Autonomie des universités : une situation financière « globalement satisfaisante » (Cour des comptes)

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Actualité n°52628 - Publié le
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©  D.R.
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« La situation financière des établissements apparaît globalement satisfaisante [mais] les universités connaissent cependant des situations assez diverses », indique une enquête de la Cour des comptes réalisée à la demande de la commission des finances du Sénat. Intitulée « L’autonomie financière des universités : une réforme à poursuivre », celle-ci a été publiée en juin 2015 et rendue publique le 30/09/2015.

Cette enquête traite de la nouvelle autonomie des universités depuis la loi LRU Libertés et Responsabilités des Universités (loi LRU ou loi Pécresse du nom de la ministre Valérie Pécresse), appelée loi d’autonomie des universités, du 10/08/2007 adoptée sous le gouvernement Fillon de 2007 sur cinq points en particulier : la situation financière des universités, la question de leur gestion, la politique des ressources humaines dans ces établissements, l’enjeu de la gestion immobilière et les nouvelles relations entre universités et État. Elle formule dans le même temps 13 recommandations à l’attention des universités et du Ministère de l’enseignement supérieur.


« La loi du 10/08/2007 relative aux libertés et responsabilités des universités avait pour objectif d’offrir aux universités françaises des leviers pour rivaliser sur le plan international avec les meilleures universités, en les dotant d’une nouvelle gouvernance et d’une plus grande autonomie dans l’usage de leurs moyens », selon la Cour des Comptes.

Le Président de la commission des finances du Sénat avait demandé à la Cour des comptes de mener une enquête sur le bilan de l’autonomie financière des universités le 20/11/2013. « À la suite de son enquête, en 2013-2014, sur l’allocation des moyens aux universités, la Cour des comptes a alerté par un référé le 01/11/2014 la ministre de l’Éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche et le ministre des finances et des comptes publics sur l’inadaptation du pilotage ministériel au nouveau contexte de l’autonomie. »

Une situation financière « globalement satisfaisante » malgré « des situations diverses »

  • « À l’issue du passage à l’autonomie, la situation financière des établissements apparaît globalement satisfaisante. La centralisation des données issues des comptes financiers sur les sept derniers exercices montre que les comptes de résultat des universités sont régulièrement excédentaires, tout en connaissant d’importantes variations sur la période. »

  • « En 2013 et 2014, [les universités] ont dégagé ensemble plus de 190 M€ d’excédents chaque année. Les universités disposent de fonds de roulement (1,5 Md€) et de niveaux de trésorerie (2,2 Md€) qui excèdent les règles prudentielles et les nécessités de la gestion. Un audit de leurs politiques d’investissement, une amélioration de leurs plans de financement pluriannuels et une meilleure maîtrise des outils d’analyse financière s’imposent. »

Des établissements « en difficulté financière »

  • « Les universités connaissent cependant des situations assez diverses. La situation financière de plusieurs d’entre elles s’est sensiblement dégradée à la suite du passage au régime des responsabilités et compétences élargies (RCE), pour différentes raisons, dont notamment la difficulté à anticiper les conséquences de leurs choix en matière de ressources humaines. »

  • « Les établissements en difficulté financière ont su néanmoins identifier les moyens de redresser leur situation : mutualisation des procédures d’achats, révision de l’offre de formation et définition de critères de taille pour l’ouverture des groupes, maîtrise des heures complémentaires. »

  • « Les présidents d’université ont également dû faire accepter des mesures difficiles de régulation des emplois pour contenir l’évolution de la masse salariale qui consomme plus de 80 % de leurs ressources. Le processus de transfert budgétaire achevé, il appartient désormais au ministère d’ajuster les niveaux de dotation des établissements afin de corriger les déséquilibres sans pénaliser les gestionnaires rigoureux. »

L’accès aux RCE, « un facteur décisif de modernisation de la gestion des universités »

  • « L’accès aux RCE a été un facteur décisif de modernisation de la gestion des universités. Confrontées à la nécessité de maîtriser un budget global, elles se sont dotées de nouvelles compétences de pilotage et de contrôle de gestion. La rénovation de leurs modalités de préparation budgétaire et la mise en place de procédures de dialogue de gestion avec leurs composantes ont affermi le rôle des présidents d’universités. »

