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Université de la Réunion : « Un processus d’internationalisation de longue date » (A-F. Zattara-Gros)

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Interview n°154597 - Publié le 30/08/2019 à 10:00
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Anne-Françoise Zattara-Gros, vice-présidente relations internationales de l’Université de la Réunion - ©  D.R.

« Nous sommes la seule université française et européenne dans la zone de l’océan Indien. (…) Du fait de cette position, l’Université de la Réunion a engagé un processus d’internationalisation de longue date », indique Anne-Françoise Zattara-Gros, vice-présidente des relations internationales et de la coopération régionale de l’Université de la Réunion, à News Tank le 09/08/2019.

L’université collabore principalement avec des pays de la région de l’océan Indien, en Afrique de l’Est et en Asie du Sud, mais pas seulement. « Nous cherchons à établir des liens avec tous les pays ou secteurs qui sont pourvoyeurs d’employabilité ou à forte valeur ajoutée du point de vue de la recherche », précise Anne-Françoise Zattara-Gros. 

La stratégie internationale s’appuie sur deux schémas : le SRDEII Schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation), dont un des axes est le développement des entreprises à l’international, et le Seforre (schéma d’enseignement, de formation supérieur, de la recherche de la Réunion). Elle s’inscrit également dans le cadre du Livre bleu outre-mer rédigé lors des assises de 2017 de l’outre-mer, qui prévoit notamment la mise en place d’un programme de mobilité.

Principal objectif de cette stratégie internationale : « participer à la construction d’un espace océan Indien de l’ESR Enseignement supérieur et recherche en développant une diplomatie universitaire et in fine, en mettant en place une université fédérative de l’océan Indien, qui regroupera l’île Maurice, Mayotte et Madagascar. Nous avons déjà posé la première pierre en 2018 en créant le réseau des universités de l’océan Indien, avec le soutien de l’AUF Agence universitaire de la francophonie  », ajoute-elle.

Concernant le plan Bienvenue en France, l’université a décidé d’exonérer tous les étudiants concernés par les frais différenciés, après avoir constaté que « les deux tiers des étudiants internationaux sont originaires de la zone océan Indien, et seraient ainsi concernés par la mesure ». De ce point de vue, Anne-Françoise Zattara-Gros estime que l’université ne peut « pas raisonner comme une université continentale ».


Anne-Françoise Zattara-Gros répond à News Tank

Du fait de votre localisation, votre stratégie internationale est liée à l’océan Indien : quelles spécificités émergent de cette implantation ?

Anne-Françoise Zattara-Gros : Nous sommes la seule université française et européenne dans la zone de l’océan Indien. Notre université est autonome depuis 1982 et de manière assez naturelle du fait de cette position, l’Université de la Réunion a engagé un processus d’internationalisation de longue date.

Ceci est permis par un dispositif législatif et réglementaire spécifique du code de l’éducation qui donne des spécificités aux universités ultramarines afin qu’elles servent au rayonnement de leur territoire.

Nos collectivités locales bénéficient également de lois spécifiques qui leur permettent de passer des accords internationaux avec des pays voisins. L’objectif étant de permettre une harmonisation des politiques publiques pour coordonner les actions.

Notre stratégie s’appuie sur deux schémas : le SRDEII Schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation , dont un des axes est le développement des entreprises à l’international, et le Seforre (schéma d’enseignement, de formation supérieur, de la recherche de la Réunion). Dans ce cadre-là, nous avons signé une convention partenariale avec la région en 2017 pour permettre sa déclinaison et nous faisons partie du comité de pilotage. Il s’articule autour de trois axes :

  • la réussite en licence ;
  • l’internationalisation des formations ;
  • le développement de la recherche, ancrée dans les territoires.

Interrogé sur le réseau des université françaises ultramarines, lancé en 2018, Anne-Françoise Zattara-Gros indique qu’il ne fait pas partie du champ international à proprement parler « puisqu’il ne regroupe que des universités françaises. Néanmoins, il y a des ponts avec l’international puisque la Guyane et les Antilles, en tant que régions ultra-périphériques européennes, font partie du consortium que nous avons créé pour l’appel à projets Universités européennes. De même que nous travaillons avec le centre universitaire de Mayotte dans le cadre du réseau des universités de l’océan Indien. »

Y a-t-il une spécificité des universités ultramarines en matière d’internationalisation ?

Notre stratégie s’appuie également sur le Livre bleu outre-mer qui fait suite aux assises de l’outre-mer de 2017 afin de donner une feuille de route à ces territoires.

Un espace régional de mobilité »

Plusieurs recommandations y sont formulées, comme la création d’un espace régional de mobilité. Nous nous sommes attelés à ce projet notamment en répondant à un appel à projets de la région en décembre 2018, que nous avons obtenu, pour la mise en place d’un programme de mobilité appelé « Réunion ».

Son objectif est de financer des mobilités entrantes et sortantes d’étudiants et de personnels, en faisant de la Réunion un point central vers des destinations des 11 pays de la zone de l’océan Indien tels que définis par le périmètre Interreg : Mozambique, Kenya, Tanzanie, Madagascar, les Comores, Île Maurice, les Seychelles, Inde, Australie, Maldives et le Sri Lanka.

