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Exclusif« Redonner à la FMSH son rôle de fondation reconnue d’utilité publique » (Hélène Velasco-Graciet)

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Interview n°212199 - Publié le 22/03/2021 à 17:44
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©  Université Bordeaux Montaigne
Hélène Velasco-Graciet - ©  Université Bordeaux Montaigne

La FMSH Fondation Maison des sciences de l’homme , aujourd’hui installée boulevard Raspail à Paris, déménagera « à terme » sur le campus Condorcet dédié aux SHS Sciences humaines et sociales et installé à Aubervilliers, annonce Hélène Velasco-Graciet
, dans un entretien à News Tank, le 22/03/2021. Élue présidente du directoire de la fondation le 24/11/2020, elle a succédé à Michel Wieviorka Président du comité de sélection du Prix Michel Seurat @ Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
, démissionnaire à l’issue d’une longue crise de gouvernance.

« Avec Condorcet, les choses sont très claires : nous avons l’intention de participer activement à sa réussite. Je souhaite qu’il y ait une empreinte spatiale de la FMSH Fondation Maison des sciences de l’homme , avec des locaux spécifiques et facilement repérables sur le Campus », affirme l’ancienne présidente de l’Université Bordeaux 3.

Elle annonce ses priorités à News Tank, à commencer par le fait de « redonner à la FMSH son rôle de fondation reconnue d’utilité publique au service des SHS ». Ce qui passe par une réforme des statuts, la mise en place d’un règlement intérieur et d’un comité d’éthique.

Elle souhaite que la fondation développe ses levées de fonds pour que la part de subventions passe sous les 50 % du budget, alors qu’elle représente 9 des 15 M€ de ressources aujourd’hui.

Sur le volet RH Ressources humaines , elle indique avoir trouvé à son arrivée un climat social « fortement dégradé » et « des collègues souvent désemparés ». « Il faut maintenant tourner la page et avancer », ajoute Hélène Velasco-Graciet. « Pour accompagner et faciliter cette transition, j’ai demandé un appui à l’Igésr Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche , ce qui a été immédiatement été accepté par le ministère. »


« Nous préparons le budget, qui sera un acte politique fort »

Quelle est votre approche depuis votre élection à la tête de la FMSH ?  

Ma priorité, avec Flore Gubert (vice-présidente recherche et internationalisation) et Pascal Buléon (vice-président éditions, diffusion et valorisation des savoirs), est de redonner à la FMSH Fondation Maison des sciences de l’homme son rôle de fondation reconnue d’utilité publique au service des SHS. Cette mission nationale, le nouveau directoire a souhaité la placer au centre de son projet et la restaurer dès son élection. L’idée est de refonder la FMSH et de mettre en œuvre le projet sur lequel nous avons été élus en novembre 2020 par le conseil de surveillance. 

Refonder la FMSH »

Nous avons consacré les premières semaines à discuter avec différents acteurs clés des SHS et avec le Mesri, pour nouer ou renouer des liens forts avec nos partenaires et mettre en place notre stratégie. 

En ce moment, nous préparons le budget, qui sera un acte politique fort, pour 2021.  

Dans quel état avez-vous trouvé la Fondation ? 

Hélène Vélasco-Graciet - ©  Université Bordeaux Montaigne
La FMSH et sa communauté ont vécu une année 2020 tumultueuse, difficile. À mon arrivée, le climat social était fortement dégradé et nous avons trouvé des collègues souvent désemparés. Il fallait donc reprendre contact, pouvoir discuter, comprendre pour créer de bonnes conditions de travail fondées sur la confiance, apaiser et rassurer. Il faut maintenant tourner la page et avancer.

Pour accompagner et faciliter cette transition, j’ai demandé un appui à l’Igésr Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche , ce qui a été immédiatement accepté par le ministère, et actuellement deux inspecteurs généraux nous accompagnent et nous soutiennent dans la mise en place de notre projet de refondation.

Vous dites vouloir lui redonner sa nature de fondation reconnue d’utilité publique, mais concrètement qu’est-ce que cela signifie ? 

Je compte mener un travail en profondeur pour revoir les statuts de la fondation et élaborer un règlement intérieur dans les mois à venir. L’enjeu est de bâtir, dans la concertation, une nouvelle forme de gouvernance. 

