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T. Coulhon après le référé de la Cour des comptes : « Le Hcéres n’est pas une machine bureaucratique »

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Actualité n°221083 - Publié le 17/06/2021 à 18:02
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©  Benjamin Girette / Hcéres
Thierry Coulhon - ©  Benjamin Girette / Hcéres

• Des propositions déjà mises en œuvre, comme les synthèses disciplinaires, la mise en place d’un travail plus transversal et l’évaluation intégrée ;
• Des préconisations partagées, comme l’enjeu de lier davantage évaluation et allocation des moyens ;
• Des nuances et des désaccords, comme sur la quantité de rapports émis, la durée des évaluations, le retour à la « cotation » (notation), ou le fait de rendre les rapports payants.

Thierry Coulhon Président du directoire @ Institut Polytechnique de Paris (IP Paris)
, président du Hcéres Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur , réagit dans un entretien à News Tank, au référé de la Cour des comptes, rendu public le 04/06/2021. Celui-ci portait sur la période 2016-2020, soit avant la nomination de Thierry Coulhon.

« Le Hcéres n’est pas une machine bureaucratique qui travaille à vide et fait trop d’évaluations, penser cela c’est passer à côté du sujet », déclare-t-il notamment.

Il annonce des réflexions autour du concept de panel d’experts « afin de ne pas concentrer l’essentiel de nos forces sur les plus petites unités ». Il affirme aussi que « le dogme de la visite physique obligatoire mérite d’être questionné ».

Des réflexions avec l’Igésr Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche , le Conseil d’évaluation de l’école, le SGPI Secrétariat général pour l’investissement ou l’ANR Agence nationale de la recherche sont également en cours. Néanmoins prévient-il, « le sujet central, c’est l’articulation avec les autres agences d’évaluation ».

Le Hcéres doit devenir une autorité publique indépendante en 2022, comme le prévoit la LPR Loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur . « Nous y travaillons d’arrache-pied, avec un comité de pilotage tous les 15 jours. Le travail d’écriture des décrets (quatre dont deux en Conseil d’État) est en cours. »

News Tank publie également la réponse du Premier ministre, Jean Castex Président-directeur général @ Groupe RATP
, au référé.


« Notre budget de 18 M€ n’est pas élevé si les évaluations sont utiles et de qualité »

Comment réagissez-vous au référé de la Cour des comptes (voire encadré) ?

Mon analyse diffère selon les recommandations. D’abord, un certain nombre d’entre elles sont déjà mises en œuvre. Je pense aux synthèses disciplinaires : elles existent déjà à l’image de celle réalisée sur l’archéologie en 2019. Et nous en lançons trois, sur la virologie et l’épidémiologie, sur l’épigénétique et sur les mathématiques.

Le travail sur l’évaluation intégrée bat son plein »

De même, s’agissant du travail plus transversal, c’est chose faite avec le repérimétrage du département d’évaluation des établissements et la création du département d’évaluation des organismes de recherche. Le travail sur l’évaluation intégrée bat son plein avec la refonte des référentiels et des processus pour la vague C.

• Limiter significativement le nombre d’évaluations conduites annuellement, par une refonte et une rationalisation, en particulier pour les unités de recherche, des méthodes et procédures employées.

• Prendre en compte les évaluations du Hcéres dans le nouveau dialogue de gestion, en identifiant, pour chaque opérateur, selon une méthodologie transparente et adaptée, les conséquences à en tirer.

• Redéfinir un nouveau modèle économique et financier faisant participer l’ensemble des interlocuteurs du Hcéres (ministères et autres entités d’évaluation) permettant de dégager davantage de ressources propres.

Lire le référé en détail Publié le 04/06/2021 à 16 :52
• Limiter significativement le nombre d’évaluations conduites annuellement, par une refonte et une rationalisation, en particulier pour les unités de recherche, des méthodes et procédures employées…
.

La Cour préconise aussi le rétablissement du lien entre évaluation et allocation des moyens…

C’est une préconisation que je partage, sur laquelle je m’étais d’ailleurs exprimé avant d’être au Hcéres, mais qui aujourd’hui ne dépend pas de nous. Ce qui dépend de nous et l’on s’y emploie, c’est de rédiger des rapports assez clairs pour aider réellement l’État et les établissements à déterminer rationnellement leurs allocations de moyens externes et internes.

Trouvez-vous, comme la Cour, que le Hcéres émet trop de rapports ?

Le Hcéres n’est pas une machine bureaucratique qui travaille à vide et fait trop d’évaluations, penser cela c’est passer à côté du sujet.