  • « Cependant, l’amélioration de la qualité de la gestion n’est pas homogène entre établissements et certains ont encore devant eux d’importantes marges de progression. Les universités doivent développer la mise en place de contrats d’objectifs et de moyens avec leurs composantes. Enfin, le fonctionnement des conseils d’administration doit être amélioré afin de recentrer les débats sur les enjeux essentiels de l’université. »

  • « La mise à niveau des systèmes d’information des universités n’a pas été au rendez-vous du passage aux RCE et les retards observés, notamment dans les fonctions d’analyse et de reporting, privent les présidents d’université comme le ministère des outils de pilotage nécessaires. »

« L’élaboration de politiques de ressources humaines constitue un défi de taille pour les universités »

  • « La gestion des ressources humaines et le suivi de la masse salariale se sont nettement professionnalisés depuis le passage aux RCE, et les universités se sont saisies progressivement des possibilités offertes par la loi LRU. »

  • « L’élaboration de politiques de ressources humaines constitue toutefois un défi de taille pour les universités, tant la gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences est embryonnaire. Des marges de progrès subsistent, dont notamment la régulation et le contrôle des obligations de service des enseignants-chercheurs et du temps de travail des personnels administratifs et techniques. »

  • « Pour autant, les universités ne disposent pas de tous les leviers utiles : les statuts des personnels sont encore trop nombreux et le mouvement de simplification doit se poursuivre. »

Une autonomie à accompagner en matière de gestion immobilière

  • « La connaissance du patrimoine immobilier des universités s’est nettement améliorée du fait de l’extension de la politique immobilière de l’État à ses opérateurs et du passage des établissements aux responsabilités et compétences élargies. »

  • « En revanche, [l']exercice de définition des orientations stratégiques et de programmation des opérations est resté largement virtuel quant à ses effets, faute de maîtrise par les établissements de leurs conditions de financement à long terme et de valorisation des capacités d’ingénierie des directions de l’immobilier. »

  • « Reste un acquis de taille pour l’avenir : les établissements ont modifié leur perception des surfaces, considérées traditionnellement comme les supports des missions et désormais perçues aussi comme des variables de coûts. Ils ont peu de prise cependant à court terme sur leur parc en raison de ses caractéristiques architecturales et fonctionnelles. »

Le ministère a tardé à se réorganiser pour s’adapter au nouveau contexte de l’autonomie

  • « Le ministère a tardé à se réorganiser pour s’adapter au nouveau contexte de l’autonomie. Il ne s’est doté d’outils de veille financière et de prévention des risques qu’en 2012, alors que presque toutes les universités étaient déjà passées au régime des RCE. Les rectorats à qui incombait le contrôle budgétaire des universités n’étaient pas suffisamment organisés ni outillés pour exercer un contrôle efficace et accompagner les universités dans leurs nouvelles responsabilités. »

  • « L’allocation des moyens aux établissements, telle qu’elle est effectuée, n’est pas adaptée au contexte des RCE. Les discussions sur un nouveau modèle, qui devrait tenir compte de la masse salariale, n’ont pas abouti. »

  • « Les marges de manœuvre financières des universités apparaissent en réalité limitées. Soumises à l’obligation d’accueil et à l’objectif de réussite de tous les étudiants, elles n’ont pas la maîtrise complète de leur niveau d’activité. Leur dépendance financière à la subvention pour charges de service public reste très forte (en moyenne 82,3 % des produits d’exploitation) et leur masse salariale atteint un niveau critique par rapport aux produits d’exploitation (80,2 %). »

Le contrat pluriannuel pour une « meilleure efficience du système d’enseignement supérieur »

  • « Dans ce contexte, le contrat pluriannuel doit devenir le cadre dans lequel s’accordent effectivement la stratégie des universités et des regroupements, et celle du ministère. Ce contrat doit ainsi permettre de déterminer la dotation globale de l’université, au moins pour la première année, en prenant en compte plusieurs dimensions : l’activité, la performance, la situation financière et les objectifs de développement de l’établissement. »

  • « [Ce contrat] devrait ainsi permettre une rationalisation de l’offre de formation et une mutualisation des moyens, et donc une meilleure efficience du système d’enseignement supérieur. »