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Infrastructure de recherche RMN : « Maintenir les appareils malgré la fermeture » (J-P. Simorre)

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Actualité n°179591 - Publié le 02/04/2020 à 17:05
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Plateforme au sein de l’Institut de biologie structurale - ©  IBS

« Nous pourrions envisager un arrêt en douceur, mais c’est assez compliqué à mettre en œuvre et les coûts de redémarrage seraient énormes. Il est donc important de continuer à remplir les spectromètres d’hélium et d’azote pour les maintenir à basse température », déclare Jean-Pierre Simorre
, directeur de l’infrastructure de recherche Résonance magnétique nucléaire à très hauts champs, à News Tank le 01/04/2020.

Sous la tutelle du CNRS, l’infrastructure rassemble sept sites en France. Ces derniers mettent à disposition 11 spectromètres, des appareils permettant de sonder la matière à l’échelle nanométrique et d’obtenir des informations structurales.

« Nous mettons ces appareils à disposition de tous les utilisateurs qui souhaiteraient s’en servir pour réaliser des expériences à l’aide des ingénieurs présents sur site. Néanmoins, après les consignes de confinement, les spectromètres ne sont plus accessibles aux chercheurs », précise Jean-Pierre Simorre. 

Si les sites ne sont donc plus accessibles, l’enjeu pour l’infrastructure a été de maintenir le fonctionnement des appareils qui « doivent fonctionner 365 jours par an ». 

« Leur fonctionnement est semblable à celui des IRM dans les hôpitaux : c’est la même technologie avec des aimants qui produisent un signal. Dans nos appareils, les aimants sont alimentés avec du courant et fonctionnent ensuite continuellement, ils sont supraconducteurs, il n’y a pas de résistance », explique le directeur.

Pour les arrêter, « il faudrait intervenir sur la bobine intérieure, la faire s’arrêter de manière brutale, provoquant un dégagement d’hélium. Ce qui pourrait endommager la machine qui coûte plusieurs millions d’euros ».

Alors, l’infrastructure a mobilisé des binômes d’ingénieurs sur chacun de ses sites. Leur rythme d’intervention est variable selon les sites et la capacité des spectromètres : « En moyenne, les ingénieurs se rendent sur place une fois par semaine pour réapprovisionner les appareils en hélium et en azote et vérifier que tout va bien, même si certaines choses peuvent être contrôlées à distance », précise Jean-Pierre Simorre.


Vigilance sur l’approvisionnement en azote et en hélium

Si « la situation est pour le moment sous contrôle », selon Jean-Pierre Simorre, directeur de l’infrastructure, « la question de l’approvisionnement en hélium et azote peut s’avérer plus inquiétante à long terme ».

« Nous devons être certains d’avoir les stocks suffisants. Selon les sites, des fournisseurs, comme AirLiquide, se trouvent plus ou moins à proximité et n’ont pas tout à fait cessé leur activité. Reste encore la question du transport jusqu’aux sites ».

Dans le cas où les entreprises ne pourraient plus livrer les sites, cela serait « problématique pour nos aimants au bout de deux à trois semaines », notamment parce qu’il est compliqué de stocker des matières comme l’hélium. 

« Nous pourrions alors envisager de mettre en place des procédures d’urgence, entre les différents sites pour réapprovisionner, ou alors nous tourner vers le constructeur qui possède des réserves importantes », précise Jean-Pierre Simorre.

Une trentaine de projets à l’arrêt

« Pour l’instant, toute la recherche française est un peu au ralenti, une grande partie des laboratoires sont fermés. Les chercheurs sont obligés de faire du télétravail, ce qui pose problème pour tout ce qui est expérimental : de fait, il y aura un décalage des projets de manière générale, y compris ceux en cours dans notre infrastructure », indique Jean-Pierre Simorre.

« L’accès aux machines est décalé, nous savons que nous n’aurons pas 12 mois d’ouverture et donc moins de temps à donner à nos utilisateurs.

Habituellement, nous avons, sur nos sites, 1200 jours d’ouverture par an, avec actuellement une trentaine de projets en cours. »

La possibilité d’envoi d’échantillons à l’étude

Pour l’instant, l’infrastructure de recherche n’a pas mis en place de mesures particulières pour maintenir l’activité des utilisateurs. Néanmoins, si les mesures de confinement s’assouplissent, sans pour autant permettre un accès aux machines, il serait envisageable de fonctionner avec l’envoi d’échantillons.

« Cela éviterait des déplacements de personnes et ainsi des contacts, mais permettrait aux chercheurs d’envoyer leurs échantillons et de faire des manipulations à distance grâce à l’ingénieur présent sur place.

Nous allons réfléchir à ouvrir des passerelles pour les utilisateurs, selon la fin du confinement et les conditions dans lesquelles elle se déroulera », déclare le directeur.

Il insiste sur la nécessité d’être « vigilants sur les conditions de sécurité informatique pour ne pas mettre en danger les données et les machines ».

« La solution la plus simple serait le partage d’écran avec l’ingénieur présent sur place pour éviter tout problème. Il est vrai qu’avec le confinement, le télétravail et les outils numériques sont plébiscités, mais il faut veiller aux failles de sécurité que cela peut provoquer. »

Retard des contrats avec les industriels

L’utilisation des spectromètres est gratuite pour des fins de recherche publique, mais également pour des industriels qui effectuent des travaux dans le cadre de recherche publique.

Sinon, ils doivent s’acquitter de coûts d’accès, indique Jean-Pierre Simorre, qui précise que ces derniers sont calculés « sur la base des couts complets et dépendent du type de l’appareil, de la prestation, de l’implication d’ingénieurs pour l’enregistrement et l’analyse des données ».

« Les infrastructures de recherche ne se suffisent pas à elles-mêmes, les ouvertures aux acteurs industriels ne couvrent pas la totalité des frais assez élevés. Nous fonctionnons avec des financements européens et nationaux sur l’aide à la recherche », précise le directeur. 

Ainsi, les contrats avec les industriels seront, de fait, « retardés ». « S’il s’agit d’un mois, ce n’est pas dramatique, d’autant plus lorsqu’il s’agit de grosses entreprises, comme Total, qui sont elles aussi un peu à l’arrêt dans le contexte actuel », ajoute-t-il, précisant que « si cette situation durait plus longtemps, cela serait plus compliqué à gérer ».

Parcours

Résonance magnétique nucléaire à très hauts champs (RMN THC)
Directeur
Institut de biologie structurale
Directeur de recherche CNRS

Fiche n° 38988, créée le 01/04/2020 à 18:47 - MàJ le 24/11/2020 à 16:23

Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

Le CNRS est le principal organisme de recherche français.


Catégorie : Organismes publics de recherche
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