Nous ne sommes pas maîtres du nombre d’objets à évaluer. Il y a dans ce pays environ 300 établissements, 290 écoles doctorales, 3 350 unités de recherche et quelque 5 600 formations de niveau licence ou master.

On peut se féliciter d’avoir un paysage aussi riche et, s’il y a eu des regroupements d’établissements ou d’unités de recherche, il n’est sans doute pas souhaitable, et en tout cas pas en notre pouvoir, de changer ces ordres de grandeur. 

En outre, il faut dire que la grande majorité de ces structures souhaitent être évaluées. Notre problème, c’est d’ailleurs de résister à la demande des équipes internes d’être évaluées.

Un même comité peut regarder plusieurs unités de recherche »

Quant à la durée des évaluations, repasser à des vagues de quatre ans, ce serait trop court pour que les recommandations puissent être mises en œuvre et que leurs effets soient perceptibles. Et six ans, c’est trop long par rapport à l’évolution des politiques. Cela signifierait aussi qu’un mandat de président d’université pourrait se dérouler sans évaluation…

Il ne faut pas confondre le nombre d’évaluations et de rapports et le nombre de comités. Un même comité peut regarder plusieurs unités de recherche. Il nous arrive déjà d’utiliser les mêmes experts pour plusieurs évaluations. Mais ce n’est pas formalisé. Nous réfléchissons à un concept de panels d’experts, afin de ne pas concentrer l’essentiel de nos forces sur les plus petites unités.

Enfin, il ne faut pas perdre de vue que le rapport qui compte le plus c’est celui de l’établissement, c’est l’objet intégrateur de l’ensemble des évaluations menées.

Avez-vous des désaccords avec la Cour ?

J’émets de vives réserves sur le retour de la cotation prôné par la Cour. Je me suis beaucoup exprimé là-dessus. Cela a des effets pervers : simplification extrême, poussée vers le A+… On peut envisager une appréciation tout aussi franche, mais plus élaborée et donc plus utile.

Je n’approuve pas l’idée de faire payer les évaluations par les évalués dans l’univers public et national. Le Hcéres Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur est une agence publique, il est légitime de déployer une comptabilité analytique et qu’on sache dire combien coûte une évaluation, le statut d’API Autorité publique indépendante nous y amènera naturellement. Mais il n’y a pas d’utilité à bâtir un circuit compliqué dans lequel l’État finance les établissements qui nous refinanceraient ensuite. Cela créerait une tension de plus et déontologiquement ce serait étrange.

Au final, notre budget de 18 M€ n’est pas élevé si les évaluations sont utiles et de qualité.

Mais ne faudrait-il pas que les autres ministères contribuent à vous financer ?

S’agissant des évaluations qui portent sur des établissements dont la tutelle n’est pas le Mesri Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation , je ne suis pas certain qu’il faille envoyer la facture à chaque fois. Le coût peut être pris en compte dans les allocations faites au Mesri ou dans les équilibres avec les autres ministères.

Pas certain qu’il faille envoyer la facture à chaque fois »

En revanche, je souhaite resserrer les liens entre le Hcéres et les tutelles des établissements hors Mesri. Nous pratiquons ainsi l’évaluation des établissements Culture depuis plusieurs années et je compte bien resserrer les liens avec la rue de Valois. De même, la DGOS Direction générale de l’offre de soins a été sollicitée pour valider ensemble et avec l’Inserm Institut national de la santé et de la recherche médicale les attentes sur la recherche clinique que nous évaluons.

Quand des écoles ou structures d’autres ministères souhaitent être évaluées, la demande doit venir de leur tutelle. Si tout le monde est d’accord pour que nous fassions l’évaluation, si elle est utile et si nous sommes bien alignés, le résultat doit alors être visible.

S’agissant des ressources propres, en particulier à l’international, je voudrais que l’on renoue avec la trajectoire antérieure après une année difficile. Mais notre mission principale reste la mission de service public, il faudra reprendre sereinement le sujet une fois sorti de la pandémie.

Quelle est votre réflexion sur la dématérialisation ?

Le dogme de la visite physique obligatoire mérite d’être questionné, surtout si on pense dans le même temps développement durable. La réflexion est ouverte là-dessus.

La dématérialisation porte aussi sur les processus, avec une réflexion sur notre système de gestion électronique de documents et le recrutement d’un directeur du numérique et des données, qui est en cours.

Des rapports intermédiaires pour assurer un meilleur suivi de vos recommandations pourraient-ils voir le jour ?