Un comité d’éthique va être créé pour mettre en place des règles assez simples de respect des procédures de prévention des conflits d’intérêts.  Il pourra s’auto-saisir ou être saisi par des collègues et des extérieurs. Son existence sera très utile aussi pour renforcer notre crédibilité auprès de potentiels donateurs.   

Cela donnera un souffle nouveau à la FMSH »

Car la FMSH est une structure privée, qui a une capacité à lever des fonds. Aujourd’hui sur nos presque 15 M€ de budget, presque 9 M€ proviennent du ministère. L’objectif est que cette subvention devienne inférieure à 50 % du budget. Cela donnera un souffle nouveau à la FMSH et lui permettra de s’autonomiser. 

Mais nous sommes dans une année de transition qui demande aussi de se donner du temps pour prendre les bonnes décisions. J’ai donc lancé une étude pour identifier les donateurs potentiels, en gardant à l’esprit l’histoire de la FMSH, son passé prestigieux et l’héritage intellectuel qu’elle a apporté aux SHS. Je compte définir avec mon équipe et les personnels les valeurs autour desquelles développer cette levée de fonds. L’accueil des financements de donateurs doit respecter les valeurs humanistes qui ont toujours été portées par et à la FMSH. 

Quels seront les axes scientifiques que vous allez privilégier ? 

La FMSH soutiendra une recherche exigeante, évaluée par les pairs et fondée sur des démarches scientifiques.

Le programme scientifique ne doit pas être redondant avec ce qui existe déjà en SHS, et avec les nouveaux outils qui sont en train d’être développés par le Mesri Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation . Nous venons en soutien et en complémentarité avec ce qui existe déjà dans les sites, les universités et les établissements de l’ESR Enseignement supérieur et recherche . Il reposera entre autres sur :  

  • Le soutien aux jeunes chercheurs, aux docteurs non statutaires (pourquoi pas à terme aux MCF Maître.sse de conférences HDR Habilitation à diriger des recherches qui cherchent à obtenir un poste de professeur) en favorisant les recherches émergentes ou innovantes. Il s’agit de soutenir ceux qui ont des difficultés à trouver des financements ou des instruments pour développer leurs recherches. Nous pourrions ouvrir, par exemple, des chaires FMSH destinées à des chercheurs juniors.
  • Une réflexion sur les disciplines rares, pour faciliter la constitution de réseaux et éviter l’isolement de chercheurs. Plusieurs études et analyses ont été menées, notamment au ministère, sur lesquelles nous pourrons nous appuyer.
  • Une participation active à la construction d’un pôle public national de diffusion pour les SHS. Le conseil de surveillance a créé un groupe de travail sur la diffusion, dont nous attendons les résultats. 
  • Nous accueillerons des chercheurs étrangers pour des séjours plus courts grâce à la Maison Suger . À cet égard, nous menons déjà un travail de concertation avec le Collège de France dont dépend le programme Pause Programme national d’accueil en urgence des scientifiques et des artistes en exil .

« Construire une politique RH »

Vous évoquiez un climat social difficile. Quelles sont vos priorités en matière RH ? 

S’agissant des équipes, je tiens à souligner le professionnalisme qui existe à la FMSH. Nous travaillons avec l’ensemble des collègues et des instances : nous avons une volonté de concertation pour construire un projet commun pour lequel il y ait une adhésion de l’ensemble de la communauté, c’est essentiel à mes yeux. 

Nous travaillons déjà de manière plus rapprochée avec le conseil de surveillance et avec le CSE Comité social et économique , nous renouvelons le conseil scientifique, nous avons réactivé le comité de pilotage qui réunit l’ensemble des chefs de service de manière bimensuelle, nous avons organisé et nous organiserons de façon régulière des AG Assemblée générale pour une meilleure transmission des informations mais aussi pour établir des dialogues constructifs.

J’ai aussi décidé de réactiver la communication interne pour que tout soit fait dans une grande transparence. Je conduis aussi des réunions informelles avec les organisations syndicales.  

Le directoire compte construire une politique RH qui reposera par exemple sur un nouvel organigramme (d’abord savoir qui fait quoi et pourquoi, si les fiches de poste sont en cohérence avec les CV, etc). Nous sommes aidés en cela par l’inspection générale. Nos orientations seront proposées pour validation au conseil de surveillance à l’automne.

L’idée n’est pas de se renforcer en effectifs, mais d’arriver à notre “poids de forme”. Ainsi quelques personnels qui étaient financés par la FMSH mais qui n’y travaillaient pas, sont en cours de transfert vers d’autres institutions. 

