Recherche sur le Covid-19 : une « structure de pilotage unique », halte aux dérives (Acad. médecine)
Les académies nationales de médecine, pharmacie et vétérinaire de France recommandent qu’une structure de pilotage unique, portée par Aviesan
Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé
, coordonne la recherche sur le Covid-19, indiquent-elles le 06/05/2020. Cette structure bénéficierait du soutien de l’ANR
Agence nationale de la recherche
, de l’ANRS
Agence Nationale de Recherche sur le Sida et les hépatites
et du PHRC (Programme hospitalier de recherche clinique) pour la programmation, le lancement des appels à propositions, l’évaluation des projets de recherche et des moyens spécifiquement affectés.
« Les projets couvriront tous les aspects de la pandémie Covid-19 : épidémiologie, facteurs de risque, formes cliniques, prévention, mécanismes physiopathologiques, essais thérapeutiques, vaccins, tests diagnostiques, santé numérique, sciences humaines et sociales, économie de la santé, éthique, etc. », précisent-elles.
Les académies recommandent aussi que cette coordination s’inscrive dans une stratégie nationale et européenne commune, et que la France lance une initiative « d’envergure » auprès de l’Union européenne et des États membres.
Dans un autre avis, le 08/05, l’Académie de médecine déplore que la recherche de traitements médicamenteux actifs contre le Covid-19 se soit « fourvoyée » dans une « dérive » caractérisée par « trop de précipitation dans la communication, trop d’annonces prématurées, trop de discordes entre les équipes, trop de pressions de toutes sortes, mais pas assez de science ».
Pour elle, les prises de positions « passionnelles, voire compassionnelles », en faveur de l’hydroxychloroquine « avant tout essai comparatif ont été si nombreuses, et les pressions si fortes dans un contexte anxiogène, que les patients n’acceptaient d’entrer dans l’essai qu’avec la certitude de ne pas être inclus dans le bras placebo, ce qui est incompatible avec le principe même de l’essai contrôlé. En conséquence, rares étant ceux qui acceptaient de contribuer à l’avancée de la science ».
Elle pointe aussi « la regrettable dispersion des essais [qui] limite la taille des effectifs et réduit la puissance statistique des résultats ». Pour elle, si le contexte « anxiogène » de la pandémie stimule la compétition entre les équipes de recherche dans le monde entier, « cet impératif ne saurait justifier l’utilisation de méthodes inappropriées, d’études bâclées, ni d’une communication avide d’exclusivités ».
Divers objectifs visés
Les académies de médecine, pharmacie et vétérinaire recommandent que la structure de pilotage de la recherche sur le Covid-19 ait aussi pour objectifs de :
- mutualiser les infrastructures françaises et européennes existantes : cohortes, biobanques, entrepôts de données de santé, plateformes analytiques ;
- soutenir la création de cohortes Covid-19 (convalescents, porteurs asymptomatiques, personnel soignant, etc.) pour la réalisation d’études épidémiologiques, phénotypiques, génétiques, anthropologiques et sociales ;
- mettre en réseau les centres de ressources biologiques pour optimiser l’accès aux collections d’échantillons biologiques, y compris les prélèvements autopsiques ;
- identifier la source zoonotique du Sars-CoV-2 et connaître les modalités d’introduction de ce virus à partir de la chauve-souris ainsi que le rôle éventuel d’un ou de plusieurs hôtes intermédiaires ;
- développer un programme spécifique en intelligence artificielle : diagnostic et suivi des malades, télémédecine, aide à la décision, échantillonnage-groupage par sondage en population, modélisation épidémiologique et stratégies thérapeutiques ;
- et promouvoir une communication de qualité vers le grand public pour l’informer des avancées de la recherche sur le Covid-19.
Une « grande confusion »
Selon les trois académies, dès le début de la pandémie Covid-19, de nombreux appels ont été lancés pour promouvoir dans l’urgence des recherches sur la maladie et pour développer des moyens diagnostiques et thérapeutiques appropriés.
Mais cette multiplication d’offres « non coordonnées a eu pour conséquence un afflux de propositions, une grande confusion dans les projets, une multiplicité de gouvernances, une dispersion des moyens et des capacités de la communauté scientifique, au risque d’une inefficience globale », estiment-elles.
UE : un « manque de stratégie globale de riposte »
Au niveau de l’Union européenne, « le manque de stratégie globale de riposte à la pandémie est confirmé par l’absence de programmes d’envergure et de coordination de la recherche sur le Covid-19 », ajoutent-elles.
De plus, selon ces académies, les appels à projets ont été prioritairement orientés vers les étapes précoces du processus infectieux, « négligeant ainsi le poids des comorbidités dont on constate aujourd’hui l’importance dans l’évolution de la maladie, et la gravité potentielle des formes cliniques extra-pulmonaires ».
Corriger le « désordre observé »
« La nécessité d’affecter des moyens à la recherche en biologie-santé ayant déjà été soulignée par l’Académie nationale de médecine, il apparaît que le déploiement de moyens substantiels pour la recherche ne sera efficace qu’au prix d’une profonde correction du désordre observé et par la mise en place d’une stratégie coordonnée », indiquent encore les trois académies.
Académie nationale de médecine
Catégorie : Établissements publics
Adresse du siège
16 rue Bonaparte75006 Paris France
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