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Genopole : « Repenser un projet académique avec notre université » (Stéphane Beaudet)

News Tank Éducation & Recherche - Paris - Interview n°246130 - Publié le 24/03/2022 à 10:00
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©  D.R.
Stéphane Beaudet - ©  D.R.

« Aujourd’hui, nous devons repenser avec beaucoup d’ambition mais aussi d’humilité, un projet académique avec notre université. Je pense ici à l’Université d’Évry mais aussi à l’Université Paris-Saclay puisque les deux fusionnent à horizon 2025/2026 », indique Stéphane Beaudet Président @ Genopole • Maire @ Mairie d'Évry-Courcouronnes • Président délégué @ Agglo Grand Paris Sud • Vice-président Transports @ Région Île-de-France (Conseil régional d'Île-de-France… , président de la SEM Société d'économie mixte et du GIP Groupement d’intérêt public Genopole Genopole est un biocluster français dédié à la recherche en génomique, génétique et aux biotechnologies, créé en 1998. C’est un goupement d’intérêt public depuis 2002. , à News Tank, le 21/03/2022.

Celui qui tient aussi la mairie d’Évry-Courcouronnes depuis janvier 2019 décide d’être le premier édile de la ville à prendre la tête du campus de recherche et d’innovation essonnien dans la foulée, en mars 2019.

« Nous avons engagé un travail de rapprochement très important avec Sylvie Retailleau Ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche @ Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche (MESR)
et ses équipes, pour construire avec l’Université Paris-Saclay des interactions jusqu’ici insuffisantes, ce que j’estime être une faute aujourd’hui réparée », poursuit-il.

D’autres chantiers sont en cours autour du cluster spécialisé dans l’innovation environnementale et liée à la santé : 20 ans après sa création « par un alignement des planètes politique, technique et administrative incroyable », il se trouve « confronté à une réalité qui n’est plus du tout la même » en matière de « concurrence ».

Le modèle de Genopole construit autour d’un GIP, pour le soutien à la recherche et à la croissance des entreprises, et d’une SEM soutenant le développement immobilier, « doit évoluer » « pour être capable de répondre rapidement à des demandes d’extension de locaux ou d’installation sur site », estime ainsi Stéphane Beaudet, qui table sur une restructuration « avant l’été 2022 ».

Par ailleurs, le président entend « réinterroger [la] politique d’industrialisation » et partir « à la recherche de partenaires ».


Structure de Genopole : « Repenser le modèle »

Vous engagez en ce moment Genopole dans une restructuration totale. Pourquoi ?

Genopole est une structure assez exceptionnelle créée par un alignement des planètes politique, technique et administrative incroyable, il n’y a pas loin de 25 ans. Pierre Tambourin Président @ association Centre de recherche Clinique et Translationnelle • Président du Pôle scientifique d’Evry Val d’Essonne @ Université d'Évry (Université d'Évry)
avait été missionné pour ce projet, sachant que l’AFM-Téléthon était déjà sur le territoire, donc l’emplacement n’était pas un hasard. 

Vue aérienne du site de Genopole - ©  Genopole
On se retrouve 20 ans après avec un outil qui a donné des résultats extraordinaires, en matière de recherche et de développement de laboratoires, mais qui se trouve confronté à une réalité qui n’est plus du tout la même. D’abord parce qu’il y a eu des découvertes, d’autres sont à venir, par voie de conséquence, cela crée de la concurrence. Il faut donc faire évoluer le modèle économique de Genopole.

Un début de modèle économique se met en place »

Genopole doit poursuivre le projet académique de recherche en accentuant son volet industriel. Nous avons une politique de soutien aux projets de recherche à travers plusieurs dispositifs d’allocations et de financement d’équipements technologiques, mais il faut réinterroger notre politique d’industrialisation.

Dans le contexte politique, technique et institutionnel de l'époque de la création de Genopole, il a été bien pensé le fait qu’il fallait deux structures distinctes :

  • Le GIP (Groupement d’intérêt public) qui porte la mission même du campus du point de vue du soutien à la recherche et à la croissance des entreprises de biotechnologie, en lien avec le territoire du coeur de l’Essonne, le CHSF (Centre hospitalier sud-francilien), l’Université d’Évry, Paris-Saclay, les grandes écoles, etc.).
  • Et une structure ad hoc sous la forme d’une SEM (Société d’économie mixte) pour porter le développement immobilier du campus.

Ce modèle qui a fonctionné un temps, doit évoluer. Les missions premières de la SEM ne sont plus compatibles avec la réalité bâtimentaire d’aujourd’hui. D’autre part, le GIP exerce un métier de coordination et de développement avec des partenaires industriels de toutes sortes, qui nécessite une forme d’agilité. Il faut donc repenser le modèle pour être capable de répondre rapidement à des demandes d’extension de locaux ou d’installation sur site.

