Pride, réseau « de pair-à-pair » pour la formation doctorale en Europe (L. Zinner)
« Avec Pride, nous nous définissons comme un réseau de professionnels de l’enseignement doctoral, ceux qui “font fonctionner le système”, agissant de pair-à-pair », déclare Lucas Zinner, président du réseau Pride à News Tank, le 02/05/2022.
Ce réseau européen réunit des professionnels de la formation doctorale depuis 2017, dont un de Sorbonne Université, avec pour objectifs :
• « la mise en pratique des politiques,
• le partage des initiatives entre professionnels,
• et le suivi du développement de la formation doctorale en Europe ».
« Cela nous permet d’être vraiment au courant de ce qui se passe avec les sujets qui se développent ou qui sont en train de se développer. Un exemple est le sujet des post-docs : ils apparaissent pour la première fois dans l’enquête EUA-CDE
Conseil pour l’enseignement doctoral de l’EUA
publiée en avril 2022. Il y a trois ans, notre conférence portait sur ce thème des post-docs », indique Lucas Zinner.
Pride organise les 05 et 06/05/2022 sa conférence annuelle sur le thème de l’impact : « Nous voulons encourager les doctorants à réfléchir à ce qui fera la différence dans leur carrière et leurs expériences. Et donc, lorsqu’ils rencontrent la société civile, à être capables d’expliquer clairement leurs recherches, l’intérêt de ce qu’ils font, pourquoi cela a du sens, y compris à des fins commerciales ou entrepreneuriales. »
Formation doctorale en Europe, enjeux des pratiques mais aussi stratégie pour développer la communication scientifique et le lien à la science avec et pour la société, voici quelques-uns des grands thèmes de cet entretien.
Un positionnement « entre l’académique et l’administratif »
Quelle est l’origine du réseau Pride (Professionals in doctoral education), créé en 2017 ?
L’un de nos points de départ était de nous dire : trouvons les personnes qui travaillent sur les sujets de la formation doctorale en Europe, et pas seulement les personnes qui l’administrent, mais celles qui ont fait la différence. Et nous les avons trouvées ! Dans les départements dédiés aux carrières, dans les rectorats, parfois dans les graduate schools, dans les départements de soutien à la recherche, dans les départements des affaires étudiantes…
Autant de personnes que d’intitulés de postes »Il y avait autant de personnes que d’intitulés de postes : nous cherchions à identifier, avant tout, des compétences qui serviraient le sujet de la formation doctorale. Il y avait une grande diversité.
Nous nous sommes interrogés sur ces personnes qui contribuaient à la formation doctorale : qui sont-elles, ont-elles un « ADN » particulier ? Ont-elles des missions comparables ? Quelles sont leurs pratiques et comment sont-elles perçues au sein de leur institution ? Sont-ils perçus comme des administratifs, ou comme le « couteau suisse » sur le sujet, etc. ? Nous en sommes progressivement arrivés à définir des invariants dans ce que signifie être un « professionnel » de la formation doctorale.
Beaucoup de personnes que nous avons rencontrées dans ce premier projet étaient encore assez isolées dans leurs institutions. Nous avons donc pensé qu’il était nécessaire de créer un groupe de pairs au niveau européen. Nous partageons des connaissances, des bonnes pratiques, organisons des formations, et cela contribue à donner une identité à ces professionnels. Nous nous définissons comme travaillant dans le troisième espace, c’est-à-dire entre l’académique et l’administratif.
Comment résumeriez-vous votre mission ?
Notre idée est de former la prochaine génération de professionnels et de les mettre en relation. Cela se fait principalement par le biais de sessions de formation. Nous organisons deux sessions de formation et une conférence par an, et nous tenons beaucoup aux rencontres en face à face. Du fait de la Covid, nous avons également commencé par des webinaires qui ont été bien accueillis. Nous organisons également un suivi, mais il est plus complexe pour les professionnels de s’engager et de participer.
Vous travaillez personnellement sur le thème de la formation doctorale depuis 2008, quel était le contexte à l’époque ?
C’était l’époque où les principes de Salzbourg [qui visent à garantir l’excellence scientifique de la formation doctorale et des projets de recherche des doctorants tout en encourageant la mobilité intersectorielle des jeunes docteurs] se développaient, où ils prenaient de l’ampleur. À cette époque, le président de l’université de Vienne, où je travaille dans le département du développement de carrière, était également président de l’EUA European University Association . J’ai eu le privilège d’être relativement proche de l’élaboration des politiques.
Si, à l’origine, la communauté qui discutait de la formation doctorale en Europe était principalement composée de responsables universitaires et que les vice-recteurs et les professionnels étaient rares, les choses ont changé au fil du temps, de sorte que davantage d’administrateurs ont participé aux réunions. Les professeurs, les universitaires qui se consacraient temporairement à des tâches de direction, sont retournés à leurs activités d’enseignement et de recherche. J’y vois un signe de la professionnalisation du domaine.
Dans de nombreuses institutions, les professionnels qui ont continué à s’occuper des questions de formation doctorale au niveau européen deviennent la colonne vertébrale du système, assurant le transfert des connaissances aux nouveaux vice-recteurs ou aux responsables des domaines liés à la formation doctorale. C’est important car, même s’ils faisaient d’excellentes recherches, ils étaient moins formés aux questions des principes de Salzbourg, par exemple.