Comment va évoluer votre stratégie vis-à-vis de Condorcet d’une part, de l’EHESS École des hautes études en sciences sociales d’autre part ? 

Déménager à terme sur le campus Condorcet »

Je ne suis pas parisienne et je regarde tout cela avec attention afin de bien comprendre l’écosystème francilien. Nous avons, c’est certain, une relation filiale avec l’EHESS, avec laquelle nous entretenons de très bonnes relations. 

Avec Condorcet, les choses sont très claires : nous avons l’intention de participer activement à sa réussite. L’une des premières décisions que j’ai prises a été d’accepter de déménager à terme sur le campus. Mais là encore, ce déménagement ne signifie pas la perte de l’identité, du statut et de l’autonomie de la FMSH. Je souhaite qu’il y ait une empreinte spatiale de la FMSH, avec des locaux spécifiques et facilement repérables sur le Campus.

Plus largement, comment voyez-vous le paysage des SHS en France ?  

Mon analyse du sujet vient du fait que j’étais présidente d’une université SHS, cela m’apporte beaucoup pour comprendre la situation. Une feuille de route stratégique pour les SHS a été initiée par le Mesri. Elle est très importante pour les communautés et sa finalisation est en cours. Nous entrons pleinement dans cette politique du ministère de soutenir les SHS, en ayant conscience de  la place particulière de la FMSH et du rôle que nous pouvons jouer pour soutenir nos collègues.

Du fait de son statut, la FMSH est beaucoup plus réactive qu’une université. Nous pouvons construire un appel à projets en 15 jours ou débloquer des crédits rapidement.  

Il faut lever des inquiétudes »

Plus largement, je place beaucoup d’espoir dans mes équipes et dans les personnels, il y a un dynamisme, une créativité, des SHS. Il faut aussi que les structures s’adaptent aux façons de faire des SHS, qui ne sont pas entièrement solubles dans des instruments pensés au départ pour les sciences dures. Il y a tout un travail à faire pour que les collègues n’aient plus d’appréhension pour répondre aux AAP Appel à projets , il faut lever des inquiétudes et les accompagner pour faire évoluer certaines habitudes, répondre à leurs besoins et bien sûr, faire en sorte qu’il y ait bien plus de succès.

Comment se passe la relation avec le ministère qui est très présent et a été actif pour obtenir le départ de Michel Wieviorka ? 

Les relations sont très bonnes. Nous sommes soutenus, à l’image de la mission d’appui de l’Igésr. Il y a un suivi compréhensible, car le ministère attribue une dotation assez conséquente. Il y a aussi beaucoup de soutien et d’écoute à la DGRI Direction générale de la recherche et de l’innovation et à la Dgesip Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle . Le commissaire du gouvernement nous aide beaucoup.  

On ne vous a pas entendue depuis le début de la polémique sur l’islamo-gauchisme…. 

J’ai suivi l’avis de Jean-François Balaudé Igésr @ Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (Igésr) • Professeur de philosophie ancienne @ Université Paris Nanterre
au nom de l’alliance Athéna, à savoir que l’éthique universitaire ne pouvait et ne devait se plier à un système de contrôle quel qu’il soit. 

A Bordeaux Montaigne, dans mon université, nous avons toujours réussi à parler, à entretenir le débat et à prendre des décisions collégiales, en particulier après l’affaire Agacinski [en octobre 2019, une conférence avec la philosophe Sylviane Agacinski prévue sur le campus avait dû être annulée après la mobilisation de plusieurs associations étudiantes, avant d’être finalement reprogrammée]. Chaque recherche y a toujours trouvé sa place.

Il y a des recherches empêchées en France, bien sûr ! Ces empêchements concernent essentiellement les recherches qui se situent aux marges disciplinaires où il est difficile, presque impossible, d’obtenir des financements et encore plus des postes. La FMSH tentera d’y apporter sa contribution.  

Hélène Velasco-Graciet


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Parcours

Université Bordeaux Montaigne (Bordeaux 3)
Directrice de l’UFR sciences des territoires et de la communication

Fiche n° 16725, créée le 23/03/2016 à 15:52 - MàJ le 29/06/2023 à 11:15

Fondation Maison des Sciences de l’Homme (FMSH)

Catégorie : Fondations


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Fiche n° 9803, créée le 16/04/2020 à 03:36 - MàJ le 16/04/2020 à 15:38


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