Parmi les 77 entreprises labellisées par Genopole, 50 sont présentes sur le site essonnien et 14 s’y sont installées en 2021.

Dix biotechs présentes sont cotées en bourse : 

AB Science : entreprise pharmaceutique fondée en 2001 et ayant ouvert une antenne R&D sur le campus en 2016. Elle développe un médicament contre le cancer stromal gastro-intestinal et le cancer du pancréas.

Global Bioenergies : développe des procédés de conversion de ressources renouvelables en hydrocarbures par fermentation.

Illumina : biotech américaine spécialisée dans le séquençage de l’ADN et les technologies basées sur les puces ADN. 90 % des séquences ADN générées dans le monde sont issues des plateformes Illumina.

• OncoDNA (ex IntegraGen) : biotech belge spécialisée dans le décryptage du génome humain, et particulièrement du cancer.

• New England Biolabs : produit des réactifs de recherche en science de la vie, plus particulièrement des enzymes de biologie moléculaire.

Pharming : biotech néerlandaise développant des produits innovants en réponse à des besoins médicaux encore non couverts.

Santen : société pharmaceutique japonaise spécialisée en ophtalmologie.

Sebia : société française spécialisée dans la conception de systèmes de diagnostic in vitro par électrophorèse.

• SynHelix (acquis par le Belge Univercells en janvier 2022, et maintenant partie de Quantoom Biosciences) : biotech française développant un procédé de production de novo d’ADN par voie enzymatique pour améliorer la productivité des acteurs développant des biothérapies.

• Yposkesi (acquis par le Coréen SK Holdings en mars 2021) : créé en novembre 2016 par l’AFM-Téléthon et le fond SPI géré par Bpifrance, l’entreprise française est spécialisée dans le développement et la fabrication de produits de thérapie génique et cellulaire pour les maladies rares.

Vous êtes maire d’Évry-Courcouronnes depuis 2019. Pourquoi avoir pris la tête de Genopole ?

Un modèle avant-gardiste aujourd’hui dépassé »

Je deviens maire d’Évry dans le cadre d’une fusion communale d’Évry et Courcouronnes en janvier 2019, et je m’intéresse à Genopole qui a évidemment des richesses incroyables, un grand potentiel, mais son modèle avant-gardiste à sa construction, est aujourd’hui dépassé. L’articulation entre le GIP et la SEM ne fonctionne pas très bien, et il y a peut-être une sorte de rupture de confiance entre le GIP et son financeur principal, la Région Île-de-France.

Historiquement le président émanait de l’actionnaire majoritaire qui a longtemps été le département de l’Essonne [Thierry Mandon Secrétaire général @ Conseil national du commerce
a donc présidé Genopole de 1998 à 2014]. Du fait de la loi Notre, c’est la Région qui doit désormais déléguer un de ses vice-présidents pour présider la structure.

En tant que VP délégué aux transports de la Région Île-de-France, je décide donc d’être le premier maire d’Évry à présider Genopole à partir de mars 2019 pour essayer d’engager sa réforme.

Par ailleurs, Évry-Courcouronnes est la préfecture de l’Essonne. C’est une ex-ville nouvelle qui a besoin de devenir une « vraie ville » malgré tous ses atouts universitaires, de recherche et de développement économique. Quand j’ai fait faire des études par des organismes de sondage français et internationaux à l’échelle d’Évry, on s’est rendu compte que la ville n’avait pas d’image étudiante, ni « génopolitaine »…

Que faut-il donc changer dans la structuration de Genopole pour lui donner plus de chances d’atteindre le statut de centre de recherche et d’innovation de rang mondial ?

Il faut d’abord envisager le rapprochement des deux structures, GIP et SEM. Tout est sur la table. Nous étudions de manière très ouverte toutes les formes institutionnelles que pourrait prendre ce rapprochement.

15,6 M€ de budget en 2021 »

Pour la première fois en vingt ans, les comités directeurs de la SEM et du GIP se sont réunis en décembre 2021 sous mon impulsion. Ce que je sais, c’est que depuis que le comité de direction est commun, la culture d’entreprise a totalement changé.

Aujourd’hui, nous devons repenser avec beaucoup d’ambition mais aussi d’humilité, un projet académique avec notre université. Je pense ici à l’Université d’Évry mais aussi à l’Université Paris-Saclay puisque les deux fusionnent à horizon 2025/2026. Nous avons engagé un travail de rapprochement très important avec Sylvie Retailleau et ses équipes, pour construire avec l’Université Paris-Saclay des interactions jusqu’ici insuffisantes, ce que j’estime être une faute aujourd’hui réparée. Nous faisons de même avec le CEA, qui a des laboratoires de recherche à Genopole.

Parallèlement, nous devons repartir à l’offensive pour déployer l’industrialisation du site et la recherche de partenaires. 