S’agit-il de vos principaux partenariats ?

Notre stratégie repose sur une coopération naturelle avec les pays de l’océan Indien et ce que nous appelons son grand cercle élargi, qui va de l’Afrique du Sud jusqu’à l’Éthiopie en passant par l’Afrique de l’Est, puis l’Iran, le Pakistan et l’Inde et jusqu’à la Chine et l’Australie.

À côté de cela, notre stratégie inclut également la zone Europe, avec un certain nombre de partenariats stratégiques avec des pays comme l’Espagne et le Portugal. Nous collaborons également avec l’Allemagne via le Daad (Deutscher Akademischer Austauchdienst, Office allemand d’échanges universitaires).

Nous avons aussi des collaborations de niches, notamment avec les États-Unis et le Brésil avec qui nous travaillons par exemple en santé sur les maladies émergentes. Cela permet de ne pas couper les ailes aux collègues qui souhaitent développer des projets de recherche avec des pays en dehors de l’océan Indien, tout en restant en lien avec nos secteurs prioritaires.

Comment s’articulent tous ces différentes dimensions ?

Ce sont des partenariats différents, du fait des secteurs géographiques. Avec l’Europe, il y a évidemment une dimension linguistique et des programmes en biodiversité avec certains territoires.

Des thématiques communes »

Mais nous n’avons pas de difficultés à créer des partenariats en dehors de ce cercle-là puisque nous avons des thématiques communes avec d’autres territoires. D’autres îles de l’océan Indien font face à des enjeux identiques aux nôtres.

Tout ceci permet finalement d’avoir des collaborations complémentaires qui s’enrichissent de nos spécificités.

Globalement, nous cherchons à établir des liens avec tous les pays ou secteurs qui sont pourvoyeurs d’employabilité ou à forte valeur ajoutée du point de vue de la recherche.

À ce sujet, mettez-vous plus l’accent sur la recherche ou la formation ?

Nous travaillons les deux à la fois. Si nous voulons être attractifs et compétitifs à l’international, la recherche et la formation doivent être indissociables.

Notre objectif est d’attirer des étudiants internationaux, les former, et les amener ensuite à la recherche. Nous sommes notamment en train de développer les co-tutelles de thèse et nous avons par ailleurs mis en place un dispositif de bourses d’excellence adressée aux étudiants qui ont un master d’une université d’un pays partenaire de la zone océan Indien pour les encourager à venir faire leur seconde année à l’Université de la Réunion.

Comment comptez-vous renforcer la visibilité de votre établissement ?

La nouvelle offre de formation 2020-2024 est pensée selon deux champs, et non en domaines classiques comme c’était le cas jusqu’à présent :

  • un champ SHS Sciences humaines et sociales  : culture, territoire et sociétés plurielles dans l’océan Indien,
  • un champ sciences dures : sciences technologie et santé en environnement tropical.

Cette organisation permet de décliner l’offre de formation en l’adossant aux laboratoires de recherche pour rendre visibles les spécificités de la Réunion en matière de formation et de recherche.

Cela fait partie de notre stratégie : promouvoir la marque de l’Université de la Réunion à l’international en mettant en avant ses spécificités.

L’université a répondu à deux appels à projets dont les résultats ont été rendus :

Adesfa : Appui au développement de l’enseignement supérieur français en Afrique « Nous avons été lauréats de cet AAP avec le consortium franco-africain créé avec six autres universités : Rennes 1 et Nanterre en France, ainsi que trois universités éthiopiennes et une université kenyane.

L’objectif est de faire du renforcement de capacités, notamment en médecine, géographie, droit et économie, ainsi qu’en FLE Français langue étrangère en Éthiopie. Au Kenya, nous souhaitons lancer une mission exploratoire pour participer au montage d’une faculté de médecine. La mission inaugurale aura lieu au mois de septembre.

Le pilotage du projet se fait à trois avec les deux autres universités françaises. Nous nous sommes réparti les thématiques et chaque université française a des partenariats ou des rapports déjà existants avec certains des établissements africains », précise la vice-présidente des relations internationales et de la coopération régionale.

• Universités européennes : « Nous avons déposé un projet avec plusieurs universités ultramarines (Antilles, Guyane, Las Palmas et La Laguna aux Canaries, Açores et Madère) qui n’a pas été retenu. L’idée était de prendre rang pour ensuite mieux présenter le projet lorsque l’appel à projets définitif sortira », précise t-elle.

Par ailleurs, l’université prévoit de répondre à un troisième AAP prochainement, de l'AFD Agence française de développement , « pour lequel nous devrions avoir de plus amples informations d’ici fin 2019. Nous allons travailler avec les universités de Rennes 1 et Nanterre, nous réfléchissons aux pays avec lesquels nous pourrions collaborer, ainsi que les secteurs qui nous intéresseraient ».

Combien d’étudiants internationaux accueillez-vous chaque année ?