Nous n’allons pas alourdir le processus, l’enjeu est de crédibiliser celui qui existe. Cela dépend de la manière dont on écrit les rapports pour qu’ils soient lus et qu’il soit moins tentant de les mettre dans un tiroir en attendant la prochaine évaluation. Je demande aux directeurs de départements de prêter une grande attention à la qualité des rapports, j’insiste sur la nécessité de communiquer et j’ai vu en quelques mois les choses bouger.

Il nous faut en outre systématiser les retours d’expérience.

Comment voyez-vous le travail possible avec l’Igésr Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche  ?

Caroline Pascal Directrice générale de l’enseignement scolaire @ Ministère de l’éducation nationale (MEN)
, cheffe de l’Igésr, est venue en Codir Comité de direction du Hcéres pour discuter de l’articulation entre nos instances. De même nous échangeons avec le Conseil d’évaluation de l’école et nous aurons bientôt des réunions avec le SGPI Secrétariat général pour l’investissement et l’ANR Agence nationale de la recherche .

Je ne vois aucun inconvénient à ce que nous échangions sur nos programmes de travail et nos méthodologies. Nous pouvons aussi ponctuellement nous appuyer sur des compétences de l’Igésr. L’intégration d’inspecteurs généraux dans nos comités pourrait avoir lieu à titre expérimental.

Mais je vois plusieurs limites à un rapprochement plus poussé : le métier de l’inspection, son positionnement, ne sont pas les mêmes que ceux du Hcéres. Les grands principes d’indépendance, de collégialité et d’évaluation par les pairs qui sont les nôtres doivent perdurer.

Reste que le sujet central, c’est l’articulation avec les autres agences d’évaluation (CTI Commission des titres d’ingénieur , CEFDG Commission d’évaluation des formations et diplômes de gestion , CCN-IUT Commission consultative nationale des IUT ).

Rejoignez-vous la Cour dans son estimation du coût moyen des évaluations ?

Le coût moyen de l’évaluation calculé par la Cour ne me semble ni invraisemblable ni scandaleux. Nous nous pencherons dessus plus en détail quand nous aurons des outils de gestion en propre qui nous permettront de mettre en œuvre notre propre comptabilité analytique.

Pas de système dispendieux au Hcéres »

Quand on analyse notre trajectoire de masse salariale, il ne faut pas oublier que le Hcéres a intégré l’OST Observatoire des Sciences et des Techniques . Enfin sur l’action sociale, elle représente (hors restauration collective) 1/1000e de la masse salariale.

Il n’y a pas de système dispendieux au Hcéres et quand je regarde ce ratio, je le trouve même faible. Mais sur d’autres registres, il est vrai qu’il faut un effort continu de rationalisation.

Où en est la transformation en API ?

Nous y travaillons d’arrache-pied, avec un comité de pilotage tous les 15 jours. Fin janvier 2022, les personnels du Hcéres auront été payés par le Hcéres.

Le travail d’écriture des décrets (quatre dont deux en Conseil d’État) est en cours.

La réponse de Jean Castex au référé

Lors de la parution du référé de la Cour des comptes, la réponse de Jean Castex, Premier ministre, n’avait pas été publiée. En voici les principaux éléments.

Thierry Coulhon


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Parcours

CY Cergy Paris Université
Professeur des universités en mathématiques
Présidence de la République (Élysée)
Conseiller éducation, enseignement supérieur, recherche et innovation
PSL Research University
Président
The Australian National University
Directeur du Mathematical Sciences Institute
Commissariat général à l’investissement
Directeur du programme « campus d’excellence »
Cabinet de la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche
Directeur adjoint
Cabinet de la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche
Conseiller spécial
Conférence des présidents d’université
Vice-président
Université de Cergy-Pontoise
Président

Fiche n° 7177, créée le 31/10/2014 à 11:39 - MàJ le 25/09/2024 à 17:53

Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres)

Le Hcéres est administré par un collège composé de 30 membres nommés par décret pour une durée de 4 ans. Son président, nommé parmi les membres, le dirige. « Il définit les mesures propres à garantir la qualité, la transparence et la publicité des procédures d’évaluation ».


Catégorie : Établissements publics
Entité(s) affiliée(s) : Office français de l’intégrité scientifique (Ofis)


Adresse du siège

2 rue Albert Einstein
75013 Paris France


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Fiche n° 1935, créée le 05/05/2014 à 12:26 - MàJ le 18/11/2024 à 14:29

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Thierry Coulhon - ©  Benjamin Girette / Hcéres