Je reste marqué par la perte d’un appel d’offres auquel nous avions concouru en 2001 : le projet Pfizer. Depuis, ce projet s’est matérialisé autour du périphérique Porte d’Orléans. Aujourd’hui, nous avons envie d’aller chercher un grand industriel du médicament pour porter un projet du même type sur le campus de Genopole. 

Un FoodBiotech Lab : espace de prototypage pour l’alimentation du futur, développement de protéines alternatives à base d’insectes, de plantes, d’algues, de champignons, etc., culture cellulaire (viande, foie gras de synthèse), fermentation de précision (lipides, arômes…).

Calendrier : l’ouverture est prévue en juin 2023.

Une biofonderie : espace robotisé de conception, production et tests de micro-organismes (levures, bactéries…) pour la bioindustrie (pharmacie, cosmétique, énergie, alimentation, matériaux…).

Calendrier : installation dès 2023 dans un bâtiment existant de 1 200 m2 sur le campus de Genopole avant d’intégrer à l’horizon 2025, un futur édifice de 3 000 m2 qui abritera également l’IGN.

Un Institut de génomique numérique (IGN) (soutenu par le CPER Contrat de plan État-région Île-de-France) : « bibliothèque » de données numériques biologiques de sources publiques et privées, à des fins de bioproduction industrielle.

Calendrier : l’IGN fonctionnera « hors les murs » et occupera un espace de 1 250 m2 à l’horizon 2025.

Quel calendrier vous fixez-vous pour la restructuration de la SEM et du GIP ?

Nous aimerions conclure cela avant l’été 2022.

Pensez-vous que Genopole saura trouver sa place et conserver son identité en s’introduisant dans l’écosystème de Saclay ?

Je pense qu’il y a de la place pour tout le monde sur ce campus. Le Plateau de Saclay n’est pas loin de la saturation, donc il n’y a pas besoin de se faire de concurrence territoriale.

De plus, l’avènement du T12 Express d’ici un an va placer Genopole à une heure de Massy et du Plateau de Saclay, ce qui constituera une liaison sans précédent entre les deux territoires.

Quels sont vos liens aujourd’hui avec l’Université d’Évry et celle de Paris-Saclay ?

Ces liens sont aujourd’hui considérablement renforcés. Nous avons un directeur par intérim, David Bodet, mis à disposition par l’Agglomération Paris-Sud, dont la mission est de réorganiser Genopole. Aujourd’hui DGA de l’Agglo, il était par le passé président de la Communauté d’agglomération du Plateau de Saclay.

Pouvez-vous compter sur le soutien des collectivités territoriales pour engager votre réforme ?

Nous pouvons compter sur un réalignement des planètes politiques, qui n’ont pourtant pas toutes la même couleur, de la Région Île-de-France au Département de l’Essonne, en passant par l’Agglomération. 

Nous avons adopté un contrat d’objectif avec la Région il y a un an. Il assure la pérennité financière du dispositif. Le budget 2021 de Genopole est de 15,6 M€, dont 11,4 M€ de budget de fonctionnement issus pour 36 % de la Région, 25 % de l’État, et dont 4,2 M€ de budget d’investissement provenant intégralement de la Région.

 Dans le cadre du CPER, la Région Ile-de-France a fléché 6,6 M€ pour la création d’un nouvel Institut de génomique numérique

Comment les activités de Genopole se sont-elles diversifiées en 20 ans ?

Genopole, qui s’axait exclusivement sur la santé il y a 20 ans, équilibre aujourd’hui son activité entre l’innovation pour la santé et l’innovation pour l’environnement. Il se fait également une place dans la thématique de la data et de la génomique numérique. Nous avons une capacité certaine à nous diversifier.

Le Gouvernement vient de lancer un appel à manifestations d’intérêt pour labelliser jusqu’à trois bioclusters sur le territoire. Genopole pourrait-il être candidat ?

Évidemment, cela nous intéresse. D’autant plus que nous pourrions avoir les arguments. Mais pour les atteindre, il faut que nous conservions une certaine humilité, car il ne suffira pas de candidater en disant qu’on est Genopole pour gagner. 

Nous devons être capables de nous projeter sur un projet académique, de nous adosser à une université puissante, à un hôpital d’avenir reconnu et de constituer un territoire avec l’ensemble de nos partenaires.

Stéphane Beaudet


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Genopole
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Président
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Dirigeant
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Fiche n° 45614, créée le 23/03/2022 à 15:00 - MàJ le 24/03/2022 à 16:51

Genopole

Genopole est un biocluster français dédié à la recherche en génomique, génétique et aux biotechnologies, créé en 1998. C’est un goupement d’intérêt public depuis 2002.


Catégorie : Organismes publics de recherche


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Fiche n° 3702, créée le 30/11/2015 à 03:34 - MàJ le 25/02/2020 à 13:43

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