyon (13 049), l’Université fédérale de Toulouse-Midi-Pyrénées (8 712).
Manuel Canévet répond à News Tank
Que vous inspire la multiplication des classements de comptes Twitter. Pourquoi et quand avez-vous commencé à en réaliser ?
Manuel Canévet : Le succès d’audience que rencontrent ces classements explique sans doute que nombreux soient ceux qui s’y mettent.
Pour une agence-conseil comme la nôtre, réaliser des « classements » de réseaux sociaux à deux utilités : maintenir nos benchmarks à jour et convaincre notre secteur de l’utilité de ces outils de communication.
La culture de ces outils se répand »Nous le faisons moins pour attirer l’attention sur notre propre marque que pour convaincre l’enseignement supérieur de l’intérêt et de l’importance de ce type d’outils. Et même si la prise de conscience est sans doute plus tardive que dans d’autres secteurs, le nombre de présidents d’université, de directeurs d’école qui ont choisi d’investir Twitter ces derniers mois est un des marqueurs qui prouvent que les choses progressent. La culture de ces outils se répand.
Twitter est un outil de communication directe, live très important. Il permet à des institutions complexes comme les universités et les grandes écoles d’informer efficacement leurs publics, d’expliquer leurs actions et projets et de médiatiser leurs succès, réussites et résultats de recherche.
Quelles tendances, réussites et limites ces dernières années ?
Nous avons toujours effectué des relevés « bruts » pour des classements quantitatifs sur la taille de l’audience. Nous croyons peu aux « classements » d’influence ou de réputation, souvent trop subjectifs. La simple croissance du nombre d’abonnés d’un compte permet de mesurer la vitalité d’un secteur et de faire émerger des points de comparaisons.
La première tendance c’est donc la croissance continue globale de l’audience des comptes d’universités, d’écoles… Cette croissance cache en réalité une faiblesse. Car le ressort de cette croissance repose sur deux piliers :
- la croissance de l’audience globale propre de ces réseaux ;
- l’accumulation des followers par sédimentation. Elle est particulièrement forte dans les établissements d’enseignement supérieur qui à date fixe voient arriver des centaines/milliers de nouveaux étudiants dont certains s’abonnent mécaniquement.
Cette rente de situation n’est donc un rien l’illustration d’une politique volontariste dans la majeure partie des cas. Et quand on mesure l’engagement (followers actifs) ou la vitalité de la croissance, on se rend compte que les « bons élèves » sont peu nombreux.
L’autre tendance, et elle est positive c’est la grande activité sur ces comptes et la décentralisation de la publication. Chaque école ou université dispose en réalité d’un écosystème de comptes (composantes, enseignants, personnels, étudiants, associations, etc.) qui contribuent à faire vivre des dizaines de conversations chaque jour. Ce dynamisme passe malheureusement souvent sous le radar, car peu d’établissements analysent leur propre empreinte numérique.
Que vous inspire l’écart entre les organismes de recherche et les autres institutions ? Ecoles et universités devraient-elles s’en inspirer ? Le peuvent-elles ?
Un même secteur peut recouvrer d’une marque à l’autre des réalités très différentes. Du côté des chaussures quoi de commun entre des tongs, des mocassins Gucci, et des Nike air max ? Les publics sont-ils les mêmes ? Et pourtant cela reste des chaussures.
La vulgarisation scientifique est la mission des organismes de recherche, le public peut donc être large »Plus sérieusement, l’identité des centres de recherche n’est-elle pas plus « compacte », ramassée que celle des universités qui elles se battent tout à la fois sur les plans recherche, formation initiale, continue, etc. ? Pour eux, la vulgarisation scientifique est la mission, le public peut donc être large.
L’autre partie du secret n’est-il pas que les moyens dédiés à la communication sont plus importants du côté des organismes ?
Si l’on regarde les bas du tableau pour les écoles et les universités, on voit des comptes encore très peu suivis. Preuve qu’il reste des établissements à convaincre que Twitter doit être utilisé ?
Bien entendu. Je dirais même qu’il reste à convaincre la majorité. Car « utiliser » Twitter, ne consiste pas à simplement disposer d’un compte et publier dessus. Il s’agit de structurer un ou des objectifs de présence sur ce réseau, qualifier son audience, mesurer les retombées de ses publications. Autant de tâches que peu d’établissements réalisent aujourd’hui.
Seules trois Comue Communautés d’universités et d’établissements ont plus de 5 000 followers. Leurs marques commencent-elles à émerger ? Twitter est-il un reflet de la réalité politique de ces objets ?
De gros hamburgers dont on peine à distinguer le goût »Ce n’est sans doute pas l’endroit pour avoir un débat sur le chaos qui règne en ce moment dans les marques de l’enseignement supérieur, mais je dirai que la superposition inorganisée de marques, de labels (Idex, I-Site, Labex, etc.), de projets transverses, dans le secteur aboutit à monter de gros hamburgers avec plein de tranches à l’intérieur dont on peine à distinguer le goût.
Et bien entendu ce manque de lisibilité se retrouve sur les réseaux sociaux. Pourquoi suivre un compte Twitter quand on identifie mal sa promesse, son offre ? Quelle différence entre le compte Twitter de mon université et celui de ma Comue ? Quel intérêt à suivre les deux ?
Pendant qu’on se concentre sur Twitter d’autres réseaux sont-ils à suivre de près ?
Facebook, dont les fonctionnalités évoluent sans cesse (vidéo, Live, messaging, etc.) et dont beaucoup d’établissements se servent uniquement comme d’un flux rss. Linkedin pour rattraper efficacement son retard en matière de base de données alumni, de marketing en matière de formation continue, de valorisation des expertises des enseignants-chercheurs…
Et enfin Instagram et Snapchat (qui se ressemblent beaucoup) mais qui en plus d’une stratégie solide, nécessitent une grande maitrise de l’image et de l’iconographie (un autre chantier que maitrisent mal la plupart des universités et écoles).
Twitter : évolution du nombre de followers des écoles, universités et organismes de recherche
Manuel Canévet
CEO @ Canévet et associés
Canévet et associés a pour vocation d’accompagner les entreprises et institutions, et tout particulièrement les universités et grandes écoles, dans leur stratégie de communication et la définition d’actions de com’ (définition et adaptation des politiques, positionnement, bilan d’image…) sur le champ de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, en profitant au mieux des opportunités numériques.
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Fiche n° 5347, créée le 17/07/2014 à 10:49 - MàJ le 02/05/2019 à 12:36