L’Université de la Réunion reçoit entre 800 et 900 étudiants internationaux (sur 15 000) de 66 nationalités différentes, ce qui montre l’attractivité de l’université, mais aussi de notre petit territoire.

60 % de ces étudiants sont originaires de pays de l’océan Indien, principalement, Madagascar, les Comores et l’île Maurice. La seconde région d’origine la plus importante est l’Europe avec 19 % des étudiants, viennent ensuite l’Afrique (12 %) et notamment le Maghreb, puis l’Asie (6 %) principalement avec la Chine.

Ces effectifs ont augmenté ces dernières années, du fait de plusieurs éléments :

  • nous avons inscrit dans nos objectifs stratégiques l’augmentation de la mobilité entrante et sortante ;
  • nous avons mobilisé de nouveaux programmes européens Erasmus+, dont des MIC [Mobilité internationale de crédit], nous situant à la troisième place des établissements français en 2018 avec une enveloppe de 688 k€ pour quatre projets (Madagascar, Inde, Afrique et Maroc) ;
  • nous nous sommes par ailleurs assurés que la qualité d’accueil demeurerait bonne, comme l’a jugé l’audit Erasmus+ qui a eu lieu en 2018, estimant qu’il s’agissait d’un de nos points forts.

Et combien d’étudiants de l’Université de La Réunion sont concernés par la mobilité sortante ?

160 étudiants de l’Université de la Réunion partent chaque année en mobilité. Cette faible quantité s’explique essentiellement par des freins culturels. Mais nous avons mené une campagne de promotion très active, ces dernières années avec une semaine internationale, un Erasmus day et également en 2018 pour la première fois un concours photo en partenariat avec une compagnie aérienne qui permettra au gagnant du premier prix d’avoir un billet pour une capitale européenne et celui du second prix une capitale d’un pays de l’océan Indien.

Et en 2017, nous avons créé une association à destination des étudiants internationaux, afin de mettre en place un parrainage entre étudiants internationaux et locaux et pour proposer des activités communes.

Concernant les programmes Erasmus+, comment avez-vous élaboré votre stratégie ?

Nous avons 140 accords qui se sont construits en deux phases :

  • quantitative, où nous avons développé les partenariats et les accords avec plusieurs universités dans différents pays ;
  • puis stratégique, où nous avons analysé les flux de mobilité étudiante pour définir des priorités et ainsi augmenter les places disponibles.

Un certain nombre d’événements, comme le Brexit, redessinent les routes de mobilité. À ce sujet, nous réfléchissons en ce moment pour réorienter nos étudiants qui souhaitaient se rendre en Grande-Bretagne vers d’autres pays anglophones, ou non.

En 2018, nous avons déposé 14 projets MIC sur l’ensemble de la zone océan Indien. Nous souhaiterons surtout pouvoir mobiliser d’autres programmes Erasmus+, notamment concernant le renforcement de capacité. 

La mobilité concerne-t-elle aussi les personnels ?

Pour ce qui est des personnels, nous souhaitons internationaliser la plupart des services de notre établissement en proposant plus de bourses à destination des personnels. En 2018-2019, 31 personnels sont partis en mobilité.

Souhaitez-vous aller plus loin dans la structuration de ces relations au niveau européen ?

La synergie est un vrai sujet  »

Nous avons déjà des partenariats stratégiques de recherche avec des universités européennes, mais la synergie est un vrai sujet à l’heure actuelle, pour réfléchir à l’articulation des fonds Erasmus avec d’autres fonds.

Notre objectif final est de participer à la construction d’un espace océan Indien de l’ESR en développant une diplomatie universitaire et in fine, en mettant en place une université fédérative de l’océan Indien, qui regroupera l’île Maurice, Mayotte et Madagascar.

Nous avons déjà posé la première pierre en 2018 en créant le réseau des universités de l’océan Indien, avec le soutien de l’AUF. Le prochain objectif lors de la conférence annuelle suivante et d’intégrer les Seychelles et tisser des cercles concentriques.

Il est certain qu’il faut des moyens humains pour créer des synergies. À l’Université de la Réunion, cela fait partie des priorités et nous avons une cellule d’ingénierie de projet. Mais si l’on veut monter en puissance, il faudra forcément renforcer les équipes.

« Bienvenue en France » : frais différenciés et labellisation de l’Université de La Réunion

La vice-présidente relations internationales de l’Université de la Réunion revient sur la façon dont l’université s’est appropriée les mesures du plan « Bienvenue en France »

Anne-Françoise Zattara


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Parcours

Université de la Réunion
Vice-présidente relations internationales et coopération régionale
Université de la Réunion
Maîtresse de conférences en droit

Établissement & diplôme

Université de la Réunion
Doctorat en droit privé

Fiche n° 36138, créée le 26/08/2019 à 18:41 - MàJ le 27/08/2019 à 12:10

Université de la Réunion

Catégorie : Universités


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Anne-Françoise Zattara-Gros, vice-présidente relations internationales de l’Université de la Réunion - ©  D.R.