Comment vous positionnez-vous par rapport au Conseil de l’enseignement doctoral de l’EUA ?
Avec Pride, nous nous définissons comme un réseau de professionnels de l’enseignement doctoral, ceux qui « font fonctionner le système », agissant de pair-à-pair.
Bien sûr, nous travaillons en lien avec les administrations des universités, mais ce qui est intéressant à noter de mon point de vue, c’est de rappeler qui prend en compte les évolutions de la formation doctorale ? Qui prend en compte les rapports du CDE Council for Doctoral Education (EUA) ? Qui suit les dossiers au quotidien ? Ce ne sont pas les vice-recteurs des universités, ce sont plutôt les professionnels.
CDE réseau Pride pas en concurrence »En comparant le CDE et le réseau Pride, je ne veux pas parler de concurrence entre nous, mais il s’agit de complémentarité. Ainsi, le CDE est plus impliqué dans les questions de développement de politiques, alors que le réseau Pride est plus impliqué dans la mise en pratique des politiques, le partage des initiatives entre professionnels et le suivi du développement de la formation doctorale en Europe. Cela nous permet d’être vraiment au courant de ce qui se passe avec les sujets qui se développent ou qui sont en train de se développer. Un exemple est le sujet des post-docs : ils apparaissent pour la première fois dans l’enquête de l’EUA-CDE publiée en avril 2022. Il y a trois ans, notre conférence portait sur ce thème des post-docs.
Je donne cet exemple pour montrer la complémentarité entre nos initiatives, et aussi pour voir comment nos points de vue participent au travail à mener sur un objet en cours de définition, avec la question des moyens d’action à mettre en place à différents niveaux. Concernant les professionnels que nous accompagnons, ils sont dans une double dynamique : d’une part en suivant la situation internationale, et d’autre part par le fait qu’ils doivent prendre en compte l’environnement national pour adapter les caractéristiques de la formation doctorale.
Votre événement annuel des 05 et 06/05/2022 a pour thème « l’impact ». Quel est le sens que vous donnez à ce terme ?
La notion d’impact touche à plusieurs niveaux de la question de la formation doctorale et de ses débouchés : par exemple, pourquoi faire de la recherche, quel est son impact ? L’impact est un critère de sélection des projets de recherche…
Ce que nous faisons et comment nous le faisons doit se situer dans une perspective d’impact, et nous devons chercher à valoriser notre action. La société européenne n’est pas suffisamment consciente de l’importance de la recherche pour notre société, pour ainsi dire.
Se situer dans une perspective d’impact »Nous voulons encourager les doctorants à réfléchir à ce qui fera la différence dans leur carrière et leurs expériences. Et donc, lorsqu’ils rencontrent la société civile, à être capables d’expliquer clairement leurs recherches, l’intérêt de ce qu’ils font, pourquoi cela a du sens, y compris à des fins commerciales ou entrepreneuriales.
Nous devons donc nous engager à renforcer nos compétences en matière de communication scientifique, et expliquer comment la science fonctionne. L’impact aujourd’hui s’incarne d’autres manières, et c’est aussi une responsabilité institutionnelle. Par exemple, si nous ne sommes pas proactifs dans ce que nous faisons comme recherche ou ce qu’est notre projet institutionnel, il y a un risque de ne pas pouvoir défendre l’image de notre institution de manière durable et aussi d’être mis sur la touche.
Quelles sont les autres priorités concernant la formation doctorale sur lesquelles vous travaillez avec le réseau Pride ?
Le sujet sur lequel nous travaillons continuellement est celui de l’encadrement au sens large. C’est un sujet qui est très proche du cœur de la recherche et des interactions entre tous les acteurs de la formation doctorale. Il est parfois difficile de convaincre les responsables universitaires de la nécessité de dispenser des formations sur le thème de l’encadrement de thèse, d’organiser des ateliers, etc.
Le sujet de notre prochaine masterclass sera très probablement l’intégrité de la recherche. Dans la récente enquête du CDE, elle a été mentionnée comme l’une des priorités, et je pense que les professionnels peuvent jouer leur rôle aux côtés des superviseurs. L’idée ici est de pouvoir donner aux professionnels les clés qui leur permettront de réaliser des ateliers sur le sujet dans leurs institutions. Il est important de dire ici qu’il ne s’agit pas d’indiquer les bonnes ou mauvaises pratiques, mais de pouvoir partager ce qui se fait, et d’être au plus près des décisions des chercheurs et d’en observer collectivement les conséquences.
Lucas Zinner
Président @ Pride Network
Directeur des services de recherche et du développement de carrière @ Université de Vienne
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Parcours
Président
Directeur des services de recherche et du développement de carrière
CEO et co-propriétaire
Directeur des services à la recherche
Directeur du centre des études doctorales
Directeur adjoint des services à la recherche et des relations internationales
Chef de projet scientifique
Post-doc
Établissement & diplôme
PhD en mathématiques, philosophie
Fiche n° 45946, créée le 03/05/2022 à 10:33 - MàJ le 03/05/2022 à 